Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Chine (suite)

En 1919 commence la première guerre civile révolutionnaire, qui devait durer jusqu’en juillet 1927. Son but était l’élimination ou la neutralisation par le Guomindang (Kouo-min-tang) des féodaux et du gouvernement de Pékin, lui-même objet d’une lutte incessante entre les seigneurs de guerre. Cette opération fut placée sous le signe de la coopération entre le Guomindang (Kouo-min-tang) et le parti communiste chinois. L’U. R. S. S., qui devait reconnaître en 1924 le gouvernement constitué à Canton par Sun Yat-sen, envoya en Chine à partir de 1921 des conseillers militaires, avec l’aide desquels le Guomindang (Kouo-min-tang) organisa rapidement une force militaire solide. En 1924 fut fondée l’Académie de Huangpu (usuellement Whampoa) commandée par Jiang Jieshi (Tsiang Kiai-che ou, usuellement, Tchang Kaï-chek*) [rentrant d’un séjour en U. R. S. S.], assisté de Zhou Enlai (Tcheou Ngen-lai) [futur Premier ministre]. Cette école fut une pépinière de cadres militaires et politiques, tant nationalistes que communistes. Presque inexistante en 1920, l’armée nationale du Guomindang (Kouo-min-tang) comptait 40 000 hommes en 1924 ; quand, en 1926, Jiang Jieshi (Tsiang Kiai-che) lança l’« expédition vers le Nord » contre les seigneurs de guerre, elle comptait 100 000 hommes, articulés en 8 armées à 3 divisions chacune. Ces forces étaient animées d’un idéal révolutionnaire entretenu par la présence de nombreux commissaires politiques mis en place par les conseillers militaires soviétiques.


1927-1935. Deuxième guerre révolutionnaire.
Armée nationale contre armée rouge

Dès 1926, les rapports entre les communistes et le Guomindang (Kouo-min-tang) avaient commencé à se détériorer ; la rupture définitive intervint le 1er août 1927, date du soulèvement de la garnison de Nanchang (Nan-tch’ang), fomenté par les généraux communistes He Long (Ho Long), commandant la XXe armée, Ye Ting (Ye T’ing), commandant la 24e division de la XIe armée, et Zhu De (Tchou Tö), chef du bureau provincial de la Sécurité publique. Cette mutinerie est considérée comme l’acte de naissance de l’armée rouge chinoise.

Après avoir occupé Nanchang (Nan-tch’ang) et y avoir formé un comité révolutionnaire, les insurgés durent évacuer la ville. Puis, en raison des échecs successifs de l’« insurrection de la moisson d’automne » (fomentée par Mao Zedong [Mao Tsö-tong]), de la Commune de Canton et de leur tentative d’établir une base révolutionnaire au Guangdong (Kouang-tong), les communistes regroupèrent au début de 1928 leurs forces au sud du Hunan (Hou-nan), dans les monts Jinggangshan (King-kang-chan), où Mao Zedong (Mao Tsö-tong) et Zhu De (Tchou Tö) établirent la première base communiste et formèrent la IVe armée rouge des ouvriers et paysans. C’est de cette époque que date l’organisation des forces communistes en armée régulière, de type ternaire (3 divisions de 5 200 hommes par armée, 3 régiments de 1 600 hommes, 3 bataillons de 500 hommes), et en forces locales, comprenant les gardes rouges et les jeunes avant-gardistes, avec, comme unité de base, la compagnie de 120 hommes ; c’est aussi à cette période que remonte l’organisation politique de l’armée, fondée sur la présence de départements politiques dans les états-majors et de commissaires politiques dans toutes les unités jusqu’à la compagnie. Responsables de la formation et du contrôle politique des militaires, ils dirigent aussi la propagande sur les populations et la mise en place de nouvelles administrations, chargées notamment de la réforme agraire. L’excellente discipline de l’armée rouge, le soutien que lui apportèrent les masses paysannes expliquent comment, malgré son infériorité numérique, elle put se maintenir pendant six ans en Chine centrale et résister victorieusement aux quatre premières campagnes d’extermination lancées contre elle par Jiang Jieshi (Tsiang Kiai-che) de 1930 à 1933. La cinquième, engagée en octobre 1933 avec plus de 300 000 hommes et 150 avions, obligea toutefois les forces communistes à se replier dans le nord du Shănxi (Chen-si) grâce à l’extraordinaire retraite connue sous le nom de « Longue Marche ».


1936-1945. Union nationale provisoire contre l’ennemi japonais

La Longue Marche dura un an. Des 100 000 hommes qui quittèrent le Jiangxi (Kiang-si) en octobre 1934, 20 000 à peine devaient atteindre le Shănxi (Chen-si), après avoir parcouru près de 10 000 km en combattant. Cependant, les forces communistes purent entreprendre leur réorganisation et leur renforcement à la faveur de l’arrêt, à la fin de l’année 1936, des opérations menées contre elles par les nationalistes. L’attitude menaçante du Japon, qui devait aboutir à la guerre durant l’été de 1937, allait en effet en s’affirmant et, notamment après l’incident de Xi’an (Si-ngan), favorisait dans le Guomindang (Kouo-min-tang) les partisans d’un rapprochement avec les communistes. Ceux-ci surent tirer le meilleur parti de l’occasion qui leur était ainsi donnée de créer à leur profit un climat d’union nationale. Au reste, leur alliance purement tactique avec le Guomindang n’empêcha pas la persistance de sérieuses tensions entre Yan’an (Yen-ngan), capitale communiste, et Chongqing (Tch’ong-k’ing), nouveau siège du gouvernement central, ainsi que de nombreux combats entre les deux armées. Bien qu’inférieures en nombre (malgré une croissance spectaculaire de leurs effectifs), les forces communistes étaient largement supérieures à leurs rivales par leur valeur morale et technique ainsi que par l’emprise qu’elles exerçaient sur les populations rurales. Aux termes de l’accord avec le Guomindang (Kouo-min-tang) conclu en juillet 1937 et publié en septembre, l’armée rouge était dissoute et devenait VIIIe armée de route (80 000 hommes), intégrée dans les forces nationales. En fait, elle mènera des actions de guérilla sur les arrières des Japonais et étendra l’organisation politique, militaire et administrative des communistes dans des zones de plus en plus vastes. Parties du Shănxi (Chen-si), les trois divisions de la VIIIe armée essaimeront vers le Hubei (Hou-pei), le Shandong (Chan-tong) et le Henan (Ho-nan), et, après la reconstitution, en 1938, de la IVe armée nouvelle (12 000 hommes) en Chine centrale, des bases communistes seront implantées de la vallée inférieure du Yangzi (Yang-tseu) au Guangdong (Kouang-tong), y compris dans l’île de Hainan.