Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Bruxelles (suite)

L’incendie de 1276, qui détruit plus du tiers des habitations, puis l’extension des faubourgs vers le sud, où se sont installés, après l’émeute de 1306, un grand nombre de tisserands et de foulons, enfin l’enrichissement de la ville justifient la construction d’une deuxième enceinte (1359-1379), qui s’étend sur 8 km et englobe 450 ha. Sous le règne de Venceslas Ier (1355-1383), le mouvement démocratique reprend, favorisé par l’affaiblissement du pouvoir ducal et par les oppositions à l’intérieur même des lignages. Bruxelles bénéficie, avec tout le duché de Brabant, de la charte de 1356, dite « Joyeuse Entrée » (v. Brabant). Stimulés par l’attitude du duc qui cherche à affaiblir les patriciens de Louvain, les métiers bruxellois massacrent de nombreux patriciens, le 23 juillet 1360. Après avoir exercé de violentes représailles, les échevins acceptent de consulter à partir de 1366 les principaux chefs des métiers, notamment en matière financière. Cependant, le régime demeure oligarchique, les échevins restant choisis par le duc parmi les seuls candidats présentés par les sept lignages en vertu du privilège du 19 juin 1375. Ayant attaqué en 1421 les membres des lignages et exécuté plusieurs favoris du duc Jean IV (duc de 1415 à 1427), les gens des 49 métiers groupés en 9 nations arrachent aussitôt à celui-ci le droit de nommer la moitié des échevins et un des deux bourgmestres de la ville. En 1422, le clergé, la noblesse et la bourgeoisie prennent le nom d’états et décident de placer le duc sous la tutelle d’un conseil.

En 1430, le duc Philippe de Saint-Pol étant mort sans enfants, les états du Brabant désignent Philippe le Bon comme héritier du duché, pour l’empêcher de tomber entre les mains de l’empereur. Devenue l’une des résidences des ducs de Bourgogne, la ville s’enrichit au temps des Valois et conserve son importance sous les Habsbourg, au prix d’une importante mutation économique (substitution de la tapisserie à la draperie et construction du canal de Willebroek [1550-1561], qui remplace la Senne envasée comme voie d’accès à la mer). Temporairement transféré à Malines, le siège du gouvernement est rétabli définitivement à Bruxelles sous Philippe II. Les troubles religieux du xvie s. et la réaction catholique, principalement sous le duc d’Albe, portent un coup sévère à la prospérité de la ville : en 1576, par la Pacification de Gand, les 17 provinces des Pays-Bas se fédèrent et se donnent pour objectifs l’expulsion des troupes espagnoles et la suspension des décrets du duc d’Albe contre les hérétiques. Ayant chassé les Espagnols en 1578, Bruxelles est réoccupée par le duc de Parme, Alexandre Farnèse, le 10 mars 1585. La période espagnole est pour la ville une période de stagnation, voire de décadence.

Assiégée par le maréchal de Villeroi, Bruxelles est écrasée à partir du 13 août 1695 par un bombardement qui dure deux jours : 4 000 maisons, l’hôtel de ville et le centre de la ville sont gravement touchés. Occupée par les Alliés en 1706, Bruxelles passe sous la domination de la maison d’Autriche à la suite du traité d’Utrecht (1713). Résidence des gouverneurs généraux autrichiens jusqu’en 1794, Bruxelles s’oppose ouvertement à ses nouveaux maîtres. Accusé d’avoir conspiré contre la sûreté de l’État, en défendant les privilèges des métiers, un de leurs doyens, François Anneessens, est décapité en 1719. Plus conciliante, l’impératrice Marie-Thérèse contribue à la popularité de son beau-frère, le gouverneur général (1744-1780) Charles de Lorraine (1712-1780), qui confie à l’architecte Barnabé Guimard le soin de faire de Bruxelles une capitale classique. La politique limitative des libertés provinciales de Joseph II ayant entraîné la révolte du Brabant (1789), le conflit reprend entre les Habsbourg et Bruxelles. Servant dès le début de la Révolution française de dépôt d’armes aux émigrés et aux coalisés, Bruxelles est occupée le 14 novembre 1792 par Dumouriez, vainqueur à Jemmapes des Autrichiens. Ceux-ci ayant repris la ville peu après, l’empereur François II vient y confirmer la Constitution brabançonne, la Joyeuse Entrée supprimée par Joseph II.

Réoccupée par les Français le 10 juillet 1794, Bruxelles devient le chef-lieu du département de la Dyle (1795-1814), à la suite de l’annexion des Pays-Bas autrichiens par la France. Une année sur deux résidence du roi des Pays-Bas entre 1815 et 1830, elle se soulève le 25 août 1830. Cette révolution s’achève par la proclamation de l’indépendance de la Belgique, dont cette ville devient la capitale. Grâce surtout à l’action des bourgmestres Charles de Brouckère (1796-1860) et Jules Anspach, Bruxelles se transforme rapidement au xixe s., notamment grâce au voûtement de la Senne (achevé en 1871), sur le cours de laquelle s’élèvent les boulevards du centre. Occupée du 20 août 1914 au 18 novembre 1918 par les Allemands, elle oppose à ces derniers une résistance passive efficace sous l’impulsion de son bourgmestre Adolphe Max (1869-1939 ; bourgmestre de 1909 à 1939). Bombardée le 10 mai 1940, elle est de nouveau occupée par les Allemands le 18 mai. Victime des bombardements stratégiques alliés de 1943-44, elle est libérée par les Britanniques (3 sept. 1944), mais elle est alors exposée aux fusées allemandes.

Après la guerre, ayant rapidement retrouvé une grande prospérité, dont témoigne l’Exposition internationale de Heysel (1958), Bruxelles devient le siège du Conseil des ministres et de la Commission de l’Europe des Six. Depuis 1967, elle est aussi le siège du Conseil permanent de l’O. T. A. N.

O. G.


Bruxelles, ville d’art

À maintes reprises, Bruxelles a été ville résidentielle des comtes et des ducs régnants. Grâce notamment à leur mécénat, la vie artistique, au cours des siècles, y apparaît fort riche ; nombreux sont les monuments et les œuvres d’art qui en témoignent aujourd’hui.


Architecture

La cathédrale Saint-Michel est gothique (xiiie-xviie s.) : le chœur fut achevé vers 1275, la grande nef, la façade et le collatéral nord au xvie s. Elle renferme de nombreuses œuvres d’art, notamment dans la chapelle du Saint-Sacrement, aux remarquables vitraux de 1533-1539. Fondée au xie s., l’église Saint-Nicolas a été reconstruite au xive ; Notre-Dame-de-la-Chapelle a un transept encore roman du début du xiiie s., les autres parties (xiiie-xvie s.) sont caractéristiques du gothique brabançon (nombreuses peintures et sculptures) ; Notre-Dame-du-Sablon date des xive et xve s. Parmi les églises baroques du xviie s. subsistent Saint-Jean-Baptiste-au-Béguinage (1657-1676), Notre-Dame-de-Bon-Secours (1664-1669), Notre-Dame-aux-Riches-Claires (1665), probablement par l’architecte Luc Faydherbe de Malines. L’église des Minimes (1700-1715), par Willem de Bruyn (1649-1719), est d’inspiration plus classique.