Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

brouillard (suite)

Classification


Brouillard de rayonnement

Ce brouillard résulte du contact d’un air relativement chaud et humide avec un sol froid. C’est dans la mesure où le sol froid impose l’abaissement des températures à l’air contigu que ce dernier se sature et que sa vapeur se condense en fines gouttelettes. Or, le sol se refroidit habituellement par rayonnement (nocturne), ce qui donne naissance à une inversion basse (fig. 1). Le brouillard de rayonnement est donc lié à une inversion thermique basse, découlant elle-même du refroidissement radiatif. L’inversion postule un air calme (toute turbulence la supprime). C’est de nuit (intensité maximale du rayonnement générateur de perte de chaleur), par ciel clair (l’écran nuageux nuirait au rayonnement en imposant un effet de serre) et sous condition anticyclonique (qui élimine les nuages et impose le calme atmosphérique) que l’on rencontre surtout les brouillards de rayonnement.

L’épaisseur de la couche nébuleuse est maximale au moment où la température du sol est la plus basse. C’est ce qui se produit peu après l’effacement de la nuit (une demi-heure au-delà du lever du soleil). En effet, à l’instant précis où l’énergie solaire apportée égale celle que perd le sol, se place la température minimale de ce dernier, ce qui aggrave momentanément l’inversion, d’autant que l’air au-dessus de la couche de brouillard se réchauffe résolument (apport solaire direct) [fig. 2]. Ensuite, la température du sol remonte ; d’où la chaleur propagée depuis ce bas niveau. Il s’ensuit l’effacement du brouillard par la base (« il se lève ») et son amincissement progressif (fig. 3) jusqu’à disparition. Cette évolution permet de comprendre la persistance éventuelle du brouillard de rayonnement pendant plusieurs jours. On conçoit, les conditions anticycloniques demeurant, que le « stratus bas » aggrave le froid au sol (écran à la progression des rayons solaires), tandis que les températures s’accroîtront au-dessus de la couche opaque ; d’où consolidation de l’inversion. Pour que celle-ci disparaisse, et avec elle le brouillard, il faudra un changement de temps (arrivée d’une turbulence dépressionnaire). Les brouillards de rayonnement sont confinés sur les surfaces terrestres, car l’eau ne subit pas des variations thermiques permettant un refroidissement nocturne suffisant de l’air situé à son contact (impossibilité par là d’atteindre le seuil de saturation pour cet air, c’est-à-dire encore son point de rosée). Ces brouillards se rencontrent (aux latitudes tempérées) surtout en automne et en hiver, principalement dans les fonds de vallée.


Brouillard d’advection

Il résulte d’un déplacement horizontal de l’air (mouvement advectif). Il s’agit normalement d’un air chaud et humide qui parvient sur une surface plus froide. Au contact de cette dernière, l’air en mouvement subit la saturation. À partir de là, sa vapeur d’eau se condense. Le brouillard d’advection n’est pas soumis à l’alternance diurne (jour-nuit) des températures ; par ailleurs, il peut se présenter indifféremment sur terre et sur mer. On le rencontre sur terre lorsque de l’air marin chaud arrive sur le sol hivernal (et nocturne) refroidi. Il est sur mer quand de l’air terrestre chaud aboutit à une mer froide (cas du pourtour des îles Britanniques au printemps et en début d’été) et aussi quand de l’air marin chaud passe sur un courant froid : brouillards au-dessus des courants froids de Californie, de Humboldt, des Canaries, du Labrador. Dans ce dernier exemple, c’est une masse d’air réchauffée sur le Gulf Stream qui arrive sur le substratum maritime froid imposé par le courant d’origine polaire.

Brouillards « de mélange » et « de vapeur » peuvent être également classés dans le type advectif. Les brouillards de mélange résultent du mixage d’air chaud et quasi saturé avec de l’air plus froid (passage d’un « front chaud » où l’air chaud arrive au contact d’un air plus froid préfrontal). Quant aux brouillards de vapeur, ils se produisent lorsqu’un air froid passe au-dessus d’une eau plus chaude.


Le brouillard et l’homme

Par l’absence de visibilité qu’il impose, le brouillard rend difficile la circulation (aérodromes, routes, voies ferrées, etc.). Il est susceptible de créer chez l’homme des malaises, voire d’occasionner la mort, s’il s’accompagne de températures élevées. Surtout, il représente un phénomène favorable à la concentration des germes pathogènes, des gaz rares comme le radon (émanation radioactive depuis le sol) et à l’accumulation des déchets divers d’origine industrielle et domestique. Le « smog » britannique (de smoke, fumée, et fog, brouillard) en est une saisissante illustration. Par les fumées et les gaz toxiques qu’il contient, il tue bêtes et gens. Le problème de l’élimination du brouillard est un problème délicat qui n’a pas encore reçu de solution satisfaisante.

P. P.

Brousse

En turc Bursa, v. de Turquie occidentale, au sud-est de la mer de Marmara ; 276 000 hab.


La ville antique de Prousa (ou Pruse), conquise par les Turcs Ottomans en 1326, fut capitale asiatique de leur empire de ce jour jusqu’en 1453. Pendant cette époque s’est formé le premier art ottoman, parfois nommé art de Brousse, bien qu’il ait fleuri aussi à Nicée (Iznik) et à Andrinople (Edirne), la capitale européenne. Les monuments bien conservés qui parent Brousse, la beauté de son site, dominé par l’Olympe de Bithynie (Ulu Dağ), l’abondance de ses frondaisons en font la plus jolie ville de Turquie* après Istanbul*.

La Grande Mosquée (Ulu Cami), érigée entre 1379 et 1421, offre encore un exemple altéré du plan dit « arabe », à nefs multiples s’entrecroisant, mais sans cour et avec couverture de vingt petites coupoles. Les autres oratoires, entièrement originaux, montrent la transformation du plan iranien de l’édifice cruciforme à quatre iwāns. Les salles voûtées en berceau qui formaient les quatre bras de la croix sont désormais couvertes en coupoles ; la cour centrale, qui s’amenuise, l’est également ; la partie antérieure gagne en largeur ce qu’elle perd en profondeur pour constituer une sorte de narthex, doublé parfois d’un exonarthex sous forme de portique sous coupolettes. Le sanctuaire ainsi réalisé se trouve donc divisé en quatre salles principales, souvent séparées par des marches, et ne répond plus bien aux besoins du culte (mosquée d’Orhan [1339], mosquée de Bayezid [1400], mosquée Verte [1424]). Les architectes se trouveront contraints d’envisager l’élargissement de la salle centrale, la réduction des collatéraux pour en faire des bas-côtés ou des pièces accessoires : c’est l’histoire ultérieure de l’art ottoman. En même temps qu’elle élève des medrese (de l’arabe madrasa, université) de type traditionnel (medrese de la mosquée Verte, aujourd’hui musée [xve s.]), l’école de Brousse innove en créant la mosquée-medrese à deux étages, dans laquelle le rez-de-chaussée sert d’oratoire, l’étage haut d’école avec cellules. La mosquée-université de Murad Ier (1363) présente une singulière façade à deux étages avec arcs géminés et rangs alternés de pierres et de briques qui suggèrent une influence italienne.