Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
C

Cameroun (suite)

Le commerce extérieur

La balance du commerce est généralement équilibrée (130 milliards CFA pour l’ensemble importations-exportations en 1970). Le principal client est la zone franc pour la moitié des échanges. Les principaux postes d’importation sont les machines (15 p. 100), le matériel de transport (15 p. 100), les tissus (13 p. 100). Les exportations portent surtout sur les productions agricoles : cacao (23 p. 100), café (17 p. 100), coton ; sur l’aluminium d’Édéa et le bois.

J. C.


L’histoire


Les origines

Les premiers temps de l’installation des hommes, surtout dans la forêt, sont encore mal connus, et l’inventaire des traditions orales et des sources archéologiques est à peine ébauché. Les sites de la vallée de la Bénoué permettent cependant d’y constater la présence très ancienne des légendaires Saos ; une partie des populations (par exemple les Kotokos) paraît en descendre dans le nord du Cameroun. Celui-ci resta longtemps un ensemble peu cohérent de petites principautés (surtout kotokos) installées le long du Logone et soumises à la suzeraineté lointaine du Bornou au xvie s. et du Baguirmi aux xviie et xviiie s. ; elles constituèrent des terres de chasse aux esclaves, comme en témoignent, encore au xixe s., les relations de voyages de Dixon Denham en 1823 et de Heinrich Barth entre 1850 et 1855. Au nord-ouest, un royaume, le Mandara, réussit à conserver une relative tranquillité jusqu’au xixe s. ; sa dynastie avait été probablement désignée par les « Maïs » du Bornou, à l’origine.

L’avance de celui-ci permit l’arrivée des populations déjà en partie islamisées : Bornouans, Haoussas, Arabes Choas. Mais le choc musulman date surtout de la grande révolution lancée par Ousmane dan Fodio, au Sokoto, en 1804 ; les pasteurs foulbés déjà infiltrés par la Bénoué renforcèrent alors leurs principautés (lamidas) naissantes dans l’Adamaoua (N’Gaoundéré, Kontcha, Banyo, Tibati), dans la vallée de la Bénoué (Reï Bouba), dans le nord (Garoua, Maroua). Leurs chefs, ou lamibé, reconnurent au début une certaine allégeance à l’émir d’Ousmane dan Fodio, installé à Yola : Adama. Leurs relations avec les païens (les « kirdis ») furent très mauvaises : les lamibé les considérèrent surtout comme une masse à convertir ou à asservir. Les réfractaires furent des montagnards, réfugiés ou autochtones ; d’autres acceptèrent l’islamisation, parfois l’alliance (les Mboums de l’Adamaoua) ; d’autres enfin durent payer un tribut en esclaves (par exemple les Bayas venus de l’est dans l’Adamaoua). Le nord de l’Adamaoua reste aujourd’hui profondément marqué par le contraste entre musulmans et kirdis (Massas, Mousgoums, Toupouris des plaines, Matakams, Mofous, Madas des montagnes, d’une très grande densité de population). L’agriculture fut laissée aux kirdis installés dans des villages de « serfs » par les Foulbés ; ces derniers se réservèrent une autorité politique, qui n’a pas entièrement disparu, ainsi que l’élevage et, dans les centres, l’artisanat et le commerce.

La conquête foulbé accéléra sans doute l’occupation du sud par des groupes venus du nord-ouest et déjà en marche à la recherche du sel et de la « grande eau » ; ils trouvèrent comme premiers occupants les Pygmées, ou Négrilles, vivant de chasse et de cueillette, qui se métissèrent souvent aux arrivants. Ceux-ci parlaient des langues bantoues. Les Fangs* et apparentés (Bétis, Boulous, Bassas, Makas, Ndjems, etc.) s’installèrent dans la forêt, tandis que les Bafias, les Banens et les Mangisas occupèrent les rives de la Sanaga. Seuls quelques groupes côtiers, dont les Doualas, seraient venus du sud.

Les montagnes et les plateaux de l’ouest furent peuplés par des populations originales, dites parfois Grassfield. Parmi elles, les Bamilékés*, cultivateurs acharnés, nombreux, constituèrent de solides chefferies. Leurs voisins, Tikars au nord-ouest, Baboutés à l’est, restèrent plus dispersés. Toutefois les Bamoums*, superficiellement islamisés, créèrent au nord un royaume concentré, illustré par le règne du sultan Njoya à la fin du xixe s. L’histoire de l’ouest fut dominée par la rivalité entre les Bamoums et les Bamilékés.


Européens et colonisation

Le long de la côte, les Africains entrèrent en contact avec les Européens au xve s., lorsque les Portugais découvrirent le rio dos Camarões (Wouri). Jusqu’à la colonisation, des courtiers côtiers (Doualas, Tangas, Boulous) contrôlèrent le troc des produits de l’intérieur, esclaves et ivoire, contre les marchandises des Portugais puis des Hollandais aux xviie et xviiie s. Après le congrès de Vienne (1814-1815), les Britanniques organisèrent la chasse aux négriers et s’efforcèrent de substituer un commerce « légal » (huile de palme) au commerce « honteux ». Les premières factoreries à terre ne furent installées qu’à partir de 1860, précédées toutefois par la mission du pasteur Alfred Saker (1814-1880) à Victoria. Les Britanniques, grâce à leurs « consuls de la baie du Bénin et du Biafra », entretenaient alors des relations privilégiées avec les deux familles royales des Doualas, les Bell et les Akwa. Mais, profitant de l’indécision politique de leurs concurrentes et des divisions des Doualas, les firmes allemandes (Woermann) développèrent leur influence, et Gustav Nachtigal, mandaté par Bismarck, obtint un traité de protectorat des Doualas en juillet 1884.

Jusqu’en 1916, le Cameroun resta une colonie allemande, dont la capitale fut installée à Buea de 1901 à 1909. Des accords successifs avec l’Angleterre (1886 et 1893) et avec la France (1894) fixèrent les frontières. En 1911, un arrangement franco-germanique étendit ces frontières jusqu’au Congo et à l’Oubangui, contre la liberté d’action laissée à la France au Maroc ; les nouveaux territoires formèrent le « Neues Kamerun ». Mais l’autorité coloniale ne s’imposa pas sans résistances, durement réprimées, comme la révolte des Boulous en 1899-1901 ou le « complot » des Doualas, qui entraîna la pendaison en 1914 du prince Rudolf Douala Manga Bell, accusé d’avoir pris contact avec les Anglais et d’avoir fomenté un soulèvement des chefs coutumiers. Dans le Nord, les lamibé ne reconnurent la tutelle étrangère qu’en 1902, après des campagnes militaires difficiles dirigées par Hans Dominik. Aussi bien dans le Nord que dans le pays bamoum, les Allemands choisirent d’ailleurs un système d’administration indirect qui laissait en place les chefs traditionnels. Les résistances, les abus des grandes sociétés concessionnaires (Nord-West-Kamerun- et Süd-Kamerun-Gesellschaft), des scandales aussi motivèrent le rappel en 1906 du gouverneur Jesko von Puttkamer, qui « régnait » au Cameroun depuis 1895. Néanmoins, l’œuvre allemande fut considérable : équipement des voies ferrées Douala-N’Kongsamba et Douala-Édéa ; mise en valeur agricole remarquable par le développement des cultures d’exportation (cacao, palmistes, hévéas, tabac, bananes, café) en grandes plantations sur les flancs du mont Cameroun (18 000 ha plantés en 1914) et le long du chemin de fer Douala-N’Kongsamba.