Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

byzantin (Empire) (suite)

Dans la production religieuse, l’orthodoxie a des défenseurs en Maxime le Confesseur (v. 580-662), mystique autant que philosophe, et en Anastase le Sinaïte, plus nettement scolastique. L’hagiographie est représentée par Léontios de Néapolis, et l’hymnographie par André de Damas, archevêque de Crète. L’iconoclasme est combattu par le patriarche Nicéphore (v. 748-829) et par Théodore le Stoudite (759-826). Mais c’est en Jean Damascène († v. 749) que la théologie byzantine trouve sa plus complète expression : philosophe (Source de la connaissance, Sur la doctrine orthodoxe) autant que poète (Hymnes, Canons, Nativité), il est avant le schisme le théologien de l’Orient que l’Occident ne reniera pas.

Dans la production profane, très imprégnée de religiosité, la chronique l’emporte sur l’histoire. Georges de Pisidie met en vers la Genèse, de même qu’il raconte sous forme d’épopée les expéditions de l’empereur Héraclius. Une poétesse, Cassia (ou Kassia), écrit des hymnes et des épigrammes. Le roman de Barlaam et Josaphat atteste des influences orientales par le goût du merveilleux et l’attrait du bouddhisme.


Les ixe et xe siècles

Au redressement de la politique impériale correspond un renouveau des lettres. Le goût de l’humanisme antique donne lieu à une véritable renaissance. Mais l’érudition et le culte des œuvres du passé ne se dressent pas contre le christianisme. Ainsi le patriarche Photios (v. 820 - v. 895), esprit encyclopédique, qui crée en quelque sorte la critique littéraire dans son Myriobiblion (vaste compte rendu de ses lectures), reste le théologien orthodoxe et incite à la rupture avec l’Occident romain : il contribue à former la conscience nationale dans l’Empire.

Nombreux sont les chroniqueurs. Érudits, ils édifient une philosophie de l’histoire — fait nouveau —, comme Théophane le Confesseur (v. 758 - v. 818), soucieux de l’unité impériale et des principes capables de l’assurer, ou comme Georges le Moine (ou Hamartole), qui voit dans le pouvoir impérial une manifestation de la Providence.

Le goût de l’érudition, développé au xe s., est encouragé par les empereurs, souvent eux-mêmes écrivains et auteurs de traités (Léon VI le Sage, Nicéphore Phokas, Basile II). La philologie est illustrée par Suidas, auteur d’un précieux Lexique. Syméon le Métaphraste dresse une collection des Vies de saints. Constantin Képhalas compose l’Anthologie (dite Palatine) des meilleurs poèmes païens et chrétiens. Jean Cyriotis, tout en faisant œuvre d’érudit, est aussi poète et hymnographe, ce qui montre la diversité des créations chez un même esprit. De même, chroniqueurs et historiens sont volontiers théologiens ou moralistes : Syméon le Métaphraste, Théodore de Mélitène, Coméniatis, Léon le Diacre. L’œuvre de Constantin VII Porphyrogénète (905-959) présente le tableau le plus complet de l’époque du point de vue des coutumes, des institutions et de la civilisation (De l’administration de l’Empire et le Livre des cérémonies).

Les événements extérieurs, notamment la menace de l’Islām, inspirent la poésie. Le xe s. voit le début des chants populaires, qui vont se répandre peu à peu sur tout le territoire hellénique. Un cycle épique se constitue autour du héros Digénis Akritas, dont il est fait un symbole ; par là, l’actualité rejoint la tradition, et le champ de la poésie s’étend de la production populaire orale à la littérature écrite et aux genres élevés.

C’est au xe s. également que se reconstitue le théâtre populaire de la liturgie. Les thèmes de la Vierge et du Christ donnent lieu à des jeux dramatiques célébrés dans les églises à l’occasion des grandes fêtes. La tradition s’est prolongée jusqu’au xve s. Mais le théâtre byzantin est demeuré religieux, au rebours du théâtre antique ou du théâtre occidental.


Nouvelle renaissance des lettres byzantines (xie-xve s.)

Le relâchement provisoire de l’autorité impériale, les menaces extérieures permettent un développement de la pensée libre dans les lettres, alors que domine la philosophie platonicienne. Le redressement dû à la politique des Comnènes favorise une renaissance des lettres par un regroupement des activités, que suit une décentralisation à laquelle succède une tendance contraire qui marque un dernier éclat avant la chute de Byzance.


Les xie et xiie siècles

Le schisme du xie s. a rendu définitive la rupture entre Byzance et l’Occident : l’orthodoxie est devenue un élément national. Toutefois, l’humanisme tempère parfois la rigueur des positions théologiques.

Trois courants de pensée se développent parallèlement. L’un, plus philosophique que proprement théologique, pénétré de rationalisme, est représenté par Michel Psellos (1018-1078), prodigieux érudit à l’œuvre immense (Chronographie, Lettres, Démonologie). À ce mouvement s’oppose le mysticisme de Syméon le Nouveau Théologien, auteur des Amours des hymnes divines, traité d’ascèse spirituelle et de contemplation. Un troisième courant, moralisateur, ramène au réalisme et à l’action avec Kékavménos (Stratêgikon), qui définit la conduite du citoyen et du soldat défenseur de Byzance.

L’avènement des Comnènes restaure l’autorité impériale, qui reprend le contrôle des activités littéraires : l’orthodoxie, protégée des hérésies des Bogomiles et des Pauliciens, s’accommode d’un humanisme qui ne la heurte pas systématiquement.

La philosophie a des défenseurs, par exemple en la personne de Jean Italos, néoplatonicien, et d’Eustratios de Nicée (v. 1050 - v. 1120), plus aristotélicien. Elle suscite, par ailleurs, des réactions chez des mystiques comme Nicétas Stéthatos (le Paradis intelligible) et Callistos Cataphigiotis (Chapitres sur la vie contemplative), et chez des moralistes comme Théophylacte (Institution royale) ou Eustache de Thessalonique (De la simulation, étude des caractères humains).

L’historiographie compte de grands écrivains. Anne Comnène, fille de l’empereur Alexis, écrit la chronique du règne de ce souverain (Alexiade). Michel Choniate (1140 - v. 1220) défend dans ses Discours les droits de l’hellénisme. Son frère Nicetas rédige l’Histoire de Byzance au xiie s. Le pessimisme apparaît chez les historiens qui pressentent la fin de l’Empire (Eustache de Thessalonique, Jean Tzetzès), cependant que Jean Zonaras († v. 1130), Constantin Manassès (1143-1181), Glykas († v. 1204) restent fidèles à la chronique universelle plus ou moins officielle.

L’esprit satirique trouve sa place, à côté des grands genres, dans les Poèmes de Théodore Prodrome (1115-1166), type du poète de cour solliciteur et malheureux.

La littérature d’imagination donne naissance, d’une part, au roman courtois (Hysmine et Hysménias d’Eumathe Macrembolitos, Drosilla et Charichlès d’Eugénianos) et, de l’autre, aux adaptations de légendes indiennes ou persanes (Syntipas, Stéphanitis et Ichnélatis).