Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

beauté (soins de) (suite)

Facteurs commerciaux

L’expansion des cosmétiques à travers le monde se fit par le canal des grands courants commerciaux noués entre l’Orient et l’Occident, puis entre le Nouveau Monde et l’Ancien. Le contact avec l’Orient, producteur de matières premières, fut d’abord assuré par l’Égypte antique, qui traitait ses produits sur place avant de les confier aux navigateurs, puis dès le xe s. par Venise, dont le commerce avec Alexandrie fut favorisé par les croisades. Au xvie s., l’Orient fut supplanté par l’Amérique, et Lisbonne remplaça Venise.

Les croisades développèrent en France le commerce des parfums avec l’introduction des peaux odoriférantes destinées à la confection de gants. Leur trafic fut exercé par les maîtres gantiers, organisés en corporation en 1190. Mais des querelles pour la vente des parfums opposèrent gantiers et merciers, au xvie s, et aboutirent, au xviie, à l’octroi de lettres patentes (1614-1656) qui reconnurent aux seuls gantiers le titre de « parfumeur ». Ils ne pouvaient vendre, en leur échoppe, que des produits fabriqués par eux.

Au xviiie s., le commerce des cosmétiques est florissant en France, où l’on vend jusqu’à deux millions de pots de rouge par an, et où des exportations se font vers l’Angleterre et la Prusse. On note l’apparition de parfumeurs célèbres tels que Jean-Marie Farina et Jean-François Houbigant et, au xixe s., celle d’Edouard Pinaud, Louis-Toussaint Pivert et Pierre-François Pascal Guerlain, parfumeur de L’impératrice.

Artisanale jusqu’à la fin du xixe s., la production évoluera par la suite vers le stade industriel, sous l’influence de facteurs scientifiques et de facteurs sociaux.


Facteurs sociaux

Fruit de l’imagination individuelle ou produit d’un artisanat local, les cosmétiques furent réservés, pendant des siècles, aux classes sociales dont les moyens et la forme de vie en justifiaient l’emploi. L’industrialisation de ces produits, qui provoqua un abaissement du prix de revient, ne pouvait manquer d’opérer un véritable bouleversement dans leur diffusion, mais il fallut attendre le lendemain de la Seconde Guerre mondiale pour que cette production de masse, désormais possible, trouvât les débouchés correspondants. Grâce à l’amélioration du niveau de vie, qui contribua au développement de l’hygiène, ces produits devinrent accessibles à la grande majorité. Leur implantation dans les mœurs allait s’accompagner d’une véritable campagne d’information auprès du public, favorisée par l’urbanisation ; la publicité pouvait ainsi plus facilement atteindre les foules et développer chez les citadins un phénomène de mimétisme esthétique. Celui-ci allait trouver un terrain d’élection chez les jeunes. Leur indépendance, leur pouvoir d’achat, nouveau sur le marché, et leur aptitude aux changements ont amené la création de produits de beauté à leur intention. Ils ont marqué dans le maquillage un retour à des teintes plus naturelles, démodées, en 1972, par le regain du style 1925. Chez les adultes, la société de consommation a suscité de nouveaux besoins. Sous l’influence des États-Unis, une clientèle masculine des cosmétiques se développe en France. La clientèle féminine s’est elle-même élargie. Les femmes d’un certain âge continuent à soigner leur aspect physique ; d’autre part, l’instauration du travail féminin les a incitées à la pratique des soins de beauté, ceux-ci ayant souvent, désormais, une fonction professionnelle.

Cet intérêt du public pour la cosmétique est entretenu par une presse spécialisée, qui joint aux consignes de la mode des renseignements et des conseils d’ordre pratique. Enfin, signe des temps, hygiène et beauté sont associées, dans maintes annonces publicitaires, à l’idée de détente.


Industrie de la parfumerie

Elle a trait non seulement aux produits alcoolisés (essences, lotions), mais également aux produits de toilette, aux produits capillaires et aux produits de beauté. Cette industrie est constituée par une majorité d’entreprises de moyenne importance : en 1970, 4 entreprises, en France, font plus de 200 millions de chiffre d’affaires ; 9 font de 100 à 200 millions ; 43 de 5 à 10 millions ; 108 de 1 à 5 millions ; 241 moins de 1 million. Parmi les affaires mondiales les plus importantes, il faut mentionner : Avon et Revlon aux États-Unis, l’Oréal pour la France et Shiseido pour le Japon. L’industrie des parfums est localisée à la périphérie des grandes capitales européennes, notamment, en France, dans la banlieue ouest de Paris. Toutefois, tributaire de la production florale, l’industrie française possède une vingtaine d’usines aux environs de Grasse. De Golfe-Juan aux collines du Var, 1 million d’hectares sont réservés à la culture des plantes à parfums, entre autres la lavande et le lavandin, qui sont traités sur place. On y traite également de la concrète et des fleurs en provenance d’Afrique du Nord et d’Asie, et des produits animaux naturels tels que le musc du Tibet et la civette d’Éthiopie ; 40 p. 100 de la production sont destinés à la région parisienne, et 60 p. 100 à l’exportation. En 1976, la culture florale, à l’exception de la lavande, a tendance à régresser faute de main-d’œuvre et aussi parce que la transformation de terres de culture en terrains à bâtir est hautement rentable.

Cette industrie a été l’objet d’investissements étrangers, en particulier américains. Ils se sont traduits soit par des accords d’exploitation et de distribution applicables seulement aux États-Unis, soit par des achats d’actions pour les affaires cotées en Bourse (Coty, Révillon), ce qui conserve intactes les structures de gestion, soit encore par la création d’une filiale française, comme cela s’est produit pour les parfums Yves Saint-Laurent, filiale de Charles of the Ritz, qui est chargée d’assurer la distribution à travers le monde. En 1974, 29,8 p. 100 de la parfumerie française se trouvaient déjà sous contrôle étranger.