Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

voilier (suite)

Extérieurement, les navires de commerce étaient alors peu différents des vaisseaux de guerre, mais leurs dimensions étaient sensiblement inférieures. La marine à voile atteignit son apogée au milieu du xixe s. avec les grands clippers, aux coques fines et aux mâts élancés, les plus beaux et les plus élégants voiliers jamais construits, qui transportaient en Grande-Bretagne ou aux États-Unis l’or d’Australie et de Californie, le thé de Chine et la laine d’Australie. Ils filaient jusqu’à 21 nœuds et battaient aisément ainsi les premiers navires à vapeur. Par la suite, les voiliers cédèrent progressivement la place aux navires à propulsion mécanique, la machine étant, dans un premier temps, l’auxiliaire de la voile, mais les navires à vapeur porteront encore pendant plusieurs décennies une voilure auxiliaire. La voile résista dans la marine marchande jusqu’au début du xxe s., où l’on construisit encore des voiliers géants, à coque en fer ou en acier, portant jusqu’à six et même sept mâts. Le cinq-mâts barque en acier France, de 5 600 tonneaux, fut le plus grand voilier jamais construit. Aujourd’hui, des voiliers marchands, souvent pourvus d’un moteur auxiliaire, naviguent encore dans les régions exotiques, notamment sur les fleuves d’Asie et d’Afrique et dans l’océan Indien, mais la plupart des voiliers modernes, de dimensions petites ou moyennes, sont destinés à la navigation de plaisance, qui connaît un essor extraordinaire. Quelques navires à voiles de plus grande taille, au gréement traditionnel, subsistent cependant comme navires-écoles.


Les différents éléments


Gréement

Le gréement est l’ensemble des éléments nécessaires à la propulsion d’un voilier. Il comprend notamment les mâts, les divers espars, les voiles et les manœuvres dormantes et courantes.

• Les mâts sont de longues pièces de bois ou de métal implantées sensiblement à la verticale et qui supportent la plus grande partie des voiles. Ils sont fixés à leur base, ou emplanture, soit sur le fond du bateau, le pont étant alors renforcé à leur passage par l’étambrai, soit directement sur le pont.

• Les espars : vergues, bômes, cornes, beauprés, etc., sont de longues pièces de bois, de métal ou de matière plastique reliées aux mâts ou directement au navire et qui servent à supporter ou à maintenir des voiles.

• Les voiles, pièces de toile qui reçoivent la poussée du vent, sont généralement fixées aux mâts et aux espars. On distingue les voiles triangulaires et les voiles auriques, qui, grâce à leur facilité d’orientation, permettent la navigation par vent debout, ainsi que les voiles carrées, qui conviennent à la navigation par vent arrière ou de travers.

Les voiles triangulaires des anciens voiliers étaient appelées voiles latines. Aujourd’hui, la majorité des bateaux de plaisance portent une ou deux voiles en forme de triangle rectangle, dites voiles Marconi, fixées par leur bord vertical, ou guindant, aux mâts et par leur bord inférieur, ou bordure, à des bômes ; l’hypothénuse, appelée chute, est libre, mais elle est consolidée par un filin, ou nerf de chute, passant dans un ourlet et par des lattes placées dans des fourreaux entre deux épaisseurs de tissu. La voile bermudienne, fixée à sa partie supérieure à une petite corne, est une variante de la voile Marconi. Les bateaux portent également à l’avant un ou plusieurs focs, voiles triangulaires reliées parfois par leur bord inférieur à un espar prolongeant l’avant du navire, le beaupré. La taille des focs utilisés dépend de la force du vent et de sa direction par rapport au bateau. En navigation de plaisance, le tourmentin, utilisé par gros temps, est le plus petit ; les focs de Gênes, ou gênois, bordés très en arrière, sont les plus grands ; le foc ballon, ou « spinnaker », sert par vent arrière et aux allures portantes. On trouve encore sur certains bateaux, au-dessus d’une voile aurique, le flèche, voile triangulaire fixée à la partie haute du mât et la corne. Beaucoup d’anciens voiliers portaient en outre des voiles d’étai, de forme triangulaire, disposées entre les mâts et maintenues par des cordages.

Les voiles auriques sont quadrangulaires, enverguées à leur partie supérieure sur une corne et maintenues à leur base par une bôme.

Les voiles carrées, en réalité de forme plutôt trapézoïdale, sont les plus anciennes et équipaient beaucoup de voiliers du passé. Elles sont enverguées sur une vergue, espar horizontal fixé en travers du mât.

• Les manœuvres sont des cordages en matières textiles ou métalliques, munis souvent de palans permettant de les raidir. Les manœuvres dormantes sont fixes et servent à soutenir les mâts et les espars : étais assujettissant les mâts dans le sens longitudinal, haubans et, sur les grands voiliers, galhaubans, les maintenant latéralement, balancines soutenant l’extrémité des bômes, etc. Les manœuvres courantes sont mobiles et comprennent notamment les drisses, qui servent à hisser les voiles, et les écoutes, utilisées pour les orienter.


Coque

La coque d’un voilier moderne de plaisance comporte un plan de dérive, ou quille. Celui-ci est une surface plane et immergée qui, en prenant appui sur l’eau, s’oppose au déplacement latéral du bateau, ou dérive. Il facilite la progression du voilier par vent de travers ou de trois quarts. Sa construction varie avec le type du voilier. Si la coque est en forme, c’est-à-dire si les sections transversales, ou couples, présentent une courbure régulière, sans angle vif, la quille fait généralement corps avec elle : on l’appelle dans ce cas fin keel. Une coque en forme peut aussi comporter une quille rapportée, ou bulb keel, qui est le plus souvent adoptée pour une coque à bouchains vifs. Ce type de quille est constitué par une plaque de métal très mince, terminée à sa base par une masse de lest en plomb ou en fonte. Certains bateaux de plaisance, comme les dériveurs, ont un plan de dérive fait d’une plaque de bois ou de métal généralement non lestée, appelée dérive et qui est rétractable soit par traction verticale vers le haut (dérive sabre), soit par pivotement autour d’un axe situé à l’avant de la plaque (dérive pivotante). En position rétractée, la dérive est maintenue dans un puits étanche. Enfin, sur certains voiliers, une découpure longitudinale pratiquée dans le lest de la quille permet le passage d’une dérive qui accroît la surface de dérive et assure un meilleur rendement « au plus près ».