Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Chine (suite)

Le grand fleuve de la Chine septentrionale, le Huanghe, est un organisme unique au monde. Long d’environ 5 000 km, il a par contre un débit moyen faible (1 500 m3/s), encore affaibli en amont (Baotou [Pao-t’eou]) par l’irrigation. Ce débit est très irrégulier : les maigres d’hiver sont très prononcés ; le Huanghe débite seulement 140 m3/s à Shanxian (Chan-sien) en février, et, dans la plaine, il est facilement pris par les glaces (pendant 30 jours en moyenne). Il a une crue de printemps due à la fonte des neiges, assez faible d’ailleurs, le tapis de neige étant peu épais en Asie centrale. Par contre, il a une énorme crue d’été, due aux pluies, en août et en septembre : le débit atteint 28 000 m3/s à Shanxian ; cette crue aurait même atteint un maximum de 36 000 m3/s. Elle est peu prévisible, compte tenu de l’irrégularité générale des pluies ; elle est, en outre, très rapide (de 10 à 15 km/h). Le cours inférieur, de la gorge de Sanmen à la mer, sur 800 km, a été endigué. Malheureusement, le Huanghe est sans doute le fleuve le plus chargé du monde : après sa traversée, en un immense coude, des plateaux de lœss, il transporte 3,4 kg par mètre cube d’eau ; il alluvionne dans le fond de son lit, qu’il surélève ; de là les terribles dangers de déplacements du lit. En 4 000 ans, il a submergé ses digues 1 500 fois et a changé de lit 20 fois. De 602 à 1947, il a transporté à plusieurs reprises son lit du nord au sud de la presqu’île du Shandong sur 800 km. Chacun de ses déplacements s’est accompagné d’effroyables catastrophes.

Les autres fleuves de la Chine septentrionale ont des caractères assez semblables. La Huai (Houai) a également une très grosse charge, mais son débit est, relativement à sa taille, plus important (à peu près la moitié du débit du Huanghe) ; par contre, son embouchure a été bouchée par les alluvions du Huanghe, lorsque, de 1938 à 1947, celui-ci s’est jeté au sud du Shandong ; l’écoulement des eaux vers la mer est donc très difficile : jusqu’aux aménagements récents, le fleuve se jetait dans des lacs, notamment le Hongzehu (Hong-tsö-hou), ce qui provoquait de catastrophiques inondations. Le Haihe (Hai-ho), formé de la réunion de cinq rivières, et le Liaohe (Leao-ho) sont également des fleuves très irréguliers, à très fortes crues, à très forte charge, surélevés et donc très dangereux.

Quant à la Soungari, elle présente surtout le caractère d’être prise par les glaces pendant de longs mois en aval, au nord, ce qui fait que les eaux de fonte ne peuvent s’écouler ; les débâcles y sont redoutables.

J. D.


L’histoire jusqu’en 1911


Préhistoire

Le Paléolithique ancien est représenté en Chine du Nord par le Sinanthrope, dont les restes ont été trouvés en 1921 à Zhoukoudian (Tcheou-k’eou-tien), au sud-ouest de Pékin : on estime que ce dernier remonte à 500 000 ans environ. Il semble qu’il connaissait l’usage du feu et qu’il vivait de chasse et de cueillette. Depuis cette date, d’autres restes ont été trouvés au Shānxi (Chan-si) et plus récemment à Lantian (Lan-t’ien), au Shănxi (Chen-si). En Chine du Sud, divers sites ont été découverts au Guangxi (Kouang-si) en 1956.

Le Paléolithique moyen est représenté au Guangdong (Kouang-tong) par l’Homme de Mapa (Ma-p’a), dont on a retrouvé un fragment de crâne, au Shānxi par l’Homme de Dingcun (Ting-ts’ouen) et de la boucle du fleuve Jaune, où des fragments de crâne, d’os et d’outils ont été trouvés à plusieurs reprises.

Le Paléolithique supérieur, qui correspond à une période de grande sécheresse, est représenté par l’Homme de Shandingdong (Chan-ting-tong), dont des fragments d’os furent retrouvés en 1933 sur le site de Zhoukoudian. Des découvertes plus récentes ont été faites au Sichuan (Sseu-tch’ouan) et au Guangxi en 1956.

La période transitoire du Mésolithique, caractérisée par l’apparition de microlites, a été repérée dès 1928 en Mongolie-Intérieure, puis en Mandchourie, au Sichuan et enfin au Guangxi.

Les cultures néolithiques se sont d’abord développées dans les vallées boisées de la Chine du Nord et dans le bassin du fleuve Jaune (région de lœss). Peu à peu, elles se sont étendues vers l’est, en direction de l’actuel Hebei (Ho-pei), puis vers l’ouest, dans l’actuel Gansu (Kan-sou). Les avis sont encore partagés sur l’époque à laquelle sont apparus les premiers usages de la pierre polie et les débuts de l’agriculture (Xe, Ve millénaire ?). Trois cultures caractérisées par des techniques agricoles différentes se sont succédé et, dans certains cas, ont coexisté. On a pris l’habitude de les distinguer aussi par la couleur des poteries qui s’y trouvent attestées : poterie rouge de la culture de Yang-shao (Yang-chao), site du Henan (Honan) ; poterie noire de celle de Longshan (Long-chan), site du Shan-dong (Chan-tong) ; poterie grise de celle de Xiaotun (Siao-t’ouen), site du Henan.

La culture de Yangshao se caractérise par une agriculture itinérante sur brûlis. Les sites, de petites dimensions, semblent avoir été occupés de façon temporaire et, dans certains cas, à plusieurs reprises. Le village de Banpocun (Pan-p’o-ts’ouen), situé près de Xi’an (Si-ngan), la capitale du Shănxi, a été entièrement exhumé entre 1953 et 1955. Il est situé sur une terrasse en lœss et a une forme circulaire ; les habitations sont constituées tantôt par des fosses rondes ou ovales creusées dans le sol, avec un foyer central, tantôt par des huttes construites en surface sur un plan rectangulaire ou circulaire. On a retrouvé également des greniers, des fours à poterie et un cimetière. L’outillage se composait de houes, de bêches et de haches, utilisées pour les défrichements. On cultivait notamment le millet, le kao-liang (sorgho) et le chanvre ; le ver à soie était déjà connu, et le porc et le chien étaient élevés en grand nombre. Les poteries, faites avec de l’argile de couleur ocre, étaient décorées de dessins géométriques.

La culture de Longshan paraît avoir été le prolongement de la précédente. Elle fut d’abord identifiée au Shan-dong ; par la suite, d’autres sites furent découverts au Henan, dans le sud du Hebei et le nord du Jiangsu (Kiang-sou) ; on pense même pouvoir y rattacher certains sites découverts plus au nord, dans le Liaodong (Leao-tong), et plus à l’est, dans le Gansu. La culture de Longshan se distingue essentiellement de celle de Yangshao par le caractère plus durable des établissements humains, c’est-à-dire par une amélioration des techniques agricoles, bien que la chasse et la pêche jouent encore un rôle important. Les villages, de plus vastes dimensions, sont entourés de murs en terre battue (hauts d’environ 6 m et larges de 9 à 14 m) qui annoncent les murailles des cités postérieures des Shang (Chang) et des Zhou (Tcheou). On note aussi l’apparition de la divination au moyen d’omoplates d’animaux que l’on soumettait au feu. La céramique n’est plus peinte ; elle est désormais faite au tour avec un mélange d’argile, de sable et de colorant noir.