Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Chine (suite)

Entre les Nanling et les Qinling règne le climat le plus original, un climat « tempéré » à hiver froid et perturbé, à été tropical. Shanghai (à la latitude de Port-Saïd) voit se succéder en hiver des jours très froids et secs et des jours tièdes et humides avec alternance de vents du nord-ouest et de vents du sud-ouest : les sautes de températures sont extrêmement fortes, et l’hiver n’est pas réellement sec, pas plus que les saisons intermédiaires. Par ailleurs, s’il pleut de mai à octobre, avec passage d’assez nombreux typhons, la vraie période pluvieuse s’étend du 10 juin au 10 juillet : c’est le Huangmei (Houang-mei), la « saison des prunes ». À l’abri de ses montagnes bordières et notamment des Qinling, le Bassin rouge du Sichuan a un hiver doux (8,2 °C à Chongqing en janvier), d’une part, et des pluies annuelles peu abondantes, d’autre part (942 mm à Chengdu), en dépit d’une très forte nébulosité ; l’hiver est sec, et, en été, les pluies sont moins abondantes qu’ailleurs en Chine méridionale (moins de 100 mm de pluies à Chongqing en août).

Au nord des Qinling, la Chine septentrionale présente des climats nettement plus secs, où, en plaine, les pluies sont toujours très inférieures à 1 000 mm. Par ailleurs, ce sont des climats « continentaux » à très forts contrastes thermiques. Pékin, à la latitude de Lisbonne, a un hiver très froid et très sec, à journées lumineuses sur faible couche de neige ; l’été est court, mais tropical ; les pluies (500 mm en cinq mois sur un total de 590 mm) sont très irrégulières. Les tendances arides s’accentuent vers le nord-ouest. Le Nord-Est connaît un hiver très long et très froid, un été très court, mais chaud et généralement bien arrosé : il reçoit plus de pluies que le Nord.

L’été tropical qui règne sur toute la Chine orientale est dû à la mousson (v. Asie de la mousson). Celle-ci n’est autre que l’alizé austral attiré par les basses pressions d’origine thermique qui règnent sur l’Asie centrale. La mousson apporte ainsi jusque sur l’Amour des masses d’air équatoriales chaudes et humides. Les pluies au sud des Nanling sont dues essentiellement à des mécanismes tropicaux, notamment à la thermoconvection, ou encore aux typhons. Par contre, plus au nord, le rôle des dépressions cycloniques « tempérées » est très important : celles-ci fourniraient 35 p. 100 des précipitations à Nankin et provoquent en juillet et en août des pluies normalement plus importantes sur Pékin que sur Shanghai. La « pluie des prunes », période de plus forte pluviosité dans les plaines du Yangzijiang, est sans doute due au passage particulièrement fréquent de dépressions cycloniques le long de cette voie (dépressions qui, en juillet, passent plus au nord, sur Pékin), en relation avec la présence, en altitude et plus au nord, du jet-stream, et cela dans la masse d’air de la mousson.

La mousson est un vent du secteur sud. Mais, en hiver, la Chine est sous la domination d’un vent du secteur nord, la « mousson d’hiver ». Celle-ci est la conséquence des très hautes pressions dues au froid qui règne sur la Sibérie orientale. La mousson issue de cet anticyclone d’air polaire est un vent anticyclonique jusque vers 40° N. et amène des temps calmes sur la Chine septentrionale. Plus au sud, elle peut prendre une courbure cyclonique et provoquer une cyclogenèse (à cette époque, le jet-stream circule vers 25° N. et crée sur sa gauche une zone de basse pression où s’installe le « front polaire ») ; les dépressions entraînent l’alternance de vents très froids et très secs et de vents tièdes et humides. Enfin, les coulées extrêmes de la mousson atteignent en février et en mars la Chine au sud des Nanling, provoquant les pluies cycloniques du crachin.

La chaîne des Qinling, limite morphologique et climatique, est aussi une limite biogéographique. Au sud régnait avant l’action des hommes une forêt pénétropicale, où s’interpénétraient espèces tropicales et espèces tempérées : camphriers, lauriers, schema, élæocarpus, castanopsis, eurya pour les premières, chênes verts et conifères pour les secondes. De là l’exceptionnelle richesse floristique de cette forêt, où l’on a compté 2 000 espèces différentes. Parfois encore très denses (par exemple, au Fujian [Fou-kien]), ces forêts ont été le plus souvent détruites par l’homme. Un gros effort de reboisement est aujourd’hui en cours. Au nord des Qinling, la forêt était de type tempéré ; elle a aujourd’hui en grande partie disparu. Des forêts « boréales » à mélèzes et à bouleaux couvrent dans le Nord-Est les Changbaishan (Tch’ang-pai-chan).


L’hydrographie

Les fleuves de la Chine méridionale sont puissants. Les petits fleuves du Fujian et du Zhejiang (Tchö-kiang), le Min, le Zhe (Tchö) et ses affluents, ont un fort débit. Le Xijiang (Si-kiang), long de 2 100 km, a un débit moyen de 8 700 m3/s ; mais, en période de crue, ce débit peut atteindre le chiffre énorme de 59 000 m3/s : le fleuve monte de 26 m en été à Wuzhou (Wou-tcheou) ; il monte encore de 10 m à la tête du delta et, bien entendu, il a dû être endigué. Fort heureusement, c’est un fleuve assez peu chargé en alluvions (0,400 kg par mètre cube d’eau). Le Yangzijiang est un des plus grands fleuves du monde : plus de 5 000 km de long, pour un bassin de près de 2 millions de kilomètres carrés ; son débit moyen est de 14 000 m3/s à Yichang (Yi-tch’ang), de 30 000 m3/s en aval de Datong (Ta-t’ong). En dépit de sa longueur, son régime, du fait d’une alimentation pluviale, reste à peu près le même, très simple, avec des basses eaux d’hiver et des hautes eaux d’été ; l’amplitude de la crue est, toutefois, atténuée en aval, conséquence, en particulier, du rôle régulateur (relatif) des lacs Dongting et Poyang. Les crues sont régulières et prévisibles. Rapides dans le Sichuan, où le fleuve reçoit de très gros affluents (Min, Lu, Jialing [Kia-ling]) et où les eaux montent parfois de 8 m en vingt-quatre heures (les hautes eaux sont à plus de 20 m au-dessus de l’étiage), elles sont plus lentes après les vingt-cinq rapides qui séparent Chongqing d’Yichang, mais elles sont énormes : elles ont atteint 75 000 m3/s à Wuhan entre juillet et septembre 1931, 93 000 m3/s à Datong en 1954. La capacité du lit étant de l’ordre de 45 000 m3/s en dépit du fait qu’il est fortement incisé, toute grande crue provoque une inondation. Le danger est le plus grand en aval de Jiujiang (Kieou-kiang), parce que les défilés entre ce point et Nankin ralentissent le flot et parce que les eaux du lac Poyang, gonflé, jouent un rôle de bouchon ; il en résulte que c’est la cuvette du Hubei, où, de surcroît, existe une remarquable convergence fluviale (le Xiang [Siang] et surtout le Han rejoignent le Yangzi), qui connaît les plus graves inondations ; celle de 1931 fit 185 000 morts. Le Yangzijiang est moyennement chargé (0,800 kg par mètre cube d’eau à Wuhan) ; une partie de ses alluvions provoque l’accroissement de l’île de Chongming (Tch’ong-ming), dans l’estuaire, qui, émergée dans les premiers siècles de notre ère, a aujourd’hui 715 km2.