Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

Vladimir-Souzdal (suite)

Les plus anciennes églises qui nous soient parvenues ont été bâties sous le prince Iouri Dolgorouki (1125-1157) à Kidekcha et à Pereïaslavl-Zalesski (auj. Pereslavl-Zalesski), mais l’architecture s’épanouit surtout sous André Bogolioubski (1157-1174), qui transporte son trône de la ville de Souzdal à celle de Vladimir, où, en 1158, il fait construire la cathédrale de la Dormition. Celle-ci est partiellement détruite lors de l’incendie de 1183, et Vsevolod III (1176-1212) ordonne sa reconstruction deux ans plus tard ; les façades sont décorées de colonnettes, de masques de femmes, de lions ainsi que de quelques bas-reliefs bibliques ; en 1408, Andreï Roublev et Daniil Tchernyï (Daniel le Noir) décoreront l’intérieur de fresques. Non loin de Vladimir, à Bogolioubovo, le prince André Bogolioubski se fait construire un palais et une église reliés entre eux par une galerie. Il ordonne également la construction de l’église de l’Intercession-de-la-Vierge sur la Nerl. Sous Vsevolod III, de graves troubles ont lieu à Vladimir ; le prince déplace sa cour et se fait construire un nouveau palais avec l’église palatine Saint-Dimitri (1194-1197), dont les façades sont recouvertes de bas-reliefs à la hauteur des tribunes.

Après avoir cédé sa place de capitale à Vladimir, Souzdal continue à jouer un rôle important. En 1222-1225, le prince Iouri Vsevolodovitch (1212-1216 ; 1218-1238) fait reconstruire la cathédrale de la Nativité, dont la partie supérieure sera rebâtie en 1531. On y retrouve le décor des églises de Vladimir ; les portails sud et ouest sont fermés par des portes en bronze où sont gravés des thèmes bibliques. Entre le xve et le xviie s., la cathédrale sera entourée d’un complexe architectural incluant le palais épiscopal.

Dès la fin du xiie s., la principauté de Vladimir-Souzdal possède une école de peinture ayant son style propre. Mais c’est aux xve et xvie s. que ce dernier s’épanouira tout à fait. Il est caractérisé par l’équilibre de la composition et des couleurs, le raffinement des motifs décoratifs, un coloris tendre, la délicatesse des visages, la grâce des gestes et des attitudes (Vierge de tendresse [début du xve s.], la Nativité [xvie s.], musée de Souzdal). Il semble que le style iconographique de Souzdal ait exercé une influence sur celui de Moscou. Et, on l’a dit, des artistes de Moscou, Andreï Roublev et Daniil Tchernyï, ont travaillé à Vladimir.

Aux xviie et xviiie s., l’architecture connaît un nouveau développement à Souzdal. Mais, cette fois, le style dominant est celui des églises de Moscou et de la Volga. Le matériau employé est la brique, qui permet un décor riche et varié. Le sommet des façades se termine soit par des arcs en accolade (collégiale du monastère de la Déposition-du-Manteau-de-la-Vierge, xvie-xviiie s.), soit par une arcature (collégiale du monastère Saint-Alexandre, xviie s ; église Saints-Pierre-et-Paul, 1694). Le pourtour des fenêtres est souligné par des colonnettes supportant un arc en forme de diadème ; les voussures des portails reposent aussi sur des colonnettes richement décorées. L’abside est proéminente. Souvent, à l’ouest, un clocher octogonal se terminant par un toit pyramidal flanque la façade principale (Saint-Jean-Baptiste, 1720). L’édifice est égayé par un décor de céramique de couleurs vives (Saint-Nicolas, 1720-1738), parfois même il est en partie peint (Saint-Lazare, 1667). Divers monastères sont fondés entre le xiiie et le xviiie s. Celui de l’Intercession (xiie s.), agrandi aux xvie-xviie s., comprend plusieurs églises, dont la collégiale (1510), construite sur deux étages, entourée d’une galerie et flanquée d’un clocher pyramidal ; à côté s’élève une grande église réfectoire ; l’entrée sud est surmontée de la petite église de l’Annonciation (1518). Le monastère du Sauveur et de Saint-Éphime (xive s.) est reconstruit en pierre au xvie s. La collégiale de la Transfiguration (1564), décorée de fresques au xviie s., se dresse au milieu d’un ensemble que ceinture une enceinte flanquée de vingt tours (xviie s.) : c’est un exemple typique de monastère-forteresse.

S. T.

 N. N. Voronine, l’Architecture du Nord-Est de la Russie, xiie-xve s. (en russe, Moscou, 1961-62 ; 2 vol.) ; Vladimir, Bogolioubovo, Souzdal, Iouriev-Polskii (en russe, Moscou, 1965). / Trésors de Souzdal (en russe, Moscou, 1970).

Vlaminck (Maurice de)

Peintre français (Paris 1876 - Rueil-la-Gadelière 1958).


Autodidacte par excellence, Vlaminck s’est formé lui-même, aussi bien en peinture que dans d’autres disciplines. Mécano et coureur cycliste professionnel à dix-sept ans, il est, trois ans plus tard, peintre, journaliste et musicien. Sa stature est celle d’un athlète. Il aime les joies sans complications, a horreur de tout ce qui est maniéré, raffiné et part volontiers en guerre contre l’intellectualisme, entaché à ses yeux de dégénérescence. Il se proclame libertaire. Ainsi se présente l’homme qui, ayant rencontré Derain* en 1900, partagera avec ce dernier, en 1901, un atelier à Chatou. De cette rencontre va naître la tendance la plus explosive du fauvisme*.

Si des tentatives pour exalter la couleur s’étaient manifestées parmi les peintres depuis quelques années, surtout avec Matisse*, ce n’est qu’après l’exposition Van Gogh* de 1901, chez Bernheim-Jeune, à Paris, que le mouvement prend conscience de sa force et s’organise. Vlaminck éprouve un choc si violent devant le flamboiement chromatique de l’auteur de la Nuit étoilée qu’à la sortie de l’exposition il a cette surprenante exclamation : « J’aime mieux Van Gogh que mon père. » Et le voici bientôt qui se lance dans l’expérimentation des contrastes de couleurs pures et de la touche fragmentée, entraînant Derain dans cette démarche. Les deux compères peignent ensemble devant les mêmes motifs, à Saint-Denis, à Nanterre, à Bougival, faisant « exploser les couleurs comme des cartouches de dynamite ». En 1905, sur la suggestion de Matisse, Vlaminck expose aux Indépendants, puis au Salon d’automne dans la célèbre « cage aux fauves ». L’année 1906 lui est particulièrement bénéfique : Ambroise Vollard lui achète tout son atelier. C’est alors, à Montmartre, l’époque du Bateau-Lavoir. Vlaminck s’y rend souvent avec Derain pour y rencontrer Picasso* et le cénacle de peintres et d’écrivains qui l’entoure. Mais, dès 1907, le fauvisme s’essouffle ; Vlaminck peint son dernier tableau fauve en 1908 : « Je souffrais, dira-t-il, de ne pouvoir frapper plus fort, d’être arrivé au maximum d’intensité. »