Beaune (suite)
Castrum gallo-romain au pied des sources qui jaillissent de la Côte d’Or, au croisement de deux grandes voies, Beaune entre dans l’histoire avec les ducs capétiens de Bourgogne, qui la choisissent pour capitale. Depuis l’époque romane, chaque siècle y a laissé une trace monumentale, soit dans la ville, dotée d’une nouvelle enceinte au xive s., soit dans les sept faubourgs (vignerons, corroyeurs, aubergistes, etc.), qui gardent une large part de leur aspect ancien. Aux xiie et xiiie s. on doit l’église Notre-Dame, bel exemple de roman bourguignon à berceaux brisés et triforium, et aussi les maisons de la rue Sainte-Marguerite, l’église Saint-Nicolas dans le faubourg du même nom, le cloître des Cordeliers ; à la fin du Moyen Âge — la grande époque de Beaune malgré la préférence accordée à Dijon par les ducs Valois —, outre l’hôtel-Dieu, le palais ducal, devenu musée du Vin de Bourgogne, et l’hôtel de Saulx. Ensuite, malgré le transfert du parlement à Dijon — marque de la rancune de Louis XI contre la ville, fidèle aux « grands ducs d’Occident » —, malgré les troubles des guerres religieuses, la Renaissance est évoquée par une belle série de maisons et d’hôtels (celui de la Rochepot, ceux de la rue de Lorraine). De l’époque classique, Beaune conserve la série des couvents (Oratoire, aujourd’hui lycée, avec sa chapelle et son grand escalier, Ursulines, abritant l’hôtel de ville et le petit musée des Beaux-Arts, etc.), qui attestent la renaissance catholique du xviie s., le majestueux hôtel de la sous-préfecture, ceux de la rue des Tonneliers et l’arc de triomphe (porte Saint-Nicolas) élevé à partir de 1762 à l’entrée de la ville.
Le joyau de cet ensemble reste l’hôtel-Dieu, qui ressuscite, cas unique en France, les structures et le décor d’un hôpital du xve s. Il fut fondé en 1443 par le chancelier de Bourgogne, Nicolas Rolin, et sa femme Guigone de Salins ; ceux-ci appelèrent pour le desservir des religieuses de Malines, dont le costume aux lourdes draperies et les hennins se sont perpétués. L’hôpital garde sa cour à galeries de bois, ses hautes toitures coupées de lucarnes aiguës, ses cuisines, l’imposant vaisseau couvert en carène renversée de la grande salle, à la fois chapelle et salle des malades, les trente tentures à fond rouge ornées de tourterelles et d’armoiries envoyées de Flandre pour décorer les lits aux grandes fêtes. C’est pour l’autel de la chapelle que Rolin commanda à Rogier Van der Weyden* le polyptyque du Jugement dernier, œuvre maîtresse de la peinture flamande du milieu du xve s.
Le mécénat des Rolin fut poursuivi par leur fils Jean, le cardinal : celui-ci commanda en 1474 au Bourguignon (?) Pierre Spicre les cartons d’une Histoire de la Vierge, tissée en cinq pièces, qui sont le principal et magnifique trésor de l’église Notre-Dame.
P. G.
➙ Bourgogne / Côte-d’Or.
A. Kleinclousz, Dijon et Beaune (Laurens, 1907). / H. Stein, l’Hôtel-Dieu de Beaune (Laurens, 1934). / A. Leflaive, l’Hôtel-Dieu de Beaune et les Hospitalières (Grasset, 1959). / R. Marconnet, Beaune (Zodiaque, La Pierre-qui-Vire, 1968).