Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Chadwick (sir James) (suite)

Lorsqu’il est informé du phénomène de fission nucléaire, il attire en 1940 l’attention des autorités britanniques sur la possibilité de réaliser un explosif de très grande puissance. Il est alors appelé à diriger à Liverpool, où il occupe une chaire depuis 1935, un groupe de chercheurs attelés au problème de la réaction en chaîne. Puis il va diriger la délégation britannique à Los Alamos.

De 1948 à sa retraite, Chadwick assure la direction du Gonville and Caius College de Cambridge.

R. T.

Chagall (Marc)

Peintre français d’origine russe (Vitebsk 1887).


Né dans une famille juive modeste et profondément religieuse, il s’imprègne de certains de ses futurs thèmes bien avant de concevoir sa vocation de peintre, qui le fera partir, en 1907, pour Saint-Pétersbourg. Il y reçoit, notamment, les leçons de Léon Bakst, avant d’obtenir une bourse qui lui permet, en 1910, de venir travailler à Paris. Il habite la Ruche, s’y lie d’amitié avec Modigliani* et Soutine*, fréquente Delaunay* qui attire sur eux l’attention de Guillaume Apollinaire. Celui-ci, à son tour, les fait connaître à Blaise Cendrars, Ricciotto Canudo, Max Jacob, partisans comme lui d’un art raisonné afin d’être sans précédent. Un peu paradoxalement, ils admirent Chagall de se montrer indifférent à toute théorie et de s’exprimer, sur des thèmes folkloriques et judaïques, dans un style spontané qui rappelle celui des imagiers populaires. Ce parti, auquel il se tiendra durant toute sa carrière, va lui permettre de matérialiser en toute liberté les fantasmes de sa féconde et souvent étrange imagination poétique.

Le monde visible n’est à ses yeux qu’un répertoire de formes et de couleurs, dans lequel il puise les éléments de ses compositions éminemment irrationnelles. Les êtres et les choses, délivrés des lois de la pesanteur, flottent dans l’espace, au gré de la fantaisie de l’artiste qui ne respecte ni les données de l’anatomie ni celles de la logique quotidienne ; la tête d’un personnage quitte ses épaules ; le passant, dans le paysage, tient plus de place que les arbres et les maisons ; l’âne joue du violon ; en cas de besoin, cet instrument sera pourvu d’ailes, de même que la pendule ; on marche sur les toits ; le cheval est bleu, ou rouge... Tout est subordonné, dans le tableau, à la production d’un effet à la fois mystérieux et concrétisé dans le domaine sensible par la grâce du coloris, cette « chimie » de la couleur dont parle l’artiste.

En 1914, Marc Chagall retourne dans son pays, via Berlin, où il expose à la galerie Der Sturm ; en 1918, il est nommé, à Vitebsk, commissaire du peuple aux Beaux-Arts ; il participe avec grand succès, en 1919, à la « Première Exposition officielle d’art révolutionnaire » à Petrograd, puis exécute des peintures murales pour le Théâtre juif de Moscou.

En 1921, toutefois, la situation de Chagall se trouve compromise par la progression des suprématistes (v. Malevitch) dans les commissions officielles. Il entreprend d’écrire son autobiographie (Ma vie) et, en 1922, s’expatrie de nouveau, faisant escale à Berlin avant de rejoindre Paris en 1923.

Ambroise Vollard lui commande alors une série d’eaux-fortes pour l’illustration des Ames mortes de Gogol ; la galerie Barbazanges-Hodebert présente en 1924 une exposition récapitulative de l’œuvre peint de Chagall ; en 1927, nouvelle commande, par Ambroise Vollard, d’eaux-fortes pour illustrer les Fables de La Fontaine ; en 1931, publication, aux éditions Stock, de Ma vie (dont les gravures, seules, avaient paru en 1923 à Berlin) ; la même année, Chagall voyage en Égypte, en Syrie, en Palestine et entreprend au retour, pour Ambroise Vollard, l’illustration de la Bible. En 1933, la Kunsthalle de Bâle lui consacre une grande exposition rétrospective. Dans la préface du catalogue, Jean Cassou écrit notamment :

« Pour l’esprit religieux de Chagall, toutes choses, dans l’univers, sont reliées les unes aux autres, tout s’y tient. C’est là l’enseignement de Spinoza comme de la Kabbale, et il est dit dans le Zohar que dès qu’un homme et une femme sont ensemble les cieux se réjouissent. Car de cette active solidarité universelle le moteur est l’amour... Ainsi le grand poète Chagall est-il un des grands peintres de notre temps, de tous les temps, d’en dehors des temps. Sa fantaisie est fondée. Elle est le fruit chatoyant et aérien de ce regard universel qui est communion avec l’univers et oraison. Fleurs, oiseaux, poissons, ânes, violons, ciels nocturnes, souvenirs d’enfance, contes d’enfance, légende personnelle, douleurs, pitiés, effusions, tout contribue à cette immense représentation d’un univers au cœur duquel s’épanouit la rose philosophale. »

Chagall voyage en Hollande, en Espagne, en Pologne. Le thème de la crucifixion apparaît dans son œuvre comme un symbole des nouvelles souffrances qui s’abattent sur l’Europe. Il reçoit en 1939 le prix Carnegie et part en 1941 pour les États-Unis, invité par le Museum of Modern Art de New York (qui organisera en 1946 une rétrospective de son œuvre). Il voyage au Mexique et réalise des décors et costumes de ballets. En 1944, la mort de sa femme, Bella, est pour lui une grave épreuve.

L’artiste est de retour à Paris en 1947. Il reçoit l’hommage d’une exposition au musée national d’Art moderne, suivie en 1948 de celles du Stedelijk Museum d’Amsterdam et de la Tate Gallery de Londres. En 1950, il se fixe à Vence et exécute ses premières céramiques.

En 1955, Chagall commence la suite des grandes peintures du Message biblique, dont il fera donation à l’État français en 1966 et qui prendront place en 1973 dans un musée-mémorial construit à Nice. Il voyage en Israël (1951, 1957, 1962, 1969). En 1958, il donne les premières maquettes d’une importante série de vitraux pour la cathédrale de Metz. Son adaptation à cette technique de lumière est particulièrement remarquable ; il créera encore les douze vitraux pour la synagogue du Centre médical de l’Hadassah, près de Jérusalem (1960-61), ceux de l’église de Pocantico Hill, dans l’État de New York (1964 et 1966), d’autres encore pour l’église Fraumünster de Zurich (1969-70) et pour la cathédrale de Reims (1974). Lui sont encore commandés un nouveau plafond pour l’Opéra de Paris (1963-64), deux décors muraux pour celui du Lincoln Center à New York (1965), une mosaïque, des tapisseries et des panneaux muraux pour le nouveau Parlement de Jérusalem (1966-1969).