Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

cancer (suite)

On connaît chez l’Homme des virus responsables de tumeurs bénignes comme les verrues ou la mononucléose infectieuse. Cette dernière atteint les organes lymphoïdes et tire tout son intérêt du fait que l’agent responsable est un virus du groupe herpétique, et qu’un virus semblable sinon identique a été mis en évidence dans une maladie maligne de l’Homme, le lymphome de Burkitt. Il s’agit d’une lymphomatose atteignant le maxillaire et la région cervicale, survenant surtout chez des enfants africains des régions équatoriales et dont l’évolution non traitée se fait vers la mort en six mois. In vitro, ce virus entraîne la « transformation » de cellules humaines normales et fait apparaître des caractères d’antigénicité identiques à ceux de la cellule de Burkitt. Étant donné la localisation géographique, on pense que le vecteur pourrait être un Moustique.

Dans le cancer du rhino-pharynx, qui est particulièrement fréquent chez les Chinois, on a pu trouver un virus herpétoïde, différent de celui de Burkitt, qui provoque chez l’Homme la formation d’anticorps.

Un virus du même type pourrait être responsable du cancer de l’utérus, mais, ici, il ne s’agit que d’hypothèses, fonctions des constatations épidémiologiques de survenue de ce cancer.

En ce qui concerne la leucémie humaine, toutes les recherches sont restées jusqu’ici négatives. Elles sont rendues plus difficiles encore par le fait que l’animal n’est pas réceptif.


Immunologie et cancer

On sait maintenant que, d’une part, les cellules tumorales sont douées de propriétés antigéniques spécifiques et que, d’autre part, les réactions immunitaires de l’organisme jouent un rôle essentiel dans la défense de celui-ci contre les tumeurs malignes. De la meilleure connaissance de ces phénomènes devraient découler des conséquences thérapeutiques importantes.

La démonstration du pouvoir antigénique des cellules tumorales a été faite par la découverte de la formation d’anticorps, après injection à l’animal, anticorps qui sont spécifiques de ces cellules et différents pour chaque type de tumeur.

La greffe de cellules tumorales n’est donc possible que si l’animal est devenu immuno-tolérant ; sinon, un rejet se produit. Cette augmentation de la tolérance peut être acquise de diverses façons : thymectomie, drogues immuno-suppressives, radiations. Si l’on trouvait chez l’Homme les antigènes tumoraux spécifiques, une méthode de traitement pourrait en être déduite. Mais les recherches se heurtent à l’impossibilité d’expérimentation humaine et au fait que les greffes ne « prennent » pas chez l’animal.

Chez l’animal comme chez l’Homme, le support de la réponse immunitaire est situé au niveau des organes lymphoïdes (rate, ganglions) et de leurs cellules : les lymphocytes. Le rôle des lymphocytes a pu être démontré in vitro : au contact des cellules malignes est libéré un facteur soluble qui détruit celles-ci par l’intermédiaire de macrophages ; les lymphocytes agissent aussi par contact direct. In vivo, l’injection de lymphocytes immuno-compétents à l’animal a pu faire régresser des tumeurs constituées.

Le rôle du thymus est aussi incontestable. Les thymectomies chez le jeune animal facilitent l’implantation de cellules tumorales dans des souches à basse incidence. Le thymus serait le producteur des lymphocytes juste après la naissance et jouerait peut-être aussi par un facteur hormonal.

Ainsi, une lutte naturelle s’effectuerait contre le cancer par des phénomènes immunitaires, et une déficience de ces facteurs permettrait la révélation de celui-ci, comme semblent le prouver d’une part son augmentation de fréquence avec l’âge, dans les agamma-globulinémies constitutionnelles, et d’autre part l’anergie tuberculinique observée dans le Hodgkin.

Mais, ici encore, l’interférence d’autres facteurs, génétiques, hormonaux, d’environnement et viraux, rend encore plus complexe l’interprétation des mécanismes d’apparition d’un cancer.


Les différents types de cancer


Cancer cutané

Il représente 15 à 20 p. 100 des cancers de l’homme et 12 p. 100 de ceux de la femme. Les cancers cutanés sont des épithéliomas (formés à partir d’un épithélium). Deux types sont particulièrement fréquents :
— le type basocellulaire (environ 80 p. 100 des lésions tumorales de la peau), formé à partir de la couche basale de l’épiderme, à extension essentiellement locale et évoluant lentement ;
— le type spino-cellulaire (15 p. 100 des cas), formé à partir de la couche de Malpighi (cellules à épines, d’où le nom), plus redoutable par son extension métastatique plus fréquente par voie lymphatique.

À côté de ces deux types, on individualise les mélanomes, ou nævocarcinomes, qui sont de très mauvais pronostics car les métastases sont très rapides, et, enfin, les hématodermies d’origine réticulaire, tels le mycosis fongoïde et le sarcome de Kapsi, beaucoup plus rares.

Un rôle déterminant dans l’apparition des épithéliomas baso- et surtout spino-cellulaires peut être attribué au rayonnement ultraviolet en fonction des constatations suivantes :
— localisation prédominante au niveau de la tête et du cou (70 p. 100) et des régions exposées au soleil ;
— survenue plus fréquente dans le milieu rural ou chez les individus travaillant en plein air, dans des régions particulièrement ensoleillées ;
— rareté de ces formes dans les races « pigmentées » ;
— reproduction chez l’animal de tumeurs cutanées par exposition prolongée au rayonnement ultraviolet.

En ce qui concerne la transformation maligne des nævi pigmentaires, les traumatismes répétés pourraient avoir une influence non négligeable.

Les facteurs de sensibilisation aux rayonnements ultraviolets pourraient être d’ordre nutritionnel (rôle de l’arsenic absorbé par fumée de cigarettes et pollution atmosphérique).

D’autre part, plus encore que pour d’autres localisations organiques du cancer, l’importance des lésions précancéreuses est ici à noter, parmi lesquelles :
— la maladie de Bowen, lésion de dyskératose (anomalie de la couche cornée) le plus souvent unique, variable dans ses manifestations, dont les rapports avec le cancer sont de deux ordres : coexistence possible fréquente avec des épithéliomas d’autre origine ; évolution propre lente vers la malignité ;
— la kératose sénile, survenant chez les sujets de plus de 60 ans, consistant en taches brunes qui dégénèrent dans 20 à 25 p. 100 des cas ;
— la maladie de Paget extramammaire, réalisant des lésions grisâtres ou érythrémateuses souvent sièges de prurit, atteignant épiderme et follicules pileux et cachant souvent un cancer des annexes cutanées ;
— le pemphigus (v. bulle).

Le rôle du traumatisme ne peut être impliqué dans la survenue des cancers cutanés sur une peau normale, pas plus que les cicatrices de brûlures, sauf en de rares cas et lors de l’association à des agents locaux irritants.