Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

vent (suite)

On peut les classer en vents généraux, vents régionaux et vents locaux. Ce classement, fondé sur le critère dimensionnel, prête à discussion (où faire la séparation entre vents généraux, qui relèvent de la circulation atmosphérique générale, et vents régionaux, qui impliquent le substratum géographique, quand il s’agit des moussons asiatiques ?). Beaucoup d’auteurs regroupent dans les vents locaux les brises et des vents qui impliquent des systèmes de pressions plus étendus (mistral, tramontane). Nous pensons qu’il convient de placer dans les vents locaux les seuls phénomènes de brises et de réserver à des vents tels que le mistral, la tramontane, la bora, le sirocco, etc., l’expression de vents régionaux.


Vents généraux

• Les forts vents d’ouest des latitudes moyennes. On les trouve dans chaque hémisphère, avec leur accélération maximale entre les masses d’air chaudes (intertropicales) et froides (extratropicales). Ils augmentent en vitesse avec l’altitude jusqu’à 12 km (niveau de la tropopause), où se placent les grands courants-jets (v. circulation atmosphérique et jet-stream). Ces flux sont, à l’échelle planétaire, parallèles aux isothermes et aux isobares. Or, le parallélisme des flux avec les isobares (liées aux isothermes) s’intègre dans la loi aérologique fondamentale exprimée plus haut. Les vents d’ouest des latitudes moyennes sont particulièrement forts en altitude. Ils le demeurent à la surface, au-dessus des mers (faiblesse du frottement). L’hémisphère austral, le plus maritime, en fournit le meilleur exemple. Entre 40 et 50°, les vents d’ouest peuvent souffler en tempête sur plusieurs milliers de kilomètres. Ce sont les roaring forties.

• Les vents d’est des basses latitudes. Ils soufflent sur les faces équatoriales des anticyclones subtropicaux dynamiques. Il s’ensuit, en altitude, la présence des vents d’est équatoriaux, dont l’accélération maximale correspond, pour certains auteurs, au « jet-stream tropical d’est ». On ajoutera les vents d’est équatoriaux de la stratosphère (courant Krakatoa d’est) et les alizés. Ceux-ci sont dirigés par les anticyclones plus cohérents sur les océans sub- et intertropicaux que sur les continents. Il s’ensuit que les alizés sont surtout sensibles sur les masses océaniques où ils soufflent, dans l’hémisphère Nord, de l’est-nord-est, et dans l’hémisphère Sud, de l’est-sud-est. Leur degré de permanence et leur force résultent des vicissitudes des anticyclones qui les contrôlent, c’est-à-dire, en définitive, du dynamisme atmosphérique général (v. anticyclone et circulation atmosphérique). Les alizés sont des vents peu violents et de direction régulière quand ils ne sont pas perturbés par les ondes de l’est ou les cyclones. Les moussons*, que l’on doit considérer comme des alizés déviés après passage à l’équateur, entrent dans le cadre des vents généraux.


Vents régionaux

Nous dissocions donc, ici, des vents communément appelés « locaux », ceux qui impliquent un système de pressions relativement ample, qui sont organisés dans un ensemble étiré sur 1 000 à 2 000 km, voire davantage, bien que les effets de ce système se localisent souvent sur des régions de dimensions modestes. Les vents régionaux peuvent n’être d’ailleurs que les manifestations particulières de phénomènes plus généraux (« le vent d’ouest » sur la France s’intègre dans la circulation zonale d’ouest). Analysons un certain nombre de vents régionaux.

La tramontane, vent essentiellement roussillonnais d’entre nord et ouest, souffle entre le méridien de Sète et celui de Toulouse. Elle résulte de la présence simultanée d’une dépression sur le nord du bassin occidental de la Méditerranée et de hautes pressions sur le sud-ouest de la France ou le nord de l’Espagne. Elle est très turbulente à son débouché sur la plaine du Roussillon, du fait de l’importance des gradients de pression, des effets de canalisation dans les gorges (Corbières) et du frottement