Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Büchner (Georg) (suite)

Après l’arrestation de son ami Karl Minnigerode à Giessen, Büchner rentra, pour le semestre d’hiver 1834-1835, à Darmstadt chez ses parents. Il y écrivit son premier drame, la Mort de Danton (Dantons Tod), en cinq semaines, dans un état d’exaltation passionnée et avec la crainte constante d’être lui-même arrêté. Il a encore le temps d’envoyer au poète Gutzkow, éditeur d’une revue qu’il estime, Phönix, le manuscrit de son drame et il reçoit un avis à comparaître devant le juge d’instruction de Darmstadt. Il prend alors la décision de fuir et quitte sa ville le 1er mars, passe la frontière sans papiers et arrive à Strasbourg le 9. Il ne devait plus revenir en Allemagne.

De mars 1835 à octobre 1836 à Strasbourg, Büchner travaille intensément : il présente un mémoire pour le doctorat es sciences ; il écrit sa comédie Léonce et Léna, il commence Woyzeck, traduit deux drames de Victor Hugo, en compose un autre, perdu, sur Pietro Aretino et trouve aussi le temps d’écrire une nouvelle sur Lenz.

En octobre 1836, il va s’établir à Zurich dans l’espoir d’y enseigner les sciences ; il y donne avec succès un premier cours, mais tombe presque aussitôt malade, saisi d’une sorte d’épuisement. Le typhus l’emporte le 19 février 1837.

La nouvelle où il retrace la fuite du poète Lenz dans les Vosges, au moment où il sent sa raison vaciller et va se confier au docteur Oberlin, est probablement son œuvre la plus achevée ; pourtant, toute l’actualité de Georg Büchner tient à des drames et à sa comédie.

Avec la Mort de Danton, il a voulu donner le modèle du réalisme historique au théâtre. L’histoire est pour lui le lieu d’un conflit de forces, il veut les analyser et les peindre avec toute l’objectivité du savant.

Déjà les contemporains avaient été saisis par la force du tableau qu’il a fait de la rivalité entre Robespierre et Danton, comme de la fin des Dantonistes. Plus vivant au milieu du xxe s. qu’aucune autre pièce du temps, ce drame est aussi le meilleur qu’ait inspiré la Révolution française.

Les dramaturges modernes ont accordé plus d’attention encore au Woyzeck, qui n’est pourtant qu’une ébauche, mais dont le sujet était parfaitement neuf et qui réunit déjà quelques-unes des innovations qu’exploiteront les modernes. Woyzeck est un pauvre homme, traité par tous comme s’il était un objet, alors qu’en vérité lui seul est un être de chair et de sang. Il aime Marie, il n’est pas vertueux et il dit simplement, avec des mots qui annoncent Brecht : « La vertu est belle, mais moi je suis un pauvre gars. »

Dans Léonce et Léna, aussi, Büchner renverse les perspectives, et derrière les masques de la comédie, sous le sceptre carnavalesque du fou de Gozzi, on sent battre des cœurs ; il est vrai que tous les personnages ont beaucoup lu ; ils parodient, se parodient, se moquent de la parodie. L’esthétique de Georg Büchner le sépare de ses contemporains. Reprenant ce qu’avait ébauché Lenz, il a donné au théâtre l’exemple d’un style à la fois lucide, contrasté, audacieusement réaliste, en marge de toutes les conventions « bourgeoises », prompt à démasquer, mais cherchant au fond de la disharmonie, du contraste et de la polémique une lueur d’humanité. De Frank Wedekind à Brecht, tous les dramaturges du xxe s. lui doivent quelque chose.

P. G.

 H. Mayer, Georg Büchner und seine Zeit (Berlin, 1947 ; 2e éd., 1960). / G. Baumann, Georg Büchner, die dramatische Ausdruckswelt (Göttingen, 1961).

Budapest

Capitale de la République socialiste de Hongrie.
Budapest a dépasse 2 millions d’habitants et pose le problème, dans un pays d’économie collectiviste, d’une grande métropole urbaine, centralisant à l’excès la population et les activités d’un pays, dont la population totale ne dépasse guère 10 millions d’habitants. Debrecen, la deuxième ville hongroise, n’atteint pas le dixième de la population de la capitale, et la Hongrie ne compte que trois autres villes de plus de 100 000 habitants. On a ainsi opposé souvent Budapest et le « désert hongrois ».



L’agglomération

La position géographique et le site comptent parmi les meilleurs de Hongrie et même d’Europe centrale. Les Romains avaient déjà fondé la cité et le camp retranché d’Aquincum, sur le Danube navigable, à proximité de sources thermales, non loin du limes. Le grand fleuve sépare en effet deux Hongries, la Transdanubie et la Cisdanubie ; l’un des points de passage les plus faciles est offert par l’avancée des monts de la Dorsale hongroise, que franchit le Danube en rétrécissant son cours, ce qui permet d’utiliser les îles d’amont (Margit, c’est-à-dire Marguerite) et d’aval (Csepel) afin d’y jeter des ponts et d’établir des habitats. Comme Prague, la ville présente une dissymétrie marquée. Les collines escarpées et boisées de la rive droite, disséquées par des ravins à forte pente, ont constitué le noyau ancien historique de l’agglomération. Celui-ci conserve encore, à Buda et Gellért, les vestiges d’un brillant passé : le Palais royal, la Forteresse, l’église du Couronnement (ou église Mathias), le « bastion des pêcheurs » ; de nos jours, c’est la ville d’art et d’histoire, siège des principaux organes du gouvernement, des ambassades, des musées, fréquentée par les touristes ou offrant, sur le sommet des croupes, un habitat résidentiel de luxe, et plus loin, dans la forêt, des résidences secondaires. Sa part dans la population de l’agglomération a sensiblement diminué au fur et à mesure que s’accroissait l’importance de Pest.

La « ville d’en face », Pest, est née au xixe s. : plus récente, plus étendue, plus rapidement construite et peuplée, elle forme, en fait, l’essentiel de Budapest avec, au bord du fleuve, une belle alignée de bâtiments administratifs (le Parlement, construit en style néo-gothique, l’hôtel de ville, des musées), une city qu’enferme un premier boulevard semi-circulaire, reliant deux ponts du Danube. Mais l’ensemble de Pest se compose de faubourgs démesurés, développés le long des grandes chaussées qui partent vers les principales villes de la Grande Plaine. Pest, à l’origine ville des marchands et des artisans, est devenue la ville résidentielle et industrielle.

Une troisième partie de l’agglomération se consacre à l’industrie. En amont, au nord, les usines et les cités d’Újpest, au sud, l’île de Csepel ; le long des routes vers l’est et le sud-est : ainsi Budapest est frangée d’une banlieue industrielle.