Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

volcan (suite)

D’après le calibrage, on a l’habitude de distinguer : des blocs, généralement anguleux, de grande taille (parfois plusieurs mètres cubes) et qui retombent presque sur place ; des bombes, qui, suivant la vitesse de leur solidification décroissante, retombent avec des aspects de « croûte de pain », de « fuseau », de « bouse de vache » ; des lapilli, ou petites pierres irrégulières dont la taille varie de quelques centimètres à quelques millimètres ; puis des sables volcaniques et des poussières volcaniques (dites un peu à tort « cendres »), éléments de plus en plus fins, qui peuvent retomber extrêmement loin, surtout lorsque le vent les emporte.

Les premiers de ces produits sont les constituants majeurs du « cône volcanique », relief très habituel autour de certaines bouches volcaniques. Mais ils peuvent aussi, comme les éléments plus fins, être entraînés par des ruissellements et se déposer soit à l’air libre, soit dans des lacs, sous forme de couches cimentées et stratifiées dites « volcanosédimentaires ». Blocs et bombes donnent ainsi des brèches volcaniques, lapilli et sables grossiers, des tufs volcaniques, sables fins et poussières, et des cinérites. Parfois, cependant, les produits solides sont gorgés d’eau sans que la cimentation soit réalisée tout de suite. Les éléments fins, emballant des blocs plus ou moins importants, acquièrent alors une mobilité extrême sur les pentes et provoquent de gigantesques coulées boueuses avant de se stabiliser en une masse compacte. On appelle ces coulées lahars, d’après un terme employé en Indonésie*, où le phénomène a causé bien des milliers de morts ; mais elles ne sont pas limitées à ce pays, et, par exemple, l’ensevelissement d’Herculanum au pied du Vésuve leur est également dû.

Il existe enfin des produits intermédiaires entre solides et liquides, mais pour lesquels la texture est commandée par l’abondance des gaz associés. Les ponces sont des roches fragmentées, si riches en bulles qu’elles peuvent flotter sur l’eau. Il s’agit d’une sorte d’écume de verre qui retombe au sol après projection (chute de ponce) ou qui est déversée assez calmement autour de la bouche volcanique (coulée de ponce) en quantités chiffrables parfois en kilomètres cubes. Les ignimbrites (terme signifiant « pluie de feu ») sont un aérosol, ou une émulsion, qu’on interprète comme une mousse de lave de grande mobilité initiale se répandant à plat sur de très grandes surfaces (centaines de kilomètres carrés) autour des fissures d’où elle est sortie. Les formations ignimbritiques atteignent souvent plusieurs centaines de mètres d’épaisseur ; elles peuvent être considérées comme des tufs soudés à chaud et non cimentés à froid comme les tufs habituels. On observe d’ailleurs fréquemment le passage de l’un à l’autre de ces types : la base et le sommet de la masse ignimbritique, refroidis rapidement au contact du sol et de l’air, correspondent à des tufs stratifiés et non soudés, tandis que le cœur, lentement refroidi, a eu le temps de se compacter et de se souder, prenant un aspect que l’on qualifie parfois de tufo-lave.


Les liquides

Les matières fondues qui s’écoulent hors de la bouche volcanique sont appelées laves. Plus ou moins associées aux gaz et aux solides, elles contribuent à l’édification de la plupart des volcans, mais il arrive que leur prédominance soit très nette. Avec les produits pyroclastiques, elles aident à la construction du cône entourant la bouche émissive lorsque leur solidification est assez rapide. Par contre, une fluidité supérieure provoque l’apparition d’un lac de lave à l’emplacement de la bouche, de champs de laves à sa périphérie lorsque la pente est faible et régulière, de coulées de laves quand la pente est plus forte ou accidentée de vallées préexistantes qui les canalisent.

La distance que les laves atteignent est donc fonction de la topographie, mais plus encore de leur fluidité initiale, qui dépend de leur teneur en éléments gazeux, de leur température et de leur composition chimique. L’influence des éléments volatils est évidente : de la lave riche en gaz est encore mobile à 600 °C, tandis que, pour la fondre après le départ des gaz et la solidification, on doit la réchauffer à 1 300 °C. Normalement, au point de sortie, la lave présente d’ailleurs des températures allant de 900 à 1 300 °C et, dans ce dernier cas, peut paraître presque aussi fluide que de l’eau. Mais une « peau » solide se produit en quelques minutes au contact du sol ou de l’air. Sous cette surface protectrice, le refroidissement peut, cependant, être très lent : par exemple, dans le lac de lave du fond du cratère du Kilauea (Hawaii), trois ans après l’éruption, la lave était toujours liquide et à 1 000 °C sous une carapace solide épaisse de 10 m. En ce qui concerne le rôle de la composition chimique, la règle générale est que les laves acides (comme les rhyolites) se solidifient à température assez élevée (vers 900 °C) — d’où abondance de produits solides, cheminement lent et brièveté habituelle des coulées —, tandis que les laves basiques (comme les basaltes) se solidifient seulement vers 600 °C et peuvent, en conséquence, s’étaler en grands champs ou en longues coulées progressant parfois à une vitesse considérable (jusqu’à plus de 30 km/h).

L’aspect superficiel des champs et des coulées de laves varie suivant leur mode de consolidation. On distingue notamment les laves à surface scoriacée, ou chaotique, encore appelées clastolitiques, aa (Hawaii), en gratons (la Réunion), cheires (Auvergne), et, à l’opposé, les laves à surface lisse, mais généralement ondulée, plissée ou « cordée », encore appelées dermolitiques ou pahoehoe (Hawaii). Ces dissemblances ne proviennent pas d’une nature pétrographique différente, mais de la façon plus ou moins brutale dont se sont dégagés les gaz inclus primitivement dans la lave.

Dans l’intérieur du champ ou de la coulée, la solidification donne le plus souvent une masse compacte découpée seulement par des fentes de retrait perpendiculaires à la surface libre. Il en résulte un débit prismatique grossièrement hexagonal, présentant l’aspect de colonnades ou de tuyaux d’orgues dans les entailles verticales dues à une érosion ultérieure et celui d’un dallage savamment assemblé dans les décapages horizontaux (exemples célèbres des orgues d’Espaly, de Bort ou de Saint-Flour en Auvergne, de la Chaussée des Géants en Irlande). En règle générale, mais non absolue, le diamètre des prismes augmente avec l’épaisseur des coulées. Il est maximal pour les laves acides, dont l’étalement est faible, mais aussi pour les grands champs d’ignimbrites massives (toujours acides), où les prismes onduleux atteignent des largeurs de plusieurs mètres.