Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

bâtardeau (suite)

Enceinte de palplanches à double rideau. Dans le cas où la largeur de l’ouvrage à protéger est assez restreinte, on établit deux rideaux de front, qui se font vis-à-vis, avec les étais nécessaires entre ces deux rideaux. Si le fond du bâtardeau n’est pas imperméable, on arrête toute venue d’eau par sous-pressions, en coulant sur ce fond une dalle de béton qui fait obstacle aux sous-pressions, ou bien on procède à des injections de ciment, la coulée du béton sous l’eau s’effectuant au moyen de goulottes avec obturateur de pied s’ouvrant par le jeu d’un câble.


Bâtardeaux en béton

Il y a parfois lieu de recourir à des bâtardeaux en béton, soit du type « barrage-poids », soit du type « barrage-voûte ». Pour construire un barrage définitif, on limite l’espace du chantier par deux barrages-voûtes provisoires fonctionnant en débit de crue normale, mais non exceptionnelle, respectivement situés en amont et en aval, et tournant leur concavité vers la partie intérieure du chantier. En avant de ces deux barrages-voûtes, on établit deux rideaux de palplanches assurant une protection en période d’étiage ou de basses eaux.


Bâtardeaux pour souterrains par congélation du sol

Au sens strict, ce n’est pas un procédé d’établissement de bâtardeaux ; mais, en congelant le sol au moyen de tuyaux métalliques contenant une saumure concentrée de chlorure de calcium, on peut percer dans la masse congelée un souterrain ou un tunnel entièrement à l’abri des venues d’eau.


Bâtardeaux de types spéciaux

• Le procédé déjà ancien de bâtardeau en enrochements et gabions permet non pas de créer une enceinte qui soit étanche avec assèchement du chantier intérieur, mais simplement de créer une zone d’eau calme, notamment pour la construction d’usines marémotrices.

• Dans un sol rocheux, on ne peut pas battre des palplanches, mais on peut assurer l’étanchéité par un rideau de pieux scellés au béton dans le rocher et assurer la stabilité par un massif de remblai adossé au rideau.

• Dans le lit d’une rivière à très fort courant, on peut battre des palplanches, mais il faut gagner de vitesse l’érosion. On limite celle-ci en immergeant soit des fascines lestées, soit des filets remplis de petits enrochements.

J. A.

➙ Pieu et palplanche.

 M. Jacobson, Technique des travaux (Béranger, 1948-1955, 3 vol. ; 2e éd., 1962-1963, 2 vol.). / K. Terzaghi et R. B. Peck, Soils Mechanics in Engineering Practice (New York, 1948 ; nouv. éd., 1967 ; trad. fr. Mécanique des sols appliquée aux travaux publics et au bâtiment, Dunod, 1963). / A. Caquot et J. Kerisel, Traité de mécanique des sols (Gauthier-Villars, 1950 ; nouv. éd., 1956). / J. Verdeyen, Mécanique du sol et fondations (Eyrolles, 1952 ; nouv. éd., 1956).

batellerie

Ensemble des activités qui participent à l’exploitation du matériel de transport par voie d’eau.



Historique

Pendant longtemps, la voie d’eau est le seul moyen de pénétration à l’intérieur des continents ; même lorsque des pistes commencent à être tracées, elle offre l’unique possibilité d’acheminement des marchandises à moyenne et à longue distance. Des pirogues creusées dans un tronc d’arbre ou de grossiers radeaux permettent ces premiers transports jusqu’au moment où leur succèdent des barques plus faciles à mouvoir et à diriger, comme celles dont des vestiges ont été conservés en Égypte, témoignant d’une active navigation sur le Nil. En Gaule, les marchands phéniciens et grecs peuvent commercer avec l’Armorique et la Grande-Bretagne en utilisant le Rhône, la Loire et la Seine. Les troupes de César sont ravitaillées par voie d’eau grâce à une batellerie locale, que la paix romaine va faire prospérer. Les transporteurs fluviaux se groupent en collèges des nautes pour la défense de leurs intérêts et la protection des convois. Ils parviennent, même pendant les invasions barbares, à conserver une certaine activité.


Les marchands de l’eau

Au Moyen Âge, les obstacles se multiplient : ponts gênant la navigation, pêcheries, moulins avec barrages, innombrables péages. Sur les principaux fleuves, les négociants intéressés à la navigation, les « marchands de l’eau », successeurs des nautes, se groupent, notamment à Orléans, ainsi qu’à Paris, où ils bénéficient d’un monopole de fait, que consacre une ordonnance royale de 1170. Les provinciaux et étrangers doivent alors, s’ils veulent commercer par eau avec Paris, s’y « hanser » en s’associant avec un négociant parisien. Sous le règne de Saint Louis, la confrérie des marchands de l’eau procède à l’élection, en son sein, du prévôt des marchands, qui va jouer un rôle de premier plan dans la municipalité parisienne. C’est la raison pour laquelle une nef figure dans les armes de la Ville de Paris. Le mauvais état des routes et le brigandage contribuent à développer le transport fluvial, qui, par ailleurs, offre de beaucoup le meilleur rendement : un cheval halant un bateau transporte un poids de marchandises très supérieur à celui qu’il pourrait tirer à terre.


Les coches d’eau

Au xvie s., Léonard de Vinci introduit en France le principe de l’écluse à sas, tandis qu’Adam de Craponne (1527-1576) imagine d’utiliser l’eau du cours supérieur des affluents pour alimenter le bief de partage entre deux bassins fluviaux, inventions qui vont bientôt offrir à la batellerie de nouvelles possibilités. Le transport public des personnes par les coches d’eau donne lieu à une première concession par Henri III en 1575. Il s’agit de grandes barques actionnées par rames, par voiles ou par chevaux. Malgré leur inconfort, les voyageurs les préfèrent aux transports terrestres, encore plus pénibles et moins sûrs. Pendant les xviie et xviiie s., le régime des privilèges royaux pour ces transports de personnes suscite d’incessants conflits avec les mariniers et les marchands de l’eau, d’autant plus que les coches d’eau prennent aussi quelques marchandises. Finalement, à l’instigation de Turgot, Louis XVI décide en 1775 la reprise par le Domaine de tous les privilèges concédés. Sous la Révolution, le monopole d’État est abandonné et les péages sont supprimés, mais la circulation est devenue difficile et souvent dangereuse sur les voies d’eau, dont l’entretien n’est plus assuré. Les bateaux utilisés au temps de la Révolution et de l’Empire diffèrent assez peu, pour la plupart, de ceux du xvie s. Leurs types varient suivant les régions et les conditions de navigabilité de chaque fleuve. Sur la Seine circulent de grandes barques d’une cinquantaine de mètres de long et portant 250 t. Les bateaux se meuvent à la rame, à la voile ou par halage animal, mais l’attelage humain à la « bricole » subsistera longtemps encore sur certains canaux.