Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Chine (suite)

Les sources de l’histoire de Chine

Textes historiques

Les Chinois ont eu très tôt le souci de consigner les événements par écrit. Dès la fin du IIe millénaire av. J.-C., sous la dynastie des Shang (Chang), il y avait à la Cour un fonctionnaire chargé de la responsabilité des archives. Néanmoins, les chroniques les plus anciennes qui ont subsisté jusqu’à nos jours se présentent comme des chronologies plutôt arides, où se trouvent notés des faits politiques (batailles, traités) ou religieux (sacrifices) et parfois des observations astronomiques (éclipses). À partir du iiie s. et surtout du iie, les sources écrites changent de nature ; on se trouve désormais en présence d’annales rédigées par des historiens de profession. Les empereurs s’intéressent personnellement à la rédaction de cette histoire et nomment des collèges de spécialistes chargés de rédiger ce qu’on a appelé les annales officielles. Au cours de chaque règne, les faits et gestes du souverain ainsi que tous les événements marquants (décrets nouveaux, arrivées d’ambassades étrangères) sont soigneusement notés au jour le jour ; ainsi se trouvent constitués les « récits véridiques », masse considérable de documents qui serviront en principe à la rédaction des annales proprement dites, rédaction qui ne sera entreprise que par la dynastie suivante. Nous disposons ainsi de vingt-quatre histoires officielles (er shi si shi [eul-che-sseu-che]), dont la première est constituée par les Mémoires historiques (Shiji [Che-ki]), rédigés par l’historien Sima Qian (Sseuma Ts’ien, v. 145-v. 86 av. J.-C.), à l’époque des Han antérieurs, et la dernière par l’Histoire des Ming (Mingshi [Ming-che]), rédigée sous la dernière dynastie, celle des Qing (Ts’ing).

À côté de ces histoires « officielles », on dispose, surtout à partir du xie s., d’un nombre toujours croissant d’« histoires parallèles », rédigées par des particuliers, mus uniquement par l’intérêt du passé. Ce sont le plus souvent des fonctionnaires lettrés, qui occupent ainsi les loisirs de la retraite ou de l’exil ; leurs œuvres sont moins systématiques et généralement plus critiques. Elles prennent parfois la forme de « monographies locales » (fang zhi [fang-tche]), sortes de traités limités aux frontières d’une province, qui nous permettent à présent d’amorcer une très utile histoire régionale.

À plusieurs reprises, les Chinois se sont interrogés sur les méthodes de l’histoire et sur le métier de l’historien. Parmi les théoriciens les plus célèbres, citons Sima Qian (iie s. av. J.-C.), déjà nommé, Sima Guang (Sseu-ma Kouang, xie s.), auteur d’un célèbre Miroir historique, Wang Fuzhi (Wang Fou-tche) et Gu Yanwu (Kou Yen-wou, xviie s.).

Le développement précoce de l’imprimerie a eu ici pour conséquence de reléguer au deuxième plan les sources manuscrites, dont seule une toute petite quantité a déjà été utilisée.

Sources archéologiques

L’archéologie chinoise possède une longue tradition ; sous les Song (960-1279), elle était devenue discipline académique et comportait l’étude des pierres, des métaux, des poteries, des sceaux et des architectures ; mais l’accent resta mis sur l’analyse des inscriptions. L’étude des vestiges préhistoriques ne fut abordée qu’au début du xxe s., par des Européens qui entreprirent les premières fouilles scientifiques. Interrompues dès 1937 par l’agression japonaise, celles-ci reprirent après l’avènement de la République populaire de Chine. À la suite des grands travaux effectués depuis 1950 sur tout le territoire chinois, les trouvailles archéologiques se sont multipliées à une telle cadence que leur exploitation ne suit qu’avec retard. On dispose à présent d’une très riche documentation archéologique, allant du Néolithique au xe s. apr. J.-C. Son étude permettra de mieux comprendre l’évolution de la civilisation chinoise et surtout ses origines. Les textes ne permettaient pas de faire commencer l’histoire de celle-ci avant la fin du IIIe millénaire.

Quelques dates de l’histoire de Chine jusqu’en 1911

500000 (?)

Sinanthrope

v. 5000-1800

Néolithique (cultures de Yangshao [Yang-chao], de Longshan [Long-chan] et de Xiaotun [Siao-t’ouen])

1766-1112

dynastie des Shang (Chang) ; début de l’âge du bronze

1111-770

dynastie des Zhou (Tcheou) [capitale près de l’actuelle Xi’an]

722-481

période dite « des Printemps et Automnes »

453-221

période dite « des Royaumes combattants » ; début de l’âge du fer

221-206

dynastie des Qin (Ts’in) ; fondation de l’Empire

206 av. J.-C. - 8 apr. J.-C.

dynastie des Han de l’Ouest (ou antérieurs)

9-23

usurpation de Wang Mang

23-220

dynastie des Han de l’Est (ou postérieurs)

220-280

période dite « des Trois Royaumes » (Wei, Wu [Wou] et Shu [Chou])

280-316

dynastie des Jin (Tsin) occidentaux

316-580

période dite « des dynasties du Nord et du Sud » (Nan bei chao [Nan-pei-tch’ao])

581-618

dynastie des Sui (Souei) ; réunification de l’Empire et creusement du Grand Canal

618-907

dynastie des Tang (T’ang)

907-960

période dite « des Cinq Dynasties »

960-1127

dynastie des Song du Nord

1127-1279

dynastie des Song du Sud

1279-1368

dynastie des Yuan (Mongols)

1368-1644

dynastie des Ming

1644-1911

dynastie des Qing (Ts’ing) [Mandchous]

1911

République


La Chine contemporaine


Introduction

L’étude de la Chine moderne (1840-1919) et contemporaine (après 1920) — selon la périodisation des manuels de la République populaire de Chine — a déterminé en France deux écoles d’historiens : la première, dite « scientifique », a cherché à détruire l’imagerie créée par la superposition de schémas académiques occidentaux sur des événements connus le plus souvent à travers les seules sources occidentales et à retrouver la réalité sociale et économique chinoise en fondant ses analyses sur les sources orientales actuellement disponibles ; la seconde, dite « idéologique », reste soumise aux multiples contradictions et falsifications qui attendent l’historien.

Le xxe s. chinois a été profondément marqué par l’intervention de forces sociales qui ont elles-mêmes cherché à écrire leur propre histoire et celle de la Chine : chronologiquement, les impérialistes occidentaux, la bourgeoisie chinoise, l’Internationale communiste, enfin la bureaucratie maoïste.