Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

cardiologie

Étude de l’anatomie, de la physiologie et des affections du cœur.


Très tôt dans l’histoire, comme le relèvent certains papyrus égyptiens, on accorde une grande importance à la palpation du pouls, sans connaître cependant le mécanisme de la circulation sanguine. Galien (iie s. apr. J.-C.) attache lui aussi un rôle capital au pouls, « signe du comportement de la faculté vitale dans le cœur ».

Il faut attendre quinze siècles pour que l’Anglais William Harvey (1578-1657) décrive exactement la circulation* du sang en établissant la notion de courant sanguin (« j’affirme seul que le sang suit une direction nouvelle et revient sur lui-même ») et d’autre part la notion de systole (contraction) des oreillettes et des ventricules du cœur. En 1661, Marcello Malpighi (v. rein) continue l’étude de la circulation en utilisant le premier le microscope pour décrire les capillaires sanguins. Ainsi le xviie s., avec la découverte capitale de Harvey, marque le point de départ des recherches qui vont aboutir à la constitution d’une discipline médicale sur le cœur et les vaisseaux.

Au xviiie s., la cardiologie s’enrichit des travaux des Italiens Giambattista Morgagni (1682-1771) et Antonio Maria Valsalva (1666-1723) sur l’anatomie du cœur, et de ceux du Français Jean-Baptiste Sénac, qui écrit le premier véritable traité de cardiologie digne de ce nom. L’école anglaise s’illustre avec William Heberden, qui donne une description magistrale de l’angine de poitrine et établit les rapports de cette affection avec l’atteinte des artères coronaires. William Withering, médecin et botaniste anglais (1741-1799), découvre une drogue miracle douée de propriétés à visée cardiaque : la feuille de digitale* pourprée. Les principes actifs de cette plante sont aujourd’hui encore très utilisés grâce aux travaux du pharmacien Claude Nativelle (1812-1889), qui a isolé le plus important d’entre eux, la digitaline.

Au xixe s., Laennec*, en créant l’auscultation* et en inventant le stéthoscope, fournit à la cardiologie l’instrument fondamental qui permettra de vulgariser l’étude des bruits du cœur. Jean Corvisart (1755-1821) insiste sur l’importance de la palpation et de la percussion cardiaque ; Jean Bouillaud (1796-1881) et Pierre Carl Édouard Potain (1825-1901) entrevoient les perspectives offertes par l’apport de l’auscultation.

Toujours au xixe s., deux grands physiologistes, Auguste Chauveau et Étienne Jules Marey, inaugurent l’exploration intérieure du cœur (cathétérisme cardiaque). En 1861, ils présentent devant l’Académie des sciences les premiers enregistrements sur papier (méthode graphique) des pressions cardiaques du cheval, grâce à une sonde exploratrice introduite à partir des vaisseaux du cou. À la fin du siècle, on assiste à un développement de techniques instrumentales chez l’Homme. Tout d’abord, Henri Vaquez (1860-1936) met au point le sphygmomanomètre pour déterminer les chiffres de la tension artérielle ; cet appareil est complété par l’oscillomètre de Michel Pachon (1867-1938), pour étudier les oscillations artérielles.

La découverte des rayons X par Röntgen* élargit le champ des connaissances médicales, notamment en cardiologie. Avec l’électrocardiogramme* (ECG), la cardiologie franchit une grande étape ; mise au point par Willem Einthoven (1860-1927) en 1903, cette méthode permet de diagnostiquer de façon précise certaines maladies, dont l’infarctus myocardique.

Dans les années 1930, la phonocardiographie devient une méthode courante d’enregistrement des bruits et des souffles cardiaques. Cette technique facilite l’analyse des résultats fournis par l’auscultation ; la confrontation de l’auscultation et des résultats de l’ECG est remarquablement faite par l’école de Charles Laubry. L’exploration intérieure du cœur, effectuée chez le Cheval au siècle précédent, est entreprise chez l’Homme par Werner Forssmann (né en 1904). En 1929, il expérimente sur lui-même cette méthode en introduisant une sonde dans l’oreillette après section d’une veine du bras. En 1941, André Cournand consacre définitivement le cathétérisme comme technique d’exploration clinique.

L’angiographie (opacification des vaisseaux aux rayons X) et l’angiocardiographie (opacification des vaisseaux et du cœur) prennent un essor considérable avec les travaux d’Egas Moniz. Ces méthodes, le plus souvent complémentaires du cathétérisme, sont d’une grande utilité dans le diagnostic et le traitement de certaines cardiopathies, tant congénitales qu’acquises.

Le cœur est, depuis un quart de siècle, accessible à la chirurgie. En 1944, Alfred Blalock, orienté par les travaux de Helen B. Taussig, bouleverse l’évolution de la principale des maladies bleues (la tétralogie de Fallot) en réalisant une union entre l’artère sous-clavière et l’artère pulmonaire. En 1948, l’Anglais Charles Philamore Bailey (né en 1910) effectue la première dilatation d’un rétrécissement de la valvule mitrale. Citons encore les noms de l’Américain Robert E. Gross (né en 1905) et du Suédois Clarence Crafoord (né en 1899).

L’hypothermie provoquée et surtout la circulation extracorporelle (appareil cœur-poumon) permettent l’abord direct des cavités cardiaques (chirurgie à cœur ouvert). Les Américains Clarence Walton Lillehei (né en 1918) et Denton Arthur Cooley (né en 1920) sont les véritables pionniers de cette chirurgie.

En France, Alexis Carrel (1873-1944) et René Leriche (1879-1955) s’illustrent dans le traitement chirurgical des maladies vasculaires en ouvrant la voie aux transplantations d’organes. C’est ainsi que, en 1951, Charles Dubost (né en 1914) résèque pour la première fois un anévrisme de l’aorte abdominale et le remplace par une homogreffe.

En décembre 1967, Christiaan Barnard, chirurgien sud-africain né en 1922, ose pour la première fois la transplantation du cœur* humain.

Par ailleurs, depuis une vingtaine d’années, quelques graves maladies cardiaques ont vu leur pronostic transformé par l’électrothérapie, dont une des modalités est représentée par le stimulateur intracardiaque, dénommé aussi pile cardiaque ou pacemaker.

J.-L. S.

 V. cœur.