Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

bouddhisme (suite)

jōdo-shinshū

Un des disciples de Hōnen, Shinran (appelé aussi Zenshin et Shakku [1173-1262]), provoqua à la mort de son maître (1212) un schisme au sein de la secte du jōdo en publiant son enseignement du Kyō-gyōshinhō (doctrine, pratique, foi et réalisation) en 1224. Trente ans après la mort de Shinran, un fidèle auditeur de ce dernier résuma cet enseignement dans un opuscule intitulé Tannishō (opuscule sur les hétérodoxies déplorables). Ce texte devait devenir l’un des plus importants de la nouvelle secte, qui prit alors le nom de « jōdo-shinshū » ou « vraie secte de la Terre pure ». Dans ses enseignements, Shinran préconisait une vérité double (shintai, zokutai : foi et moralité) ; il affirmait que le seul fait d’avoir foi dans le vœu originel d’Amida (lequel était de sauver tous les êtres quels qu’ils soient) et de réciter le nembutsu avec sincérité suffisait à assurer la renaissance dans le paradis d’Amida. La Vérité est alors de se reposer de tout cœur sur le pouvoir supérieur du vœu originel d’Amida en laissant de côté toute idée personnelle.

Une originalité de la nouvelle secte était que ses religieux avaient le droit de se marier, afin d’effacer la division traditionnelle existant entre le clergé et le monde laïque. Ippen Shōnin (appelé parfois Yūgyō Shōnin [1239-1289]), un ancien moine du tendai, déclara à son tour que, les kami shintō étant des manifestations des bouddhas et des bodhisattvas, on pouvait aussi bien leur adresser le nembutsu. Il prêchait un abandon total en Amida et, de ce fait, ajouta le mysticisme au piétisme du jōdo. Au xve s., Rennyo (1415-1499), continuateur de Shinran, assurera de même que la récitation du nembutsu sans foi est inutile. Ceux qui s’opposaient à ses vues, notamment pendant la période de guerres civiles qui ensanglantèrent le Japon du milieu du xve s. jusqu’au milieu du xvie (Sengoku-jidai, « époque du pays en guerre »), donnèrent à ses partisans le nom d’« ikkō » (ceux qui se tournent d’un seul côté). Ces ikkō, organisés en ligues (ikkō-ikki), s’armèrent afin de résister aux attaques des autres sectes et à celles des puissances séculières. La foi des prédicateurs du jōdo-shinshū était intense, et leurs prédications étaient énergiques. À cette époque, cette secte connut une extension prodigieuse. Les adeptes de la secte shin (comme on appelait alors par abréviation le jōdo-shinshū), bien que mêlant à leur foi des principes confucianistes et politiques, refusaient de vénérer les nombreuses divinités du panthéon bouddhique et, en principe, n’admettaient que l’image du bouddha Amida.


zen-shū

La doctrine du zen (chan, ou tch’an en chinois), abréviation de zenna, transcription japonaise du sanskrit dhyāna (méditation), peut être résumée en ces mots : « C’est une transmission d’une nature spéciale en dehors de tout enseignement et qui ne s’appuie sur aucun mot ; il faut donc bien reconnaître la nature de la pensée humaine en soi-même si l’on veut devenir un bouddha » (R. Fujishima). Cette doctrine fut importée de Chine en 1191 par le moine Eisai (Senkō Kokushi [1141-1215]), qui établit au Japon la secte Rinzai (Huang-long, ou Linji en chinois), et par le moine Dōgen (Buppō Zenji, mort en 1253, de son nom posthume Shōyō Daishi), qui, à son retour de Chine en 1227, établit la secte sōtō (ou sōdō, caodong, ou ts’ao-tong en chinois). Vers 1650, un religieux chinois importa au Japon une autre secte, appelée « ōbaku », se réclamant, elle aussi, des doctrines du zen. L’enseignement du dhyāna aurait été, selon la tradition, transmis par un des grands disciples du bouddha Śākyamuni, Kaśyapa (Makakashō), à un autre disciple, Ānanda (Ananda), et, à travers vingt-huit patriarches successifs, jusqu’à Bodhidharma (Bodaidaruma), qui, toujours selon une tradition historique douteuse, l’aurait introduit d’Inde en Chine en 520. Le zen propose une méthode de libération originale fondée plus sur l’expérience que sur l’étude des textes. Il proclame que la nature du Bouddha est dans tous les êtres et en dehors des classifications morales ordinaires : le seul moyen d’atteindre au satori, à la « pensée dégagée de toute diversité », est de méditer sur la pensée individuelle. Cette secte, par son refus de la tradition et que l’on a classée dans les sectes bouddhiques, devrait constituer une catégorie philosophique à part, bien qu’elle se réclame parfois du Bouddha historique.


nichiren-shū

Fils d’un pauvre pêcheur, Nichiren (de son nom véritable Zennichi Maru, de son nom de religieux Renchō, de son nom posthume Risshō Daishi [1222-1282]) fut élevé dans les principes de la secte jōdo. Ordonné moine, il se mit à concevoir des doutes quant à la réelle efficacité de la pratique du nembutsu et s’attacha, parfois très violemment, à vouloir redonner au bouddhisme du tendai sa pureté première. Il quitta le mont Hiei et, refusant les doctrines ésotériques du tendai, commença, en 1253, à prêcher sa propre doctrine, tout entière fondée sur le Sūtra du lotus (Saddharmapuṇḍarika sūtra, Hokke-kyō) et sur trois grands principes : l’objet du culte (c’est-à-dire le Sūtra du lotus), les sens moraux, qu’il affirmait se trouver dans l’invocation au titre du sūtra (Namu Myōhōrenge-kyō, « Au nom sacré du Sūtra du lotus de la Bonne Loi »), et l’identification de sa doctrine avec le devenir du Japon. Il exposa ce dernier principe dans son Risshō Ankokuron (« Traité sur la stabilisation de l’État par l’établissement de l’orthodoxie »), écrit en 1260. Douze ans après, il écrivit son Kaimokushō (« Traité qui ouvre les yeux ») ainsi que d’autres ouvrages sur les relations qui, selon lui, devaient exister entre la religion et le gouvernement (Shuga Kokkaron, « Traité pour la protection de l’État »), sur les remèdes contre les calamités (Sainan Taiji), combattant violemment toutes les autres sectes. Afin de matérialiser ses idées, il adopta un maṇḍala déjà utilisé par la secte tendai, où, autour de la formule « Namu Myōhōrengekyō » placée au centre des quatre orients, il plaça Śākyamuni et Prabhūtaratna. Dans l’ensemble, sa doctrine n’était pas essentiellement différente de celle du tendai prêchée par Saichō. Ses successeurs, Nichiji (1250 - ?), Nisshin (1407-1488), Nichiō (1565-1630), déployèrent un grand zèle missionnaire. La formule mystique d’invocation au titre du sūtra du lotus connut un grand succès, surtout dans le peuple. Cette secte, vénérant principalement la personne de Shaka (le bouddha Śākyamuni) et, accessoirement, quelques divinités populaires, n’eut que très peu d’influence sur les classes aristocratiques.