Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
W

Wells (Herbert George) (suite)

Wells se passionne par contre pour la science-fiction politique, sociologique, philosophique, l’utopie, dont il dit dans Modern Utopia (1905) : « L’utopie moderne ne doit pas être statique mais cinétique ; elle doit prendre forme non comme un état permanent mais comme une étape pleine d’espoir conduisant à une longue ascension d’étapes. » De cette fiction d’idées procèdent aussi bien Men like Gods (1923), The Food of the Gods (1904) que ce qu’il appelle ses « fantasies of probability », telles que When the Sleeper wakes, The War in the Air (1908) ou The World set Free (1914), social-fiction, dirait-on. L’homme demeure cependant la préoccupation de Wells. Son avenir, celui de la société humaine, qu’il tente de distinguer grâce à la machine à explorer le temps. Ses limites aussi avec l’Île du Dr. Moreau — maillon de science-fiction fantastique s’ajoutant à celui de la veine noire romantique et de Frankenstein —, où la science de l’apprenti sorcier déclenche un processus de catastrophe. Atavisme, instincts bestiaux, autant de barrières infranchissables que l’homme porte en lui. Du pouvoir que lui donne sa découverte, l’Homme invisible ne sait ni ne peut profiter. Et puis existent des forces extérieures, et, dans la Guerre des mondes (1898), les humains frôlent l’anéantissement dans leur lutte impuissante contre cette race supérieure sortie de l’espace. Ainsi, une fois encore, l’optimisme mesuré de Wells invite à la réflexion.

D. S.-F.

 B. Bergonzi, The Early H. G. Wells. A Study of the Scientific Romances (Manchester, 1961). / I. Raknem, Wells and his Critics (Londres, 1962). / P. Parrinder, H. G. Wells (Édimbourg, 1970). / J. P. Vernier, H. G. Wells et son temps (Didier, 1971).

Wen Tcheng-ming

En pinyin Wen Zhengming ; prénom, Pi. Peintre et lettré chinois (1470-1559).


Son style éclectique domine la peinture des Ming* dans la première moitié du xvie s. Ses œuvres, très recherchées par les « bourgeois » (commerçants, propriétaires fonciers et fonctionnaires), seront copiées à maintes reprises, de son vivant déjà. Jusqu’au xxe s., les maîtres conseilleront aux débutants de s’en inspirer, car elles offrent les exemples les plus élégants et les plus orthodoxes de l’art des lettrés.

Originaire de Suzhou (Sou-tcheou), centre de l’école Wu (Wou), Wen Zhengming était le deuxième fils de Wen Lin (1445-1499), qui occupait le poste de préfet à Wenzhou (Wen-tcheou). Son père, d’esprit confucianiste et fervent de l’astrologie, le prénomma Pi, nom d’une des vingt-huit constellations ; il prit lui-même pour surnom Zhengming, l’une des douze divinités des Branches terrestres. À l’âge de huit ou neuf ans, il ne savait pas encore prononcer clairement une phrase, mais il montra ensuite une mémoire prodigieuse dans l’étude des classiques. À quatorze ans, il réussit le concours des bourses dans sa province. Son père mourut lorsqu’il avait seize ans et, l’année suivante, il étudia la littérature et la calligraphie auprès de deux maîtres différents. Mais il fut, surtout, le meilleur élève de Shen Zhou (Chen Tcheou*).

Après maints échecs, semble-t-il, aux examens d’État, il abandonna l’idée de servir dans les fonctions publiques et se livra à la poésie, à la peinture et à la calligraphie dans le milieu raffiné de Suzhou. Il refusa l’invitation du prince Ning en 1514, mais, en 1523, fut présenté à la Cour en qualité de savant de sa province. Il occupa un poste de taizhao (t’ai-tchao) à l’académie de la Forêt de plumes (Hanlin [Han-lin]) et participa à la rédaction des chroniques de l’empereur Wuzong (Wou-tsong, 1506-1521). Deux ans plus tard, il retourna chez lui, l’existence à la Cour ne lui convenant pas. Il coula dès lors une longue vie paisible. En dehors de ses activités créatrices, il collectionnait et étudiait peintures, calligraphies et objets anciens.

On trouve encore dans diverses collections bon nombre d’œuvres de Wen Zhengming. C’est un paysagiste, mais il a peint aussi des bambous et des orchidées, des pins, des fleurs de prunier et des chrysanthèmes, parfois des personnages. Sa manière est en général minutieuse et inspirée des maîtres anciens — surtout Zhao Mengfu (Tchao Mong-fou*) et Wu Zhen (Wou Tchen*) — à travers, souvent, l’interprétation qu’en a donnée Shen Zhou. Mais dans ses dernières années, il peint à grands traits puissants, manière qu’apprécieront particulièrement les collectionneurs.

Son Paysage du mont Tianping (T’ien-p’ing), conservé au musée Guimet à Paris, est une délicate peinture exécutée en souvenir d’une promenade dans cette montagne. Daté de 1508, c’est un des rares témoins de sa première manière. Le style évoque celui de Huang Gongwang (Houang Kong-wang*), inspiré de la calligraphie : arbres et rochers sont « écrits », comme disent les Chinois, c’est-à-dire d’un tracé linéaire et schématique, et destinés à être « lus » trait par trait. Quatre poèmes évoquant cette promenade sont calligraphiés avec élégance dans la partie supérieure de l’œuvre.

H. C.-l.

Wesley (John)

Théologien anglais (Epworth, Lincoln, 1703 - Londres 1791).


Son père, Samuel, anglican, fils et petit-fils de puritains, était pasteur d’Epworth ; sa mère, fille d’un théologien non conformiste, était, elle aussi, devenue anglicane. Toutefois, il n’est pas douteux que Wesley, s’il fut élevé dans l’Église établie et dans son respect, reçut également de son éducation le bien le plus précieux : une solide indépendance d’esprit. On a dit de la mère de John, Susanna Wesley, qu’elle était celle du méthodisme ; tant il est vrai que cette femme remarquable, ayant exercé une influence profonde sur la vie spirituelle de ses enfants, avait aussi forgé leurs caractères de façon exceptionnelle.

En 1720, John entre au collège de Christ Church à Oxford, pour y poursuivre et achever des études commencées à Londres en 1714. À l’époque, Oxford formait plus des littéraires que des théologiens. Wesley y acquiert le diplôme de maître ès arts et, à vingt-quatre ans, une chaire de littérature grecque. Un peu à contrecœur, il se décide pour la carrière ecclésiastique, devient suffragant de son père (1727) et se demande s’il n’a pas fait fausse route. Et, comme le Lincoln College d’Oxford le rappelle, il retourne à l’enseignement (1729). Mais, pendant son absence, son frère cadet Charles (1707-1788) a fondé, avec quelques camarades, une sorte de petite chapelle, de caractère mi-scientifique, mi-spirituel, dans le but d’entretenir et de renouveler « méthodiquement » leur foi, leur piété, leur morale et leur intelligence chrétiennes. À cause de leur sérieux systématique, on les désigne ironiquement du nom de « méthodistes ». En retournant à Oxford, John se joint à eux et devient rapidement leur conducteur ; à cette époque, il cherche sa voie dans les impasses de l’ascétisme et du ritualisme.