Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Weimar (république de) (suite)

Mais il faut aussi régler le problème des réparations, et à Gênes se réunit une conférence économique à laquelle assistent les représentants de l’Allemagne (le ministre des Affaires étrangères Walther von Rathenau) et de l’Union soviétique (G. V. Tchitcherine), qui signent le 16 avril 1922 l’accord de Rapallo. Les deux pays renoncent à toute réparation de guerre, et l’Allemagne renonce à toute réparation pour ses ressortissants lésés par le régime soviétique. Enfin, l’Allemagne et l’Union soviétique s’octroient la clause de la nation la plus favorisée et doivent se consulter chaque fois que des problèmes économiques se poseront sur le plan international. Cet accord est bien accueilli par une partie de l’opinion allemande, qui voit un renforcement de la situation internationale de l’Allemagne et des possibilités d’action économique, politique et même militaire. Von Seeckt aura des entretiens avec l’état-major soviétique ; la Reichswehr expérimentera certaines armes en U. R. S. S. et y fera manœuvrer des troupes. Rapallo inquiète pourtant une partie des milieux de droite, et, le 24 juin 1922, Rathenau sera assassiné.

À la fin de 1923, la situation s’améliore très vite. Le gouvernement ordonne la reprise du travail dans la Ruhr et rétablit le crédit en créant une nouvelle monnaie, le Rentenmark (émis le 15 novembre). Ainsi va-t-on pouvoir faire disparaître la monnaie dévaluée, que l’on échange à raison de 1 Rentenmark pour 1 milliard de mark. On cherche à rétablir l’équilibre du budget ; ce sera chose faite en 1925, à la suite d’une politique de restriction de crédits, de diminution de l’allocation de chômage et du nombre des fonctionnaires. Le gouvernement s’appuie sur la grande industrie, ce qui entraîne une nette augmentation du chômage. Enfin, le 30 août 1924, est créée une nouvelle monnaie, le Reichsmark. C’est une véritable banqueroute de l’État, dont sont victimes les rentiers, mais qui permet de repartir sur des bases financières nouvelles et qui favorise l’investissement des capitaux étrangers.

L’extrême gauche est la grande vaincue. Sans doute a-t-elle eu affaire à la conjonction de l’extrême droite, de la grande industrie et des nationalistes. Mais elle est aussi victime de ses divisions et du désir d’ordre et de stabilité de plus en plus fort dans le peuple allemand. 1924 marque sur le plan politique l’évolution vers la droite. Le 4 mai 1924 ont lieu les élections au Reichstag. Les communistes et les socialistes indépendants obtiennent 13,4 p. 100 des voix (20 p. 100 en 1920) et les socialistes 20,5 p. 100 (21,6 p. 100 en 1920) tandis que la droite rassemble 36,2 p. 100 des suffrages (29,1 p. 100 en 1920) ; quant aux nazis, ils obtiennent 6,6 p. 100 des suffrages. Mais, après dissolution, de nouvelles élections ont lieu le 7 décembre, car l’Assemblée précédente est ingouvernable. Les communistes et les socialistes indépendants perdent 1 million d’électeurs au profit des socialistes, tandis que le Centre et les démocrates gagnent chacun plus de 200 000 voix. La droite progresse également, au détriment des nationaux-socialistes, qui perdent plus de la moitié de leurs députés et de leur électorat. Ainsi apparaît sur le plan parlementaire le retour à la stabilité politique. Une ère de prospérité économique, de calme, d’essor culturel va s’ouvrir pour la république de Weimar. Mais cette période ne durera que cinq ans.


Le temps de la stabilité (1924-1929)


Le problème des réparations

La crise de 1923 a montré combien le problème des réparations était crucial. L’Allemagne, dite responsable de la guerre, doit payer. De plus l’armée allemande a ruiné l’économie française, et le Reich doit participer à la reconstruction des pays vainqueurs. Il y a un précédent, puisque, en 1871, l’Allemagne a imposé à la France une indemnité de 5 milliards. En juillet 1920, la Commission des réparations, à la conférence de Spa, fixe la dette à 132 milliards de mark-or, dont 52 p. 100 iront à la France, 22 p. 100 à la Grande-Bretagne, 10 p. 100 à l’Italie et 8 p. 100 à la Belgique. Il est impensable que l’Allemagne puisse payer une telle somme. Néanmoins, au début, sous la pression des Alliés, l’Allemagne commence ses paiements, conformément à la politique de Rathenau. Mais la crise économique allemande incite le Reich à freiner ses sorties de capitaux ; celui-ci est inspiré d’ailleurs par la pensée économique de Keynes*, qui estime que cette politique est catastrophique pour l’Europe occidentale. Après la crise de la Ruhr, l’ensemble des gouvernements occidentaux se rend compte que l’Allemagne ne peut payer. Même Poincaré* admet un changement de politique. Il faut dire que la monnaie française a besoin de l’appui bancaire américain et que cela conduit la France à accepter la réunion d’une nouvelle Commission des réparations, présidée par l’Américain Charles G. Dawes (1865-1951).


Le retour au calme

La Commission se réunit le 30 novembre 1923, au moment où l’économie allemande redémarre. La production s’accroît sensiblement, comme le montre le tableau suivant :

Le commerce extérieur se développe, tandis que les grèves se raréfient. Mais surtout l’économie allemande reçoit des capitaux étrangers dans des proportions considérables. Ainsi, dans le courant de l’année 1924, Britanniques et Américains versent à l’Allemagne près de 1 milliard de mark. Tout cela explique l’essor de l’industrie allemande, renforcée par la stabilisation de la monnaie.

La stabilisation politique semble accompagner ce renouveau. Toutefois, il ne faut pas se leurrer : si le calme règne dans la rue, une certaine instabilité demeure. Lorsque Ebert meurt le 28 février 1925, ce n’est pas le candidat des partis du gouvernement, Wilhelm Marx, présenté par le Centre et soutenu au second tour par le SPD, que désigne le suffrage universel, mais — à la faveur du maintien d’un candidat communiste (Ernst Thälmann) —, Hindenburg*, le vieux maréchal, candidat de la droite.