Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
B

Bārābudur (suite)

Signification, destination et date du monument

Plusieurs interprétations ont été proposées. Par exemple, d’après A. J. Bernet Kempers, le Bārābudur, illustrant les concepts du mahāyāna tardif (v. bouddhisme), est une représentation de l’Univers « émané » du Principe suprême (le stūpa du sommet) et déployé autour et au-dessous de lui en formes de plus en plus dégradées : monde informel (Arūpadhātu), monde formel (Rūpadhātu), monde phénoménal (Kāmadhātu) qui englobe celui où nous vivons. Les bas-reliefs correspondent au Kāmadhātu, les quatre cent trente-deux Jina au Rūpadhātu. Au niveau des terrasses circulaires, les Jina ne se laissent qu’entrevoir dans leurs stūpa ajourés, à la frontière de l’Arūpadhātu.

La destination précise du Bārābudur est matière à conjectures. Son achèvement peut se situer vers 825.


Style

Les Jina, hiératiques et imposants, mais massifs, s’apparentent aux œuvres indiennes « post-Gupta » (v. Inde). Les bas-reliefs animent d’un mouvement lent la même plastique, affinée et adoucie. Sur les longs panneaux, où les scènes se succèdent, le personnage important est le plus souvent isolé sous un dais, les autres étant groupés à sa droite ou à sa gauche. La beauté harmonieuse de ces bas-reliefs fait plus que compenser une certaine monotonie. Une évolution du style est perceptible entre les panneaux du bas et ceux, plus chargés et plus dynamiques, des niveaux supérieurs.

A. L. B.

➙ Indonésie.

 N. J. Krom et T. Van Erp, Beschrijving van Barabudur (La Haye, 1920-1931 ; 5 vol.). / P. Mus, Barabudur (P. Geuthner, 1937 ; 2 vol.). / A. J. Kempers, Borobudur Mysteriegebeuren in steen (La Haye, 1960). / C. Sivaramamurti, le Stupa de Barabudur (P. U. F., 1961).

Barbares

À l’origine, nom donné par les Grecs à l’ensemble des peuples qui ne participent pas à la civilisation de la « polis » et ne peuvent, par conséquent, prétendre au titre de « citoyen » ; le terme de Barbares qualifie tout aussi bien des peuples aussi civilisés que le sont les Égyptiens ou les Perses ou aussi primitifs que le sont leurs voisins Scythes ou Sarmates, nomades iraniens des steppes eurasiatiques, peuples qui se distinguent pourtant également des Grecs par le fait que le régime monarchique qui est le leur les réduit à la condition de « sujets ».



Introduction

S’identifiant sur le plan politique et culturel aux Grecs, les Romains, chargeant ce vocable d’une nuance péjorative, rejettent hors du monde civilisé tous les peuples qui ne participent pas à la civilisation gréco-romaine, mais qui se pressent à partir du ier s. apr. J.-C. aux portes de l’Empire romain, dont ils convoitent les richesses. Contre cette menace, Rome met au point un vaste système défensif : l’élément le plus spectaculaire en est le limes dont la protection se révélera finalement aussi vaine que celle qu’assura aux Chinois la construction de la Grande Muraille.

En fait, sous le vocable de Barbares se cache une grande diversité de peuples que tout sépare, la race, la langue, la religion et surtout le genre de vie, mais que l’implantation géographique permet de regrouper en trois grands ensembles : les nomades éleveurs des steppes asiatiques ; leurs frères du Proche-Orient et de l’Afrique du Nord ; enfin les chasseurs éleveurs, voire cultivateurs des forêts européennes et de leurs clairières, sans compter les pêcheurs pirates des Pays de la mer, implantés surtout dans le nord-ouest de l’Europe.

Les premiers ont pour pays d’origine les Steppes de Mongolie, du Turkestan et du Tibet. En quête perpétuelle d’eau et de pâturages, ces peuples se divisent en deux grands groupes de population : celui des Xianbei (Sien-pei) de Mandchourie, qui exerce une forte pression sur la Chine, celui des Xiongnu (Hiong-nou), qui, s’étant affaibli à lutter contre les Chinois sur le cours supérieur du Huanghe (Houang-ho), ne cesse de se déplacer vers l’ouest. Regroupés au nord de la mer d’Aral au ier s. av. J.-C., ces Xiongnu rejettent les Huns Hephthalites vers l’Empire sassanide au ve s. apr. J.-C., alors même que, depuis la fin du ive s., leur progression vers l’ouest pousse à l’assaut de l’Empire romain les populations hunniques et germaniques.

