Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

catholicisme (suite)

Les sacrements

On a vu que le pouvoir d’ordre donné à l’Église impliquait essentiellement la fonction sacerdotale, c’est-à-dire la sanctification des hommes par le canal des sacrements. L’union au corps mystique du Christ s’établit ordinairement grâce à eux, qui permettent et augmentent l’identification des chrétiens au Christ en les unissant plus complètement à son Église, complément et achèvement sur terre de son œuvre de salut.

Il faut d’abord considérer les sacrements en eux-mêmes. Leur but est essentiellement de nous renouveler à l’image de Dieu ; c’est la raison profonde, on le sait, de l’Incarnation, qui restaure l’homme déchu par la faute originelle et le rend de nouveau capable de la grâce. Les sacrements ont pour fin d’appliquer immédiatement aux hommes les effets de l’Incarnation. L’Incarnation donne le salut au moyen de la nature divine et humaine du Christ, c’est-à-dire d’une âme et d’un corps, et également les sacrements confèrent une grâce spirituelle par l’intermédiaire de signes sensibles (gestes, paroles, matière), qui la communiquent.

Les sacrements ne sont que des manifestations particulières du sacrement unique qui est l’humanité du Verbe prolongée dans son Église. Les sacrements sont d’abord à l’origine des actions du Christ : « Les choses surprenantes et merveilleuses, dit saint Augustin, que fit Notre Seigneur Jésus-Christ sont à la fois œuvres et paroles : œuvres parce que ce sont des actes, paroles parce que ce sont des signes. » Les sacrements, actions sensibles de l’Église considérée comme continuatrice du Christ, sont donc des actions de son chef qui donnent réellement, par le seul fait qu’ils sont accomplis, la vie divine, la grâce sanctifiante. Ils sont efficaces par eux-mêmes, ex opere operato selon les théologiens, et non par la foi seule.

Un sacrement se compose d’un signe sensible, appelé la matière du sacrement (l’eau du baptême), et de la formule qui le complète, qu’on appelle la forme (« je te baptise au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit »). Un sacrement produit son effet du seul fait qu’il est accompli, c’est-à-dire du moment qu’il est exactement pratiqué, et indépendamment de celui qui l’administre ou de celui qui le reçoit. Ainsi un prêtre en état de péché mortel qui baptise ou célèbre la messe baptise et consacre validement.

C’est le concile de Trente qui affirma avec force cette vérité contre les protestants. Cependant, il ne faut pas oublier que, pour bénéficier de toute l’efficacité que comportent les sacrements, il faut les recevoir avec de bonnes dispositions intérieures, comme l’enseignait Pie XII dans l’encyclique Mediator Dei : « Il est vrai que les sacrements ont une valeur intrinsèque en tant qu’ils sont les actions du Christ lui-même ; c’est Lui qui communique la grâce divine de chef et la diffuse dans les membres du corps mystique ; mais pour avoir l’efficacité requise, il est absolument nécessaire que les âmes soient bien disposées. »


Le culte extérieur

À côté des sacrements, l’Église, pour l’édification et la sanctification des fidèles, puise dans d’autres éléments sensibles, qui sont en même temps paroles, attitudes et gestes du corps, que l’on nomme rites sacrés. Le culte extérieur complète l’intérieur, l’homme étant à la fois corps et âme, matière et esprit.

C’est pour rendre un hommage de la totalité de notre être, une adoration complète, que le corps est joint à l’âme dans toutes les manifestations du culte extérieur (prières, cérémonies, pèlerinages, etc.).

Aux époques anciennes de l’Église primitive, puis du Moyen Âge, le corps était plus fréquemment associé à l’âme dans les exercices de piété ; selon le P. A. Sertillanges, « les premiers chrétiens, pénétrés plus que nous par des pensées et des émotions religieuses à l’état naissant, priaient plus que nous aussi à voix haute, chantaient et pratiquaient l’attitude expressive. Ce qu’ils affectionnaient, sous ce dernier rapport, nous pouvons le voir aux catacombes, où l’on trouve si souvent répétée la figure de l’orante, debout, tête droite, les yeux levés, les mains étendues en croix ».

Il n’est pas douteux que ces gestes, ces attitudes provoquent le sentiment religieux, ou tout au moins inclinent l’esprit à la piété. C’est ce qu’a bien exprimé saint Thomas d’Aquin : « Les hommes accomplissent certaines démarches sensibles, non pour éveiller Dieu, mais pour s’entraîner eux-mêmes vers la divinité. Ainsi des prostrations, des génuflexions, des acclamations vocales et des chants ; ils ne sont pas institués comme si Dieu en avait besoin, lui qui connaît tout, et dont la volonté est immuable, et qui ne reçoit pas pour lui le mouvement de notre esprit, moins encore les mouvements de notre corps ; mais tout cela est fait pour nous, afin que, par ces actes sensibles, notre intention soit dirigée vers Dieu et notre sensibilité enflammée. »

L’Église catholique a toujours tenu à la grandeur et à la beauté des cérémonies liturgiques, par lesquelles elle exprime collectivement, ce qui fait aussi de la liturgie une « communion », son culte visible envers Dieu. Mais elle est aussi enseignement, une catéchèse.


Le baptême et la confirmation

Le nombre des sacrements ne s’est pas trouvé défini d’emblée, ni non plus le mode de leur administration. C’est un évêque de Paris, Pierre Lombard († 1160), qui en a fixé le nombre exact, sept : baptême, confirmation, pénitence, eucharistie, ordre, mariage, extrême-onction. Hugues de Saint-Victor († 1141) n’en mentionnait que trois : baptême, confirmation et eucharistie. Mais, dès les premiers temps de l’Église, on discerne déjà la plupart de ces sacrements, dont la Tradition a ensuite déterminé plus rigoureusement la liste et la façon de les conférer.

• Le baptême est le premier des sacrements, puisqu’il permet à celui qui le reçoit d’échapper aux conséquences du péché originel et qu’il l’introduit dans l’Église, c’est-à-dire qu’il le fait bénéficier de la vie de la grâce qui lui est accordée comme membre du corps mystique. Selon les paroles du Christ : « Nul ne peut entrer dans le royaume de Dieu s’il ne naît de l’eau et de l’Esprit. » Le baptême imprime dans l’âme de celui qui le reçoit une empreinte ineffaçable ; ou mieux, un caractère indélébile, quelles que soient les dispositions du baptisé, sous réserve toutefois, s’il est adulte, qu’il ait la foi.