Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Cárdenas (Lázaro)

Homme d’État mexicain (Jiquilpan, Michoacán, 1895 - Mexico 1970).


Métis d’Indiens Zapotèques, il naît dans une très pauvre famille du Michoacán. Dès l’âge de quinze ans, il lie son destin à la lutte révolutionnaire. Compagnon d’armes d’Álvaro Obregón et de Plutarco Elías Calles, il est promu au grade de général et participe aux combats que mène l’idéaliste Madero contre Porfirio Díaz. Gouverneur du Michoacán en 1928, ministre de l’Intérieur en 1931, puis de la Guerre en 1933, il doit à la protection de Calles d’être élu président de la République mexicaine en 1934.

Aussitôt installé, Cárdenas, qui s’appuie sur la Confédération du travail, s’attelle à une vaste réforme sociale. Il présente un plan sexennal comportant la distribution accélérée de la terre aux paysans et le perfectionnement des méthodes d’assistance et de crédit. En six ans, 16 millions d’hectares — qui appartenaient en majorité au clergé et aux grands propriétaires — sont distribués à plus de 800 000 petits paysans. Parallèlement, le président encourage le remembrement et la modernisation des communautés agricoles indiennes (ejidos). Il nationalise les chemins de fer (1937) et surtout le pétrole en expropriant les compagnies étrangères (1938) ; cette dernière mesure, qui porte au sommet la popularité de « Tata Cárdenas », lui vaut l’inimitié et lui attire les sanctions des États-Unis.

Cárdenas met fin à la longue et violente politique anticléricale qui s’était développée parallèlement à la révolution mexicaine : mesure apparemment paradoxale, mais qui rejoint les positions libérales du président, qui, adversaire de Hitler et de Mussolini, ouvrit le Mexique aux Espagnols républicains (1936-1939).

Ayant quitté la présidence en 1940, il devient ministre de la Défense nationale (1942-1945), puis commandant en chef de l’armée mexicaine. Membre (1950) et vice-président (1958) du Mouvement mondial de la paix, prix Staline de la paix (1955), il accepte, en 1966, de faire partie du « tribunal Russel » contre les crimes de guerre. Jusqu’à sa mort, il reste le conseiller et « la conscience de gauche » du vieux parti révolutionnaire institutionnel (P. R. I.), fondé autrefois par Calles.

P. P.

➙ Mexique.

cardinal

Dans l’Église catholique, chacun des prélats formant le Sacré Collège, électeur du pape et son plus proche collaborateur.



Le nom

Le terme de cardinal est d’abord un titre porté à la cour impériale par certains officiers au ve s. Il est employé par la suite pour désigner certains clercs desservant des églises importantes. Au Moyen Âge, on trouvera des prêtres dits « cardinaux » dans les divers pays chrétiens : en France, les curés des églises principales de Paris, Lyon, Angers, etc. Le nom de rue des Cardinaux, que l’on rencontre encore dans plusieurs villes françaises, témoigne de cette ancienne tradition.

Mais ce titre tend à devenir progressivement le privilège de certains membres du clergé de Rome, collaborateurs plus ou moins directs du pape. En 1567, Pie V (pape de 1566 à 1572) en réserve l’exclusivité aux dignitaires romains.


L’histoire

Dans les premiers temps de l’Église, le pape, comme les autres évêques, était assisté d’un groupe de prêtres qui l’aidaient dans son ministère pastoral et dans l’administration de son diocèse de Rome. À partir du viie s., ces auxiliaires sont fréquemment nommés prêtres-cardinaux. À ces prêtres furent adjoints des diacres*, qui remplissaient certaines fonctions, surtout d’ordre administratif ou social. Pour les distinguer des diacres des églises de banlieue, on les appela diacres-cardinaux. Et, déjà avant le ve s., les sept évêques des diocèses « suburbicaires », c’est-à-dire limitrophes de Rome, sont amenés à assister le pontife romain, non pas dans l’administration de son propre diocèse, mais pour le seconder dans son rôle de primat universel ou régional. Peu à peu, ils constituent le conseil du pape : ce sont les évêques-cardinaux.

Telle est l’origine du Sacré Collège et des trois ordres cardinalices : cardinal-diacre, cardinal-prêtre, cardinal-évêque. Cette division ne signifie pas que les cardinaux soient évêques, prêtres ou diacres (en fait, selon la discipline actuelle, ils sont tous évêques). Elle est une survivance des anciens districts ecclésiastiques de Rome.

En 1059, Nicolas II (pape de 1059 à 1061), pour garantir l’Église des empiétements de l’empereur d’Allemagne comme aussi des coteries romaines, confère aux cardinaux un rôle prépondérant dans l’élection du pape. Mais ce n’est qu’en 1179 que le 3e concile du Latran fera d’eux les seuls électeurs du souverain pontife, à l’exclusion de toute autre intervention. Peu à peu, le collège cardinalice accroît son importance. Il se trouvera même, en quelques circonstances, en conflit avec le pape. Aussi, pour délimiter leur zone d’influence sans entraver la liberté du pontife de Rome, les cardinaux se voient-ils confier l’administration des congrégations romaines, qui sont en fait les divers ministères de l’Église.

Cette évolution va exiger l’entrée dans le Sacré Collège de cardinaux résidant hors de Rome, car les besoins de l’Église s’étendent. Dès lors, on arrive à la composition actuelle : les cardinaux résidant à Rome, dits « cardinaux de Curie », et les cardinaux, évêques résidentiels, demeurant dans les différents pays du monde chrétien.

La traditionnelle couleur rouge, la pourpre cardinalice insigne de leur dignité, fut accordée aux membres du Sacré Collège par Boniface VIII en 1294.


Le rôle et l’orientation actuelle

Les cardinaux « constituent le Sénat du pontife romain, ils l’assistent comme principaux conseillers et aides dans le gouvernement de l’Église » (canon 234). Pendant la vacance du Saint-Siège, le Sacré Collège expédie les affaires courantes, et à lui seul appartient le droit exclusif d’élire le futur pape*. La création d’un cardinal dépend uniquement de l’autorité du souverain pontife. Le nombre des membres du Sacré Collège a souvent varié au cours de l’histoire de l’Église. Jusqu’au xve s., il n’a pas dépassé la trentaine. Sixte Quint (pape de 1585 à 1590) porte ce chiffre à soixante-dix, et il en fut ainsi jusqu’à l’avènement de Jean XXIII (pape de 1958 à 1963), qui, devant les besoins de l’Église, élève ce nombre à quatre-vingt-cinq. Avec Paul VI (pape depuis 1963), il atteint cent vingt. Les cardinaux italiens avaient eu la majorité jusqu’en 1946. Mais, depuis Pie XII (pape de 1939 à 1958), la répartition nationale est modifiée et étendue : le clergé d’Afrique et d’Asie entre au Sacré Collège. L’extension du collège cardinalice montre le souci de la papauté de lui donner un caractère plus largement représentatif. En 1970, Paul VI décide que les cardinaux âgés de plus de quatre-vingts ans, tout en conservant leurs autres droits et prérogatives, ne pourront plus participer à l’élection du pape. En même temps, il invite les cardinaux à démissionner à soixante-quinze ans.

I. T.

➙ Diaconat / Église catholique / Évêque / Pape / Sacerdoce.