Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

bombe nucléaire (suite)

Effets dus à l’onde de choc.
Ils se traduisent par deux phénomènes particuliers.
1. Surpression au voisinage du point zéro. À Hiroshima, on a enregistré à cet endroit une surpression de 30 à 50 t par mètre carré (3 à 5 bars), et on a constaté qu’à la phase positive de l’onde succédait une phase négative. Or, les bâtiments ordinaires supportent des surpressions de l’ordre de 500 bars, les ouvrages d’art, d’une ou plusieurs tonnes, mais aucune construction ne résiste à plusieurs dizaines de tonnes au mètre carré. (À l’air libre l’homme peut résister à une surpression allant jusqu’à 7 bars) ;
2. Le mur Mach. L’onde directe donne naissance au sol à une onde réfléchie, qui, se propageant dans un milieu porté à haute température, a tendance à aller plus vite que l’onde directe, à la rattraper et à la bousculer. L’interférence de l’onde réfléchie et de l’onde directe donne naissance à un phénomène complexe appelé effet Mach : tout se passe comme si un mur vertical se déplaçait à grande vitesse, détruisant tout sur son passage. En conclusion, auprès du point zéro, les immeubles sont détruits par la surpression verticale, plus loin ils sont renversés ou endommagés par le mur Mach. Ainsi, à Hiroshima, à 800 m du point zéro, toutes les constructions furent écrasées ; entre 800 et 1 600 m, elles furent renversées, et, jusqu’à 2 400 m, sérieusement endommagées, les effets se faisant sentir jusqu’à 3 200 m.

Effets radio-actifs.
Ils se propagent à la vitesse de la lumière. On distingue souvent la radio-activité instantanée de la radio-activité résiduelle, la première se manifestant dans la minute qui suit l’explosion. La fission des noyaux d’uranium 235 donne naissance à 300 ou 400 produits de fission, qui sont à l’origine des phénomènes communs radio-actifs de toutes les explosions nucléaires. La période de ces produits de fission est en général très courte (de la seconde à la minute), si bien que leur activité diminue très vite : à Hiroshima, les 800 000 MCi, une minute après l’explosion, n’étaient plus que 6 000 une heure après et 130 un jour plus tard. Parmi ces produits, une vingtaine ont une période supérieure à un an, tels le strontium 90 (28 ans), le césium 137 (30 ans), le carbone 14 (5 600 ans). Lors de l’explosion aérienne, il y a émission de rayonnement complexe, mais seuls les rayons gamma ainsi que les neutrons sont à prendre en considération.

À Hiroshima, les personnes irradiées ont souffert surtout de vomissements et d’hémorragies. Le malade n’a de chances de se rétablir que si la dose reçue (exprimée en röntgens), variable avec la distance du point zéro, n’a pas été trop forte (de 0 à 1 000 m, la dose de 600 à 800 R est mortelle). Un rapport, publié en 1967 par l’Académie des sciences américaine, précise :
— que les femmes enceintes qui avaient été exposées aux radiations ont donné naissance à de nombreux enfants microcéphales ou retardés, mais qu’il n’y a pas eu d’accroissement de malformations congénitales chez les enfants conçus de parents exposés aux radiations après les bombardements ;
— que des changements dans les chromosomes ont été trouvés chez un tiers des survivants sans que leur santé en soit affectée ;
— que les cataractes et autres affections des yeux ont été en nette augmentation, ainsi que les cancers de la thyroïde, particulièrement chez les femmes.

Les résultats observés à Hiroshima et à Nagasaki en 1945 ont permis de jeter les bases d’une protection valable : la plupart des victimes furent des brûlés et des blessés par les objets les plus divers transformés en projectiles par le souffle. Il faut cependant retenir qu’un abri relativement modeste protège efficacement des effets thermiques, que le moindre écran arrête, des éclats de toutes sortes et des retombées radio-actives.

9 août 1945, 11 h : bombardement de Nagasaki

La bombe larguée sur Nagasaki était au plutonium 239 et pesait 5 t. Sa masse critique, moins élevée que celle d’une bombe à l’uranium, était de l’ordre de 5 à 6 kg, avec un réflecteur de béryllium. Le nombre des victimes (26 000 morts, 40 000 blessés) fut moins élevé qu’à Hiroshima, car la région de Nagasaki est vallonnée ; d’autre part, l’alerte ayant été donnée, la population avait rejoint en grand nombre des abris rudimentaires.


Les bombes nucléaires de fusion

Après 1945, les Américains, possédant le monopole de l’arme nucléaire, continuèrent leurs expérimentations. En 1949, l’U. R. S. S. réussit à faire exploser sa première bombe de fission, et c’est en 1952 qu’apparurent aux États-Unis les armes de fusion avec lesquelles on abordait en équivalence énergétique de T. N. T. le domaine de la mégatonne, alors que les armes de fission ressortissaient à celui de la kilotonne.

Une arme de fusion comprend :
— le gros de la charge constitué par du deutérium. Il faut toutefois avoir un relais de tritium nécessaire pour obtenir des hautes températures (D + D exige 400 × 106 degrés, alors que D + T n’en exige que 50 × 106) ;
— une allumette, ou détonateur ;
— une enveloppe (uranium naturel en général) pour augmenter les phénomènes de fission.

Ainsi, une bombe de fusion est fission par son détonateur, fusion par le gros de la charge, fission par l’enveloppe, d’où son nom d’arme fission-fusion-fission et sa définition : une arme est dite « de fusion » quand l’énergie due au phénomène de fusion proprement dit est au moins le tiers de l’énergie totale dégagée.


Les premières bombes de fusion

Le 1er novembre 1952 explose la première bombe thermonucléaire américaine. Ayant la forme d’un cube de 7 à 8 m d’arête, pesant 65 t, son équivalence énergétique était de 10 à 14 Mt (le deutérium et le tritium se trouvaient vraisemblablement à l’état liquide). La boule de feu de cette explosion, qui avait 3 km de diamètre, fut visible une dizaine de secondes, le champignon atteignit 25 km de hauteur, l’îlot où eut lieu l’explosion (5 × 0,6 km) fut volatilisé.