Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Canada (suite)

L’art canadien


La peinture aux xviie et xviiie siècles

C’est en 1668 que Mgr de Laval, évêque de la Nouvelle-France, établit une école d’arts et métiers à Saint-Joachim, près de Québec. Cette école était destinée à former des artisans capables de participer à la décoration des églises ; de 1694 à 1706, une école du même type s’ouvrit à Montréal.

La peinture fut introduite au Canada par Claude François, dit « frère Luc » (1615-1695), qui vint en Nouvelle-France en 1670-71 et y laissa quelques toiles. Pendant la majeure partie du xviie s., la sculpture et la peinture furent faites par des artisans, demeurés anonymes, dans un style « primitif ». François Beaucourt (1740-1794) avait étudié la peinture en France après 1770. De retour au Canada vers 1786, il s’établit à Québec, où il peignit des portraits et des tableaux religieux.


La peinture au xixe siècle

Le portrait fut, dans la première moitié du xixe s. surtout, le genre le plus apprécié. Joseph von Moll Berczy (1749-1843), Jean-Baptiste Roy-Audy (v. 1785-1845), Louis Dulongpré (1754-1843), Antoine Plamondon (1804-1895), qui étudia à Paris, et son élève Théophile Hamel (1817-1870) furent les peintres les plus recherchés par la bourgeoisie canadienne. Dans la seconde moitié du siècle, malgré un déclin dû à l’avènement de la photographie, un paysagiste et peintre de genre comme Robert Harris (1849-1919) laissera encore des portraits remarquables.

La peinture de paysage fut introduite au Canada après la conquête de 1760, par des officiers britanniques qui avaient reçu leur formation d’aquarellistes en Angleterre. Ainsi, Thomas Davies (v. 1737-1812) laissa-t-il des aquarelles d’une clarté et d’une précision exceptionnelles. Le Québécois Joseph Légaré (1795-1855) allia le pittoresque du paysage à la description d’événements dramatiques. Cornélius Krieghoff (1815-1872) est resté célèbre pour sa description de la vie des paysans et du paysage québécois. Paul Kane (1810-1871) parcourut les plaines de l’Ouest et relata la vie des Indiens ; Robert Whale (1805-1887) peignit le pittoresque des paysages de l’Ontario.

La fondation de l’Académie royale canadienne, en 1880, consacra l’existence de peintres professionnels au Canada et suivit de près l’apparition du paysage romantique. Des artistes comme Lucius R. O’Brien (1832-1899), Allan Edson (1846-1888), William Brymner (1855-1925), F. M. Bell-Smith (1846-1923) surent refléter la grandeur de la nature au Canada, tandis qu’Horatio Walker (1858-1938) décrivait la vie des paysans. Paul Peel (1860-1891) peignait à la même époque de remarquables tableaux de genre. Plus tard, Aurèle de Foy Suzor-Côté (1869-1937), Maurice Cullen (1866-1934), Clarence Gagnon (1881-1942) adaptèrent l’Impressionnisme au paysage canadien. James Wilson Morrice (1865-1924) fit sa carrière principalement en Europe, tandis qu’Ozias Leduc (1864-1955) se consacrait à des décors d’églises.


La peinture au xxe siècle


Le paysage

Après la première décennie du xxe s., une réaction apparut contre la peinture d’inspiration académique européenne, et les peintres du groupe des Sept, fondé en 1920 et comprenant Lawren Harris (1885-1970), Alexander Young Jackson (1882-1974), Arthur Lismer (1885-1969), James E. H. MacDonald (1873-1932), Frederick Varley (1881-1969), Franklin Carmichael (1890-1945) et Frank H. Johnston (1888-1949), traduisirent dans un langage moderne une réalité canadienne authentique, en s’appuyant notamment sur l’œuvre de Tom Thomson (1877-1917), paysagiste au coloris audacieux. En dépit des résistances, leur influence fut profonde. Pendant les années 20 et 30, David B. Milne (1882-1953) peignit, en isolé, des paysages délicats, tandis qu’Emily Carr (1871-1945) interprétait les sites de la côte du Pacifique dans un style violent et tourmenté.


L’abstraction

Bertram Brooker (1888-1955) fut, vers 1925, le pionnier de l’abstraction au Canada, suivi de Lawren Harris vers 1935. À Montréal, la fondation de la Société d’art contemporain en 1939 et le retour, en 1940, d’Alfred Pellan (né en 1906), installé à Paris depuis 1926, marquèrent l’avènement d’une peinture moderne. Paul-Émile Borduas (1905-1960) découvrit vers la même époque André Breton et le surréalisme, et fit ses premières toiles abstraites en 1942. Autour de lui se forma un groupe de jeunes peintres qui défendirent l’automatisme en peinture : Marcel Barbeau (né en 1925), Marcelle Ferron (née en 1924), Jean-Paul Mousseau (né en 1927), Jean-Paul Riopelle* (né en 1923), Fernand Leduc (né en 1916). En 1948, le manifeste de Borduas et des automatistes, Refus global, proclamait la nécessité d’une totale liberté expressive.

Au début des années 50, des peintres comme Jack Shadbolt (né en 1909) et B. C. Binning (né en 1909) introduisirent l’abstraction sur la côte du Pacifique.

Une forme d’expressionnisme abstrait fut prônée à Toronto, en 1954, avec la formation du groupe des Onze, dont Harold Town (né en 1924) et William Ronald (né en 1926) firent partie. En 1955, à Montréal, la formation d’un groupe des Plasticiens marqua, en réaction contre l’automatisme, l’introduction d’une peinture abstraite géométrique, défendue un peu plus tard par Claude Tousignant (né en 1932) et Guido Molinari (né en 1933).


La peinture après 1960

Après 1960, la peinture au Canada cesse de se polariser autour de groupes définis. Montréal, Toronto, London, Winnipeg, Regina, Vancouver sont des centres actifs. À Montréal, on peut citer Yves Gaucher (né en 1934), Jacques Hurtubise (né en 1939), Charles Gagnon (né en 1934), qui ont chacun une forme d’expression individuelle, et, à Toronto, Graham Coughtry (né en 1931), Joyce Wieland (né en 1931), Michael Snow (né en 1929). À London, Tony Urquhart (né en 1934), Greg Curnoe (né en 1936) et Jack Chambers (né en 1931) ont chacun un style figuratif particulier. Sur la côte ouest, à Vancouver, Iain Baxter (né en 1936) ou Michael Morris (né en 1942) sont parmi les plus connus.

Désormais, la plupart des peintres canadiens pratiquent en outre d’autres disciplines artistiques, dont la sculpture, le cinéma, la photographie et la poésie.