Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Belgique (suite)

Sculpture

Les ivoires préludent à la sculpture monumentale : au relief atténué du diptyque de Genoelselderen (v. 780, musées royaux, Bruxelles) succède le modelé de l’évangéliaire de Notger (fin du xe s.). Les premières œuvres en bois sont encore traitées en surface (Christ du cloître de Tongres, xie s.). La sculpture monumentale n’est pas d’une grande originalité : l’école scaldienne a une facture sèche et méplate (psychomachie de la porte Mantille à la cathédrale de Tournai) ; l’école mosane est très féconde, mais elle est desservie par la fragilité des pierres (porche Samson à la collégiale de Nivelles). Le souvenir des stèles gallo-romaines apparaît dans la madone de Dom Rupert (xiie s., musée Curtius, Liège).

Les grands sculpteurs de l’époque romane sont les orfèvres et dinandiers mosans, aux traditions plusieurs fois séculaires (v. mosan [art]). L’aisance, la liberté d’allure, la grâce de leurs créations leur donnent une suprématie internationale : Renier de Huy (fonts baptismaux de Saint-Barthélémy de Liège, 1108) ; Godefroid de Huy (chef reliquaire de saint Alexandre, v. 1145, musée du Cinquantenaire, Bruxelles) ; Nicolas de Verdun (ambon de Klosterneuburg, 1181).


Période gothique


Architecture

Les franchises accordées aux bourgeois et l’organisation du commerce international développent le caractère urbain de l’économie flamande et favorisent l’apparition du nouveau style venu de France. Les premiers caractères s’infiltrent à Tournai (chapelle Saint-Vincent, 1198), dont l’évêque a été abbé de Sainte-Geneviève à Paris.

L’impulsion est donnée par les abbayes cisterciennes : Orval (1070), Villers-la-Ville (1146), Koksijde (1214). Un nouveau centre artistique, lié à l’extension de la maison de Bourgogne, se développe : le Brabant. Dans l’ensemble du pays, les édifices ont une tendance à l’horizontalisme, contrebalancée par l’élan magistral des tours ; après les grandes réalisations ogivales, le style flamboyant connaîtra une faveur durable. Bien que les caractères locaux aillent en s’atténuant, on distingue deux tendances majeures : scaldienne et brabançonne.

Le gothique scaldien (tour centrale, galeries de circulation, fenêtres à triplets) évolue depuis Bouvines (1214) dans le sillage de l’art français. L’influence vient de Champagne, puis des grandes cathédrales, Amiens, Soissons, etc. ; les principaux monuments sont Saint-Nicolas de Gand (1200-1235), Saint-Martin d’Ypres (1221), Notre-Dame de Bruges. La Flandre maritime se distingue par l’emploi de la brique (église de Lissewege) et les « hallenkerke » à trois nefs d’égale hauteur (Saint-Nicolas de Furnes).

Le gothique brabançon (pignons triangulaires, supports robustes, tours, porches, parfois absence de transepts) se développe à partir de 1350 ; il atteint son apogée pendant la période bourguignonne et rayonne au-delà de ses limites géographiques. Citons Saint-Rombaut de Malines* (1355), Notre-Dame d’Anvers* (xive-xvie s., la plus vaste de Belgique avec ses sept nefs), Sainte-Waudru de Mons, Sainte-Gudule de Bruxelles*. La famille des Keldermans participe pendant plus d’un siècle au développement du gothique flamboyant brabançon.

La région mosane a perdu sa suprématie de l’époque romane, mais compte quelques beaux monuments de style flamboyant, tel Saint-Jacques de Liège (1418-1538).

L’architecture civile, par l’ampleur et la richesse des halles (Ypres, 1201-1304 ; Malines, 1320), des beffrois (Tournai, xiie-xiiie s. ; Gand, 1321), des hôpitaux (la Byloke à Gand) et des hôtels de ville (Louvain*, 1448 ; Bruxelles, 1449), est à l’image de la puissance commerciale des anciens Pays-Bas du Sud. Les maisons particulières, généralement en brique, ont des pignons à ressauts (Tournai, Bruges, Gand).

L’importance et le nombre des édifices élevés pendant le Moyen Âge gothique entraînent une fidélité à ce type de structure, qui, dans certaines régions (Limbourg), se prolongera jusqu’au xixe s.


Sculpture

La période de transition roman-gothique est illustrée par la Vierge en majesté de Saint-Jean de Liège (thème iconographique roman, mais longs plis coulants, caractéristiques des années 1200). Abandonnant son aspect frontal et rigide, la sculpture évolue vers plus de mouvement et de finesse sous l’influence de l’art de Chartres (portail de l’hôpital Saint-Jean de Bruges), de Paris (portail ouest de Tournai) ou de Reims (chapelles de Saint-Rombaut de Malines).

À Tournai se développe un centre de sculpture funéraire qui est à l’origine des premières effigies individualisées. La sculpture profane apparaît avec la statue dite « l’homme du beffroi » de Gand (1338). Certains artistes émigrent en France : Jean Pépin d’Huy (xive s.), auteur du gisant de Robert d’Artois à Saint-Denis ; Jean de Liège († 1382 ; actif à la cour de Charles V), auteur du gisant de Jeanne d’Evreux (Louvre), chez lequel apparaît un réalisme expressif, auquel Claus Sluter* va donner une ampleur monumentale. Né à Haarlem, actif à Bruxelles de 1379 à 1383 ou 1385, Sluter domine ses contemporains ; la franchise de l’observation, l’épaisseur et le rythme des corps dans l’espace qui caractérisent les œuvres commandées en 1383 par Philippe le Hardi pour la chartreuse de Champmol (v. Dijon) influenceront non seulement la sculpture brabançonne, mais toute l’Europe septentrionale.

Au xve s., réalisme et mouvement marquent la sculpture en bois (retables polychromes, stalles, calvaires). À Anvers et à Bruxelles (atelier des Jean Borman père et fils), les retables sont l’objet d’une véritable industrie destinée à l’exportation. On peut citer parmi les plus riches ceux de Villers-la-Ville (1470) et de Léau (1480). Dinant continue à fournir l’Europe entière d’aquamaniles, de lutrins et de fonts baptismaux en cuivre et en laiton.


Peinture

La prodigieuse originalité de la peinture de chevalet au xve s. n’est annoncée ni par la peinture murale (fresques du transept de la cathédrale de Tournai, début du xiiie s., et du réfectoire de l’ancienne abbaye de la Byloke à Gand, début du xive s.) ni par les premiers panneaux peints (calvaire des Tanneurs, Bruges, fin du xive s.). Il faut plutôt en chercher les prémices dans les miniatures dont le destin est étroitement lié, au xive s. et au début du xve, à celui de l’enluminure française, car les cours de Charles V et de ses frères attirent les meilleurs artistes du Nord : Jacquemart de Hesdin, le sculpteur et peintre André Beauneveu*, Jakob Coene et ces trois frères de Limbourg qui ouvrent une voie nouvelle dans la conception de la perspective (v. Berry [Jean de]).