Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Chine (suite)

L’école confucianiste

V. confucianisme.


L’école mohiste

En chinois : mo jia (mo-kia). Cette école eut pour fondateur Mozi (Mo-tseu), qui fut le principal philosophe après Confucius. Son nom de famille était Mo et son nom personnel Di (Ti). Sa vie est mal connue ; on pense en général qu’il était originaire de l’État de Song et qu’il vécut entre les années 479 et 381 av. J.-C. La source principale pour l’étude de sa pensée est le livre qui porte son nom — Mozi —, un recueil composé de cinquante-trois chapitres en partie rédigés par lui.

Mozi se déclara adversaire de Confucius. Tandis que Confucius, homme cultivé et raffiné, essaya de donner une justification philosophique à ce qu’il y avait d’excellent dans la tradition ancienne, Mozi, en prédicateur militant, attaque le fondement de cette tradition. Ses disciples venaient de la basse couche de la société et de la catégorie des gens appelés youxie (yeou-hie) [chevaliers errants].

Mozi était lui-même issu du peuple. On raconte que c’était un menuisier extrêmement ingénieux. Comme son contemporain Gongshu Ban (Kong-shou Pan), il construisait des oiseaux en bois qui pouvaient voler pendant trois jours. Il enseigna une philosophie qui reflétait bien l’idéologie de sa classe.

Selon Mozi, les maux de la société proviennent de l’égoïsme, que cet égoïsme soit centré sur l’individu ou la famille, ou même l’État. Selon le confucianisme, le degré de l’amour est proportionnel au degré de parenté, car cela est conforme au sentiment naturel de l’homme, qui aime ses propres parents plus que ceux des autres. Pour Mozi, cette discrimination engendre l’égocentrisme. L’amour doit embrasser tous les hommes sans distinction aucune. L’« amour universel » est le seul remède pour le monde déchiré par toutes sortes de conflits nés de notre égoïsme. Cet amour étant bénéfique pour tout le monde, il l’est donc pour chacun.

Mozi a donné encore une base théiste à sa doctrine : « Le ciel veut que les hommes s’aiment universellement et se fassent du bien les uns aux autres. » Il fait appel à un Dieu personnel de l’ancienne tradition — qui persistait probablement parmi le peuple — tout en lui prêtant une volonté précise : l’amour. Dans le confucianisme, par contre, l’idée de Dieu évolue vers une notion métaphysique.

Mais cet « amour universel » est-il praticable ? Oui, répond Mozi, puisque les rois sages de l’Antiquité, Yu le Grand, Tang (T’ang) des Shang (Chang), Wen et Wu (Wou) des Zhou (Tcheou) y sont parvenus. Mozi avait une prédilection pour Yu le Grand. Car, selon la tradition, c’est Yu qui sauva le peuple chinois du déluge — qui avait dévasté l’Empire pendant des décennies —, en lui apprenant à lutter contre les inondations. D’un courage à toute épreuve, entièrement dévoué à sa tâche, pendant treize ans il n’est pas rentré une seule fois chez lui. À son exemple, Mozi a mené une vie ascétique et laborieuse. Il ne se contente pas de prêcher sa doctrine, il passe sa vie à aider les pauvres, à nourrir les affamés et à lutter résolument contre la guerre en se portant au secours des États injustement attaqués. Avec ses disciples, il organise des groupes de militants consacrés à la réalisation de son idéal. Dans le livre Mozi, l’auteur raconte que, ayant appris que l’État de Chu (Tch’ou) se préparait à attaquer celui de Song, Mozi marcha dix jours et dix nuits jusqu’à Chu pour dissuader le roi de son intention belliqueuse. Craignant d’échouer dans sa mission, il avait placé trois cents de ses disciples, armés d’un matériel de défense de son invention, pour défendre la capitale de Song. Et, grâce à son intelligence et à son éloquence, la guerre n’a pas eu lieu.

Conformément à l’esprit de sacrifice qui l’anime, Mozi est contre la musique et la danse, qui ne sont, selon lui, qu’un luxe inutile de l’aristocratie. Il désapprouve de même les dépenses excessives des nobles à l’occasion de leurs cérémonies de mariage, de funérailles, et de tous les rites féodaux si chers à Confucius. L’école ne sous-estime pas le travail manuel comme le faisait le confucianisme.

L’École mohiste est, pendant la période des Royaumes combattants, rivale de l’école de Confucius. L’idéal égalitaire de Mozi, appuyé sur une organisation religieuse et militante, avait à cette époque un retentissement plus large que l’idéal aristocratique de l’honnête homme prôné par Confucius. Certains historiens l’ont considéré comme un socialisme avant la lettre ; d’autres l’ont comparé au christianisme.

Après la mort de Mozi, le même esprit et la même discipline furent maintenus sous la direction d’un Grand Maître élu par ses disciples. Après l’unification de Qin (Ts’in), le gouvernement impérial ne put tolérer une organisation de cette sorte : la classe des artisans fut intégrée dans la société féodale. À partir de ce moment, l’école de Mozi a disparu presque complètement. C’est seulement à la fin du xviiie s. que l’on a redécouvert la richesse et l’importance de sa doctrine, grâce aux travaux de Bi Juming (Pi Kiu-ming), de Sun Yirang (Souen Yi-jang) et d’autres.


L’école taoïste

V. taoïsme.


L’école des légistes

Si le confucianisme et le taoïsme ne négligent pas les problèmes politiques, il faut attendre cependant les légistes pour voir la naissance d’une véritable philosophie de la politique.

Au début des Zhou (Tcheou), deux codes réglaient la société : celui des rites qui ordonnaient les modes de vie de la noblesse et celui des lois communes et répressives qui contrôlaient l’existence de la classe paysanne.

À l’époque des « Printemps et Automnes », de grands changements sociaux s’étant produits, de nouvelles classes se forment : artisans, commerçants et grands propriétaires terriens. Ces nouvelles classes étaient riches, mais n’appartenaient pas à la noblesse. Elles avaient besoin de lois pour la protection de leurs biens. D’autre part, la lutte entre les royaumes devenant de plus en plus féroce, chaque royaume avait besoin d’un système de gouvernement centralisé. Des lois précises et écrites pour déterminer les droits et les devoirs de l’homme devinrent nécessaires.