Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

Vigne et vins (suite)

Levures et micro-organismes

Pratiquement, les levures du raisin se divisent en races les moins alcoogènes, telles que Klœckera apiculata, et en races les plus alcoogènes, telles que Saccharomyces ellipsoideus.

Ces races se succédaient naturellement dans la fermentation alcoolique du raisin. L’alcool produit, exerçant ses facultés sélectives, élimine les K. apiculata dès que sa dose atteint 4°. Cette sélection naturelle est à l’origine de la vinification « super-quatre ».

Avec l’emploi généralisé de SO2, l’élimination des races les moins alcoogènes est devenue systématique.

Si, dans une vinification spontanée, la gamme de levures peut agir successivement, il n’en est rien avec l’emploi sélectif, dès le début, ou du SO2 ou de l’alcool, ou des deux à la fois.

Dans ces conditions, la fermentation alcoolique du raisin est due exclusivement à l’action des levures les plus alcoogènes.

Mais la levure est productrice d’éléments autres que l’alcool et utiles à l’homme, tels qu’acides aminés indispensables et vitamine B. Il est donc intéressant de rechercher les levures les plus aminogènes et les plus vitaminogènes, et, parmi celles-ci, les plus riches en acides aminés indispensables, d’autant que ces constituants sont fondamentaux pour la métabolisation de l’alcool.

La recherche de la qualité exige une révision de nos conceptions, sur le plan des industries alimentaires, de la classification et de l’emploi des levures ; elle démontre la nécessité de créer des races nouvelles.

Le levurage avec apport de levures exogènes, si souvent préconisé n’est valable qu’avec la stérilisation préalable du milieu. Sans cela on ne sait pas si l’activité fermentative est due aux levures apportées ou aux levures existantes. De plus, il n’est pas du tout démontré que l’action exclusive des levures sélectionnées est préférable à celle des levures indigènes.

Les échanges entre la levure et le milieu, c’est-à-dire entre la levure et le moût en fermentation ou le vin non encore soutiré, sont peu étudiés bien qu’ils soient essentiels pour la qualité des vins, et spécialement celle des vins blancs. Ils servent même de base à certains modes de vinification, en particulier à l’élaboration accélérée des vins mousseux.

En ne tenant compte que des éléments aminogènes, vitaminogènes et phosphoriques, ils sont caractérisés par deux phénomènes essentiellement distincts : dans un premier temps, une consommation de ces éléments par la levure ; dans un second temps, une excrétion de ces mêmes éléments par la levure, mais plus ou moins modifiés qualitativement et quantitativement, car la levure a une action synthétique certaine.

Cette excrétion est due, d’une part, à une excrétion proprement dite dans le cas de la levure vivante, et, d’autre part, à une autolyse des levures mortes. Il y a restitution plus ou moins quantitative et qualitative si le contact entre levure et milieu est assez prolongé. Ces enrichissements postfermentaires accroissent notablement la valeur hygiénique des vins. Mais n’y a-t-il pas une différence qualitative et quantitative entre produit d’excrétion (levure vivante) et produit d’autolyse (levure morte) ?

Les levures ont une propriété importante trop peu utilisée : leur pouvoir réducteur, variable en particulier d’une race à une autre.

En fait, en associant les pouvoirs réducteurs des parois cellulaires du raisin, qui constituent les fines bourbes, et le pouvoir réducteur des levures, on dispose d’éléments capables d’éviter l’emploi systématique de réducteurs exogènes, tels que le SO2 et l’acide ascorbique.

Les produits secondaires de la fermentation alcoolique, reconnus de plus en plus nombreux, voient leur rôle mieux précisé. La connaissance du bouquet des vins y a gagné.

Ainsi, peu à peu, en précisant l’importance de l’arôme des vins et de leur bouquet, en constatant l’importance de la dégustation pour choisir le vin le plus agréable, est-on parvenu à attribuer à la dégustation l’importance qu’elle n’aurait jamais dû perdre, quelle que soit la nature des vins.

La fermentation malo-lactique est systématiquement étudiée depuis une vingtaine d’années environ. Elle a pour objet de provoquer et de maîtriser la transformation de l’acide malique en acide lactique et, par conséquent, une diminution de l’acidité des vins. Or, cela n’est pas toujours souhaitable. Ces recherches, importantes sur le plan scientifique, ne donnent pas encore une maîtrise satisfaisante dans le domaine des applications. Il existe cependant des techniques de vinification qui permettent d’atteindre partiellement ce résultat, grâce à un métabolisme cellulaire du raisin, comme dans le cas de la « macération carbonique ». Cela est, en tout point, préférable à des additifs microbiens susceptibles de provoquer des effets pathogènes.


Vinification

Deux principes essentiels commandent la transformation du raisin en vin, quelle que soit la nature du vin que l’on veut élaborer.

Tout d’abord, il faut éviter toute manipulation provoquant, avant l’arrivée en cuve, l’éclatement du grain, la dilacération des rafles dans le cas de l’éraflage et, a fortiori, le foulage du raisin. Ainsi seront supprimés des oxydations indésirables, des goûts de rafle désagréables, des départs en fermentation prématurés et, éventuellement, des clarifications difficiles. L’air est, d’une façon générale, l’ennemi d’une bonne vinification. Les remontages à l’air, encore recommandés par certains, sont à déconseiller, sauf dans quelques cas, fort rares d’ailleurs.

Ensuite, il convient d’éviter tout contact avec les matériaux susceptibles de se dissoudre ou de céder une partie de leurs constituants au vin : fer, cuivre, plomb, calcium. On se préserve ainsi des casses métalliques et d’une désacidification indésirée.

Les vins se divisent en deux grandes catégories, les vins blancs et les vins rouges, auxquelles correspondent deux types de vinification essentiellement distincts. Les vins rosés sont assimilables, par leur technique d’élaboration, aux vins blancs, sauf pour la technique dite « par saignée », où, suivant la durée d’encuvage et la température, une légère macération peut se produire.