Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Bengale (suite)

Politiquement, on peut distinguer trois stades dans la renaissance du Bengale. Avec Rām Mohan Roy, le réformisme prévaut : il ne s’agit encore que de demander une participation modérée des Indiens à leurs propres affaires. Dans un second temps, les revendications tendent à se radicaliser avec, à partir de 1870, Surendranāth Banerjī (1848-1925), qui, évincé injustement de l’Indian Civil Service, lance à Calcutta un vaste mouvement de protestation parmi les intellectuels. La troisième étape est marquée, après le partage du Bengale en 1905, par le développement du terrorisme comme moyen d’action politique, sous l’impulsion du Swāmi Kriṣṇavarma et de V. D. Sāvarkar. Même après la réunification du Bengale et les réformes Morley-Minto, le terrorisme s’y poursuit.


Le Bengale contemporain

Intimement lié au mouvement d’émancipation nationale, le Bengale allait ressentir avec acuité les problèmes indiens. Plusieurs raisons peuvent expliquer cette particulière sensibilité : antagonisme entre hindous et musulmans (communalisme), niveau culturel et politique nettement plus élevé au Bengale que dans le reste de l’Inde, situation économique particulièrement difficile, caractérisée par de nombreuses famines (3 millions de morts en 1942-43).

Réveillé lors du partage de 1905, le communalisme s’exacerba à l’approche de la partition de l’Inde en 1947. De nombreux massacres se produisirent : 2 000 morts à Calcutta en août 1946, 6 000 hindous tués au Bengale en octobre, représailles contre les musulmans. L’intervention de Gandhi arrêta momentanément le massacre.

En 1947, comme le souhaitait Jinnah, chef de la ligue musulmane fondée à Dacca en 1906, le Bengale fut partagé selon des critères religieux : le Bengale-Occidental (avec Calcutta) fut rattaché à l’Union indienne, et la partie est (capitale Dacca) devint le Pākistān oriental.

Le partage était une hérésie économique : ainsi, le Bengale oriental, grand producteur de jute, se trouvait séparé de Calcutta, où étaient la plupart des usines traitant ce textile. Très vite, la détérioration des rapports entre l’Union indienne et le Pākistān aggrava ces difficultés initiales.

Le Pākistān oriental, plus peuplé mais moins riche que le Bengale-Occidental, ethniquement et linguistiquement différent, tend à considérer son appartenance au Pākistān comme une sorte de néo-colonialisme. Cette évolution conduit au développement de l’influence de la ligue Awami, dirigée par le cheikh Mujibur Rahman : d’abord autonomiste, cette organisation en vient à prôner, dans sa majorité, le séparatisme. Elle remporte un succès éclatant aux élections de décembre 1970. En mars 1971, une insurrection vise à proclamer l’indépendance de la république du « Bangladesh » (« Bengale libre »). Elle est écrasée par les troupes d’Islāmābād, dont la répression entraîne l’exode vers l’Inde de près de dix millions de réfugiés. Cette situation amène un nouveau conflit armé entre le Pākistān et l’Inde, en décembre 1971 : après une victoire complète de cette dernière à l’est, le gouvernement du Bangladesh est installé à Dacca. Le cheikh Mujibur Rahman rentre peu après dans son pays, à la tête duquel il se trouve placé. Mais il trouve la mort dans un coup d’État en août 1975.

Le Bengale-Occidental, lui aussi, n’est pas épargné. Ces dernières années, l’armée indienne a dû y rétablir six fois l’ordre. Là aussi les difficultés économiques sont aggravées — sinon provoquées — par les crises politiques et les troubles qui fréquemment paralysent l’activité de cet État. Mis ces dernières années en minorité, le parti du Congrès a été remplacé par une coalition gouvernementale de quatorze partis de gauche, dont les plus importants sont : le Banglā Congress (formé de dissidents du parti du Congrès) ; le parti communiste, prosoviétique ; le parti communiste marxiste. Au début de 1970, cette coalition éclate et le gouvernement de Delhi place l’État du Bengale sous son autorité. De plus, une tendance maoïste (le mouvement naxaliste) s’est développée : des paysans encadrés par des étudiants de Calcutta se livrent à divers coups de main contre les grands propriétaires.

J. K.

➙ Calcutta / Inde / Pākistān / Pākistān oriental.

 A. Gupta (sous la dir. de), Studies in the Bengal Renaissance (Calcutta, 1958). / N. K. Sinka, The History of Bengal (Calcutta, 1960). / J. H. Broomfield, Elite Conflict in a Plural Society : Twentieth Century Bengal (Berkeley, Calif., 1968). / N. S. Bose, The Indian Awakening Bengal (Calcutta, 1969).

Ben Gourion (David)

Homme d’État israélien (Płońsk, Pologne, 1886 - Tel-Aviv 1973).


Très jeune encore, il milite dans le mouvement sioniste, s’installe en Palestine dès 1906 et participe à la fondation des « Travailleurs de Sion » (Poale Tsione), groupement d’inspiration socialiste dont il est le premier président ; membre du comité central de ce groupement, il prend part au développement de différentes colonies agricoles comme travailleur agricole et comme surveillant. En 1910, il s’installe à Jérusalem, s’adonnant activement à l’organisation du parti des « Travailleurs de Sion » ; il contribue également à la rédaction de l’hebdomadaire l’Unité (Ha-ahdouth). En 1912, il se rend à Istanbul pour y faire des études de droit. De retour en Palestine dès 1914, il est expulsé par les autorités turques en 1915 et s’installe alors aux États-Unis, où il participe activement au mouvement sioniste travailliste, militant notamment pour le recrutement des volontaires de la Légion juive. C’est comme membre de cette formation militaire sous commandement britannique que Ben Gourion se retrouve en Palestine en 1918. En 1920, il est l’un des chefs du mouvement travailliste, qui se constituera, par la suite, en parti politique, connu sous le nom de Mapai : il ne cessera d’en être le principal animateur. Il assume les fonctions de secrétaire général de la Fédération générale des travailleurs en Israël, l’Histadrouth (1921-1935), qui groupera en 1964 plus de 800 000 membres. Président de l’exécutif sioniste et de l’exécutif de l’Agence juive (1935-1948), Ben Gourion fait adopter dès 1942 par le mouvement sioniste le programme visant à l’installation d’un État juif en Palestine. Son action tenace aboutit à la résolution de l’O. N. U. recommandant, en novembre 1947, l’établissement d’un État juif dans une partie de la Palestine. Le gouvernement provisoire présidé par Ben Gourion proclame l’État d’Israël le 14 mai 1948. Cumulant les fonctions de Premier ministre et de ministre de la Défense, Ben Gourion est l’animateur de la jeune armée d’Israël, qui résiste victorieusement aux armées arabes. Il fait partie du gouvernement israélien jusqu’en décembre 1953, date à laquelle il résigne ses fonctions pour se retirer dans le kibbouts de Sede Boker, colonie agricole située dans le sud du pays (désert du Néguev). En février 1955, il revient au gouvernement comme ministre de la Défense, et comme président du Conseil en novembre de la même année ; il joue un rôle prépondérant en 1956 lors de la campagne du Sinaï (expédition de Suez). Il prend une retraite définitive en 1963, mais continue néanmoins à jouer un rôle actif dans la vie du pays, comme leader d’un groupe socialiste dissident (1965) connu sous le nom de « Liste des travailleurs d’Israël » (Rafi).