Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Broglie (Louis, prince, puis duc de)

Physicien français (Dieppe 1892).


Issu d’une illustre famille (v. art. précéd.), il ne semble guère, dans sa jeunesse, destiné à la science. Élève au lycée Janson-de-Sailly, il brille surtout dans les disciplines littéraires. Il passe à dix-huit ans sa licence d’histoire, fait une année d’études de droit et prépare un diplôme sur la politique intérieure française au début du xviiie s.

Mais, vers sa vingtième année, ses méditations s’orientent vers les sujets scientifiques.

Il suit les traces de son frère Maurice, devient en deux ans licencié ès sciences et commence à se pencher sur les difficultés qu’ont alors les physiciens pour établir une théorie cohérente du rayonnement.

Ces difficultés viennent d’être mises en lumière en 1911 par le premier congrès Solvay de Bruxelles, dont Maurice de Broglie est alors le secrétaire.

Pendant la Première Guerre mondiale, Louis de Broglie est affecté, sous les ordres du général Ferrié, au poste radiotélégraphique de la tour Eiffel. Il peut ainsi approfondir, dans ses travaux de laboratoire, ses connaissances relatives aux ondes radioélectriques.

Sitôt rendu à la vie civile, il retourne au laboratoire de Maurice de Broglie.

Il s’associe aux travaux de celui-ci sur la spectrographie des rayons X, qui confirme la structure atomique de la matière.

Il a dès lors acquis une base expérimentale solide et peut se lancer dans des conceptions mathématiques de synthèse.


La mécanique ondulatoire

Les travaux de Huygens* et de Fresnel* avaient, au début du xixe s., fait triompher la théorie ondulatoire de la lumière, provoquant l’abandon de la théorie de l’émission de Newton*. En 1865, Maxwell* en avait donné sa célèbre interprétation électromagnétique. L’énergie lumineuse était alors considérée comme répartie dans l’espace de façon continue. Ainsi s’interprétaient fort simplement les phénomènes de polarisation, d’interférences et de diffraction. Mais la découverte par Hertz*, en 1887, de l’effet photoélectrique remettait les choses en question. Elle montrait que les échanges d’énergie entre le rayonnement et la matière mettent en jeu des quantités discontinues. Einstein*, tout en indiquant, en 1905, que cet effet exigeait un retour à une théorie corpusculaire, n’avait pu expliquer pourquoi certains phénomènes lumineux imposaient l’existence d’ondes et certains autres celle de particules.

Se fondant sur l’analogie de certains principes de la mécanique et de l’optique, Louis de Broglie pense qu’il est possible d’édifier une théorie commune de ces deux domaines de la physique, apparemment si différents. Dès 1922 paraissent ses premières communications sur la « mécanique ondulatoire » dans les publications de l’Académie des sciences. En 1924, il les précise dans sa thèse de doctorat Recherches sur la théorie des quanta. Il suppose qu’à toute particule en mouvement est associée une onde, dont la longueur est liée à la masse et à la vitesse de la particule par une formule simple où figure la constante de Planck*. Cette longueur d’onde permet de prévoir le mouvement de la particule, tout comme la longueur d’onde optique le fait pour la marche du rayon lumineux. De là résulte cette conséquence inattendue qu’un flux de corpuscules doit pouvoir être diffracté à l’instar d’un faisceau de lumière.

Une théorie si audacieuse soulève un vif intérêt ; toutefois, elle ne peut manquer d’effrayer les partisans de la physique classique, qui demeurent poliment incrédules. Interrogé, Jean Perrin*, qui préside le jury de thèse, se borne à répondre : « Tout ce que je puis dire, c’est que Monsieur Louis de Broglie est certainement très intelligent. » Et Lorentz* prévient Maurice de Broglie que son frère fait fausse route. Mais, lorsque, trois ans plus tard, les Américains Clinton Joseph Davisson et Lester Halbert Germer, puis l’Anglais G. P. Thomson réussissent à diffracter des électrons par une lame cristalline, cette théorie ne peut manquer de rencontrer une unanime approbation. Aussi, le prix Nobel de physique est-il, en 1929, attribué à Louis de Broglie. Celui-ci, chargé d’un cours à l’institut Henri-Poincaré, nouvellement créé, devient en 1932 titulaire de la chaire de physique théorique à la Faculté des sciences de Paris. Il entre en 1933 à l’Académie des sciences, dont il devient en 1942 le secrétaire perpétuel, puis est élu à l’Académie française en 1944.

Cependant, la mécanique ondulatoire devient un sujet auquel s’attellent de nombreux chercheurs ; elle est notamment développée par Schrödinger et par Max Born. Elle va conduire à des applications du plus haut intérêt, comme l’analyse et l’optique électroniques. La première donne des renseignements précieux sur la structure des corps solides ; la seconde permet l’élaboration de microscopes, qui marqueront d’énormes progrès dans la connaissance de l’infiniment petit. Les chimistes y trouveront les raisons de la cohésion moléculaire.


Autour de Louis de Broglie

L’initiateur


Le duc Maurice de Broglie

(Paris 1875 - Neuilly-sur-Seine 1960). Frère aîné de Louis de Broglie, il est d’abord officier de marine, puis il démissionne en 1904 pour se consacrer à la science. Il crée chez lui un laboratoire ouvert à de nombreux chercheurs travaillant sur les rayons X et obtient une chaire au Collège de France. Il imagine, pour classer les rayons X suivant leurs longueurs d’onde, la méthode du cristal tournant et, en 1921, il découvre l’effet photo-électrique nucléaire. (Acad. des sc., 1924 ; Acad. fr., 1934.)

Les vérificateurs


Clinton Joseph Davisson,

physicien américain (Bloomington, Illinois, 1881 - Charlottesville, Virginie, 1958). Travaillant avec Lester Halbert Germer (1896-1971) aux laboratoires des téléphones Bell à New York, il réussit en 1927 à vérifier la théorie de la mécanique ondulatoire en diffractant des électrons sur des microcristaux de nickel. (Prix Nobel de physique, avec G. P. Thomson, en 1937.)


George Paget Thomson.

V. Thomson (sir Joseph John).