Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

batellerie (suite)

Apparition de la vapeur

Dès la fin du xviiie s. commencent les essais d’utilisation de la vapeur, auxquels vont s’attacher entre autres les noms de Claude François Jouffroy d’Abbans (1751-1832) et de Robert Fulton (1765-1815), mais c’est seulement au début du xixe s. que se développent, aux États-Unis, en Angleterre, puis en France, les flottes fluviales à vapeur. Sous la Restauration se constituent les premières compagnies pour l’exploitation sur la Seine d’un service par vapeurs à aubes pour passagers et marchandises. D’autres se créent sur la Garonne, la Loire, la Saône et le Rhône. Mais le transport fluvial des marchandises ne pourra prendre tout son essor qu’après l’invention de procédés permettant la traction de bateaux lourdement chargés.


Procédés de traction


Le touage

Une chaîne immergée dans le lit de la voie d’eau et fixée à ses deux extrémités s’enroule sur le tambour d’un treuil placé sur un engin flottant, le « toueur ». Le treuil, étant mis en action par une machine à vapeur ou un moteur, peut assurer la traction d’un convoi de trente à quarante péniches. Ce procédé, dont la première application pratique date de 1850, est maintenant abandonné, sauf sur deux parcours en tunnel, où il est obligatoire pour des raisons de sécurité.


La traction sur berge

La traction traditionnelle par cheval ou mulet, logé la nuit à bord, subsiste pendant tout le xixe s. et même, sur certaines voies secondaires, jusqu’au milieu du xxe s., bien que, dès 1873, la traction par locomotives à vapeur ait fait son apparition. En 1895 est inaugurée la traction par « cheval électrique » roulant directement sur la berge, mais, pour les voies à fort trafic, la préférence est bientôt donnée aux tracteurs électriques sur rail. Il existe aussi des tracteurs Diesel sur pneus. La bonne exploitation des services de traction étant peu compatible avec la multiplicité des entreprises, leur regroupement en deux sociétés ayant chacune son domaine est, après de longs efforts, consacré par un décret de 1953, au moment même où s’amorce la disparition du procédé, qui est maintenant complète.


Le remorquage

Le développement du remorquage à vapeur commence au milieu du xixe s. sur les fleuves et les rivières, le long desquels la traction sur berge est souvent impossible. En revanche, le remorquage est absolument proscrit sur les canaux, dont il détériorerait la cuvette. Sur la Marne, l’Oise et la Seine circulent des remorqueurs à vapeur, puis à moteur propulsés par hélice et tirant des trains de six à neuf péniches. Une puissance variant de 250 à 750 ch suffit généralement sur ces voies à assez faible courant, mais il n’en est pas de même sur le Rhône et le Rhin, où elle peut dépasser 2 000 ch. En raison du faible tirant d’eau à l’étiage, il s’agit là de propulsion initialement par aubes, puis par hélices multiples sous voûte. Les remorqueurs sont en voie de disparition rapide depuis le développement des automoteurs et du poussage. Certains d’entre eux sont d’ailleurs transformés en pousseurs.

• Bateaux remorqués et automoteurs. La structure et les dimensions des bateaux porteurs remorqués dépendent de la nature du trafic qu’ils assurent et des caractéristiques des voies d’eau sur lesquelles ils circulent. Il s’agit, en général pour la France, de bateaux à fond plat et de faible hauteur, dont le type de beaucoup le plus répandu est la péniche flamande (longueur 38,50 m, largeur 5 m, creux 2,50 m à 3 m, port en lourd maximal 400 t). La construction en bois, encore générale en 1914, est depuis abandonnée au profit de l’acier. Ces péniches correspondent aux normes des voies d’eau de première catégorie du plan Freycinet (1879), mais sur la Seine, le Rhône et le Rhin se rencontrent de grands chalands appartenant notamment au type qui s’est le plus couramment généralisé entre les deux guerres aussi bien en Allemagne, en Belgique, en Hollande qu’en France. Longs de 80 m et larges de 9,50 m, ils peuvent porter de 1 350 à 1 500 t. Quant à l’automoteur, bien qu’impliquant un investissement et un coût d’exploitation plus élevés que ceux d’un bateau tracté, il présente, du fait de son autonomie, une grande souplesse d’utilisation. Il est aussi plus rapide que les convois remorqués. Le nombre des automoteurs s’est accru très rapidement entre les deux guerres, mais le développement du poussage fait maintenant décroître son importance sur les voies à grand gabarit.


Le poussage

Ce procédé, appliqué depuis longtemps aux États-Unis, reçoit en France ses premières applications en 1957. Il consiste à former un convoi composé d’un pousseur de forme rectangulaire et de plusieurs barges, étroitement liées entre elles, généralement deux par deux. Le rendement énergétique est supérieur à celui du remorquage, et ce procédé présente certains avantages de manœuvre. L’effectif nécessaire est très réduit, car il n’y a personne sur les barges poussées. D’autre part, on peut naviguer nuit et jour en procédant à des relèves d’équipages incompatibles avec le régime de travail de la batellerie traditionnelle et, notamment, le logement à bord des familles. L’utilisation courante du radar donne une meilleure sécurité. L’ensemble de ces dispositions aboutit à une forte réduction de la durée du transport. Bien que le plein effet des avantages offerts par le poussage ne soit obtenu que sur les voies permettant la circulation de grands convois, certaines applications en sont possibles ailleurs. Il existe des barges pouvant être munies d’un groupe motopropulseur amovible, ce qui permet leur autopropulsion sur les canaux et leur poussage sur les grandes voies. Enfin, sur certaines voies secondaires, on peut pratiquer le poussage d’une péniche par un automoteur. Sur la Seine, la longueur des barges courantes est d’une soixantaine de mètres et leur port en lourd de 1 800 t. Sur le Rhin et la Moselle, leur longueur est généralement de 76,50 m et leur port en lourd peut dépasser 2 000 t lorsque le niveau du fleuve permet l’enfoncement correspondant.