Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

Vien (Joseph Marie) (suite)

Après un premier apprentissage dans sa ville natale, il reçoit à Paris les conseils de Charles Joseph Natoire (1700-1777) et suit l’enseignement de l’Académie (1741-1743). En 1743, il obtient le prix de Rome (David se résignant à la volonté du Seigneur qui a frappé son royaume de la peste, École des beaux-arts, Paris). Pensionnaire de l’Académie de France à Rome de 1744 à 1750, il assiste aux découvertes de Pompéi et d’Herculanum, est un lecteur assidu de Plutarque et de Tite-Live.

Ayant visité les grands centres de la création artistique en Italie, il rentre en France persuadé qu’il faut remédier aux « faiblesses » de l’École française, sous l’autorité de Raphaël et de Michel-Ange, mais aussi des Bolonais. Ces influences sont sensibles dans sa peinture religieuse, par exemple dans la suite peinte en Italie pour l’église Sainte-Marthe de Tarascon (scènes de la vie de sainte Marthe). Si son tableau de l’Ermite endormi (Louvre) rencontre un grand succès public, Vien est critiqué pour son réalisme par l’Académie, qui l’agrée cependant en 1751, puis le reçoit en 1754 (Dédale et Icare, École des beaux-arts).

Engagé surtout, jusqu’aux années 60, dans une restauration de la grande peinture religieuse, négligée depuis Jouvenet* et Restout*, Vien traite aussi avec prédilection les sujets antiquisants. Dès son séjour à Rome, il a été l’ami et le protégé du comte de Caylus, qui faisait des recherches sur les techniques picturales des Anciens — ainsi la peinture à l’encaustique, procédé selon lequel sont peints les tableaux exposés au Salon de 1755 (Nymphe de Diane occupée de l’Amour endormi). Une de ses œuvres les plus célèbres, la Marchande d’Amours (1763, palais de Fontainebleau), peinte pour Mme du Barry, est la transposition d’une fresque romaine. De tels tableaux seront à l’origine d’une durable mode « à la grecque ». Le goût de Vien pour l’Antiquité se manifeste aussi dans un travail d’ornemaniste, un recueil de Vases gravé par sa femme (1760). Dans la peinture de Vien, le souci d’étude réaliste des visages et des détails s’associe à une composition fondée sur le relief des figures, qui se détachent sur un fond d’architecture antiquisante ou sur un paysage (Saint Thibault offre au roi Saint Louis et à la reine Marguerite de Provence une corbeille de fleurs, 1775, musée de Versailles [commande royale de 1767]).

L’influence de Vien s’exerça beaucoup par son enseignement. Professeur à l’Académie, le peintre avait aussi ouvert une école particulière très fréquentée. David* fut son élève. Directeur de l’Académie de France à Rome de 1775 à 1781, Vien y imposa une discipline de fer tant dans les mœurs que dans le travail. Premier peintre du roi et directeur de l’Académie en 1789, il eut encore, malgré son âge, une importante activité d’administrateur et donna plusieurs séries de dessins, surtout consacrés à l’Antiquité grecque. Le Consulat et l’Empire lui réservèrent de nouveaux honneurs. Son fils unique, Joseph Marie Vien fils (1761-1848), également peintre, se consacra à la miniature et au portrait.

E. P.

Vienne

En Allem. Wien, capit. de l’Autriche ; 1 615 000 hab.


La géographie


Situation et site

Vienne s’est développée à un carrefour de voies naturelles qui correspond également à un carrefour géologique. En effet, c’est sur les derniers (ou les premiers) contreforts alpins que s’est installée la ville. Toutefois, les Romains, qui marquèrent de leur empreinte les pays au sud du Danube, avaient d’abord donné la préférence à Carnuntum, un peu plus à l’est de la capitale actuelle. Mais, les Barbares ayant facilement emporté la place, ils préférèrent un site plus facile à défendre. Située sur une petite rivière, la Wien, Vindobona a été implantée sur le dernier bourrelet alpin, avant l’actuel bassin de Vienne. La situation de carrefour était sauvegardée. Les Alpes favorisent, le long du Danube, la circulation longitudinale ; grâce au bassin géologique de Vienne, à la Morava et au couloir de Moravie, Vienne se situe sur la grande route Venise-Tchécoslovaquie-Allemagne-Scandinavie. L’histoire et la politique, sans doute, expliquent qu’un des plus remarquables carrefours de l’Europe centrale n’ait connu qu’un essor relativement tardif.

Le site n’est pas comparable à celui de Linz ou de Passau, où le passage du fleuve a donné naissance à une ville-pont. À la hauteur de Vienne, le Danube est violent et, jadis, il divaguait au milieu de prairies parsemées d’aulnes. Aussi a-t-on pu dire que Vienne n’est pas située sur le Danube.

Ses relations avec ce dernier, selon les Viennois, sont nonchalantes, un schlampertes Verhältnis. La ville cache le Danube à l’étranger, si bien que celui-ci peut se promener des heures durant à travers l’organisme urbain sans jamais voir le fleuve : rien de comparable à Paris et à Londres, où Seine et Tamise ont été intégrées dans le paysage urbain en donnant naissance à des fronts de fleuve accompagnant le cours d’eau. Le touriste débarquant d’un paquebot danubien sera accueilli par des gazomètres, des installations industrielles, des « casernes d’habitations », des gares de marchandises et les espaces verts destinés à recevoir les eaux du fleuve lors des crues. Avec quelque chance, il apercevra le toit de la cathédrale Saint-Étienne ; les charmes de la ville sont ailleurs. Ce n’est qu’à une date récente que des efforts, gigantesques, ont été faits pour intégrer le fleuve dans l’organisme urbain. La branche principale du fleuve coulait immédiatement aux pieds de l’enceinte urbaine jusqu’au xviiie s. Inondations, difficultés de navigation, marécages, foyers d’infection étaient autant d’obstacles à l’utilisation du fleuve.


Les grandes phases du développement urbain


Du xvie au xixe siècle

Au cours du xvie s., les Habsbourg choisissent Vienne, en raison de sa remarquable situation géographique, comme résidence principale de leurs possessions ; l’urbanisation de la noblesse, gagnant alors l’Europe centrale, accentuera l’essor de la ville. Cet événement se place quatre ans après une première alerte : Soliman le Magnifique, avec une armée de 250 000 hommes, avait essayé, en 1529, de prendre la ville.