Les peuples nomades du désert constituent un deuxième groupe de populations barbares, qui conduisent des raids dévastateurs. Les unes sont implantées en Arabie, le long de la frontière sassanide de l’Euphrate (Lakhmides) ou du limes romain de Syrie (Rhassanides) ; les autres vivent aux confins de la Nubie et de l’Égypte (Blemmyes éthiopiens) ou aux limites du Sahara et de l’Afrique romaine du Nord-Ouest. L’autorité romaine est en outre menacée par la révolte des montagnards berbères (à la fin du iiie s.) et par le soulèvement répété des circoncellions (fin du ive s.).

Mais c’est l’Europe qui constitue le réservoir le plus important de Barbares. Si on excepte la population celtique des Scots et celle des Pictes, respectivement en Irlande et en Calédonie (l’actuelle Écosse), d’où ils menacent également la Bretagne romaine, les peuples barbares qui se pressent aux frontières de l’Empire sont essentiellement des Germains. Constituant un vaste groupe ethnique homogène, ces derniers semblent être originaires de Scandinavie, où les Goths auraient donné leur nom à l’île de Gotland.

Malgré l’apparition des Celtes, ils progressent à travers l’Europe entre le ve et le iie s. av. J.-C., se glissant d’abord vers le sud-est depuis la Scandinavie jusqu’aux côtes de la mer Noire sous la conduite des Bastarnes, qui entraînent à leur suite les Goths, puis les Vandales et les Burgondes ; mais, dès la fin du iie s. av. J.-C., un nouvel axe de migration s’esquisse en direction du sud-ouest, cette fois sous l’impulsion des Teutons, des Cimbres et des Suèves, respectivement vaincus à Aix (102 av. J.-C.) et à Verceil (101 av. J.-C.) par Marius et en Haute-Alsace par César (58 av. J.-C.). Auguste ayant échoué dans son effort pour rejeter les Germains (désastre de Publius Quintilius Varus, 9 apr. J.-C.), ces derniers étendent finalement leur domaine territorial jusqu’aux rives du Rhin et du Danube, le long desquelles règne une paix relative jusqu’au milieu du iie s. apr. J.-C. À la faveur de cette paix et des contacts commerciaux qu’elle favorise, les Romains tentent de prendre une meilleure connaissance du monde barbare, mais les œuvres du géographe Strabon (v. 18 apr. J.-C.), du naturaliste Pline l’Ancien (av. 79 apr. J.-C.), de l’historien Tacite, dont la Germanie date de 98, et enfin de Ptolémée (v. 150 apr. J.-C.) ne parviennent pas à dresser un tableau exact des peuples qui le composent. En 166, sans doute, sous la pression des Goths, qui reprennent leur mouvement migratoire en Europe orientale, les Barbares se lancent de nouveau à l’assaut de l’Empire. Quades et Marcomans progressent même jusqu’en Vénétie, tandis que les Costoboques et les Bastarnes pénètrent jusqu’en Achaïe et en Asie. Rejetés sur le Danube par Marc Aurèle (166-180), les Germains déplacent au iiie s. leur axe d’attaque vers le Rhin, qu’ils franchissent à plusieurs reprises, occupant la province romaine de Germanie supérieure en 254, pénétrant en Belgique vers 259 et ravageant la Gaule entre 268 et 278. De là, les plus audacieux s’aventurent jusqu’en Espagne. Aussi, les villae gallo-romaines flambent-elles par centaines, tandis que les villes, en partie détruites, se resserrent dans d’étroites murailles construites à la hâte autour des anciens oppida celtiques. Par ailleurs, les Alamans pénètrent à deux reprises en Italie (258 et 270), tandis que les Goths ravagent de 258 à 270 la Thrace, la Grèce et l’Asie Mineure avant d’être finalement rejetés au-delà du limes par Aurélien, par Marcus Aurelius Probus et par Dioclétien à l’aube du ive s.