Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

vieillesse (assurance) (suite)

Le montant de la retraite : forfait ou retraite proportionnelle

En ce qui concerne le montant des retraites, il convient de noter les deux tendances qui se sont affirmés depuis la Seconde Guerre mondiale ; pour les uns (en Allemagne par exemple), l’assurance vieillesse représente une fraction importante des prestations sociales ; pour les autres (en France par exemple), la part de l’assurance vieillesse a été réduite au profit des prestations familiales (v. familiale [politique]). Dans le premier cas, le montant des retraites est plus ou moins substantiel ; dans le second, il est beaucoup plus faible, ce qui a conduit les organisations professionnelles* à créer des régimes d’assurance vieillesse complémentaires. L’adoption d’un mode de calcul de la pension de retraite suppose tout d’abord qu’une première option soit faite entre un montant forfaitaire, sans rapport avec les revenus d’activité (système retenu en France en 1894 pour le régime des mineurs, dans lequel il n’est tenu compte que de la durée d’activité et de la pénibilité des travaux effectués ; le montant forfaitaire a été retenu en Grande-Bretagne de 1946 à 1959), et un montant proportionnel aux revenus d’activité.

Dans le cas où il y a proportionnalité entre le montant de la pension et les revenus d’activité, plusieurs procédés peuvent être adoptés :
— la retraite est calculée sur la base du dernier revenu d’activité — dûment revalorisé à chaque paiement d’arrérages — et en fonction du nombre d’années d’activité (par exemple 2 p. 100 du dernier revenu par année d’activité dans le régime français des fonctionnaires, un plafond de 75 à 80 p. 100 étant toutefois retenu) ;
— la retraite est calculée sur la base de la moyenne des revenus d’activité des dix dernières ou des dix meilleures années ; c’est la méthode adoptée par le régime général français de sécurité sociale, qui nécessite l’emploi d’indices pour revaloriser les revenus des années retenues afin de tenir compte de la dépréciation de la monnaie ou du relèvement du niveau* de vie ;
— la retraite, enfin, est calculée en « points » ; il est attribué à chaque assuré un certain nombre de points en fonction des cotisations versées chaque année à son compte : dans le système de la répartition, il est facile de calculer chaque année la valeur du point en tenant compte de la masse des cotisations attendues et du nombre de « points » acquis par l’ensemble des assurés qui ont demandé leur retraite ; c’est le procédé adopté en France en 1947 par le régime complémentaire de prévoyance des cadres et assimilés.


Réversibilité et cumul

En France, la plupart des régimes spéciaux prévoient l’attribution aux veuves d’une pension de réversion égale à la moitié de celle qui était versée ou à laquelle aurait pu prétendre l’assuré prédécédé ; le plus généralement, le veuf survivant d’une assurée ne peut prétendre à cette pension de réversion qu’en cas d’inaptitude au travail et d’insuffisance de ressources (ce procédé donne en apparence une valeur différente, quant à l’effet sur les prestations, à la cotisation de la femme et à la cotisation de l’homme, mais il ne faut pas oublier que la femme bénéficie d’une espérance de vie beaucoup plus grande). Les autres régimes de base réservent la pension de réversion au seul conjoint survivant non remarié justifiant de ressources insuffisantes, même — le plus souvent — s’il s’agit d’une veuve.

La possibilité pour le retraité de cumuler le revenu d’une activité nouvelle avec le montant de sa pension de vieillesse est psychologiquement souhaitable, mais, en période de crise économique, les pouvoirs publics ont tendance à l’interdire afin d’éviter la présence, sur un marché du travail où les offres d’emploi deviennent faibles, de travailleurs âgés d’autant plus susceptibles de limiter leurs prétentions de salaires qu’ils disposent par ailleurs d’un revenu assuré.


Les aspects de l’assurance vieillesse en France

Complexité, superpositions et inégalités caractérisent l’assurance vieillesse en France.

Il paraît improbable que la généralisation — avant 1980 sans doute — de l’assurance vieillesse à l’ensemble de la population (inactifs compris) mette fin aux caractéristiques actuelles du système français. Complexité, superpositions et inégalités tiennent, en effet, à diverses causes. Les conditions historiques de la formation du système ont eu leur influence en ce domaine, ainsi que les égoïsmes corporatifs des groupes socio-professionnels intégrés à l’assurance vieillesse obligatoire après 1946. Les exigences du maintien des droits acquis par les bénéficiaires des régimes spéciaux institués avant 1946, dont l’équilibre financier a été gravement atteint du fait du vieillissement de la population à l’intérieur des professions intéressées, ont puissamment joué : en 1974, on comptait dans le régime des mines un cotisant pour quatre pensionnés, alors qu’en 1959 il y avait tout juste parité ; ce même vieillissement est d’ailleurs constaté également dans la plupart des professions non salariées (les enfants des membres de ces professions donnent souvent le statut de « société » à l’entreprise où ils prennent la succession de leurs parents ; de ce fait, beaucoup deviennent — sur le plan juridique — des « salariés » et cotisent au régime général et non au régime particulier qui a la charge des pensions de vieillesse de leurs parents).

Le système français d’assurance vieillesse peut être caractérisé par un certain nombre de traits dominants, que l’on peut brièvement analyser.

• Coexistence de nombreux régimes obligatoires de base, pour lesquels diffèrent l’importance relative des cotisations dans le financement, l’âge, les conditions de l’exercice du droit à la retraite, le montant des pensions et leur mode de calcul, les possibilités de réversion.

Pour les salariés, régime général et mutualité sociale agricole ; nombreux régimes spéciaux (marins, mineurs, cheminots, fonctionnaires civils et militaires, ouvriers de l’État, agents des collectivités territoriales, agents d’E. D. F. et de G. D. F., clercs de notaires, employés de la Banque de France, agents du Théâtre-Français, agents des théâtres lyriques nationaux, agents de la R. A. T. P., etc.).

Pour les non-salariés, il existe une multiplicité de régimes en fonction de l’éventail des professions : régimes des exploitants agricoles, des artisans, des commerçants, des industriels, ainsi que des professions libérales.