Balanchine (George) (suite)
Si Balanchine est l’auteur d’importants ballets narratifs (la Chatte, le Fils prodigue, Palais de cristal, la Somnambule, Bugaku) et de grandes reconstitutions classiques (Casse-Noisette, le Lac des cygnes), il est avant tout le créateur de ballets abstraits dépouillés de tout artifice. « Pour monter des gestes purs, dit-il, je n’ai pas besoin d’escaliers, de colonnades et autres constructions qui, à mon sens, offrent l’inconvénient certain d’accaparer l’attention au détriment de la danse. » L’absence presque totale de décoration est compensée par une remarquable utilisation des éclairages.
Son inspiration naît uniquement de la musique, et, avant tout travail créateur, il apprend la partition comme si lui-même devait tenir le pupitre du chef d’orchestre. Il lui arriva même de jouer la partie de clarinette dans The Pied Piper (musique d’A. Copland), ballet de son assistant Jerome Robbins. C’est visuellement qu’il assimile la partition, et sa lecture détermine le schéma du ballet, qu’il ne peut composer que sur un plateau où il dispose de tous les éléments scéniques et où il procède lui-même à certains essais. Musicien, il n’exige pas cette qualité de ses danseurs, qui, grâce à lui, ont atteint une très haute technicité, mais qui restent en toutes circonstances ses « outils », des instruments dont il joue en maître. Abstraction, dépersonnalisation des interprètes, rigueur géométrique pourraient conduire les ballets de Balanchine à une froideur, un statisme dépourvus de pouvoir émotionnel. Grâce à un choix judicieux des gestes, des lignes, des rythmes, des enchaînements spatiaux, on se trouve face à des œuvres de danse pure, profondément lyriques et belles, où tout est suggéré plutôt que dit.
C’est ainsi que sont nées les œuvres les plus caractéristiques du style et du vocabulaire balanchiniens : Serenade (1934), Concerto Barocco (1941), Danses concertantes (1944), The Four Temperaments (1946), Trumpet Concerto (1950), la Symphonie écossaise (1952), Ivesiana (1954), Agon (1957), Liebeslieder Walzer (1960). Movements for piano and orchestra (1963), Brahms-Schönberg Quartet (1966), Jewels (les Bijoux) [1967], Violin Concerto (1972), Tzigane (1975), Union Jack (1976).
Créateur doué d’une riche imagination, il est, en même temps qu’un novateur, le continuateur de la grande tradition classique. L’ensemble de son œuvre chorégraphique comporte plus de cent trente compositions dont un certain nombre ont été réalisées pour le cinéma (A Midsummer Night’s Dream, 1966) et la télévision. Balanchine a également publié Complete Stories of the Great Ballets (1954 ; trad. fr. Histoire de mes ballets, 1969).
H. H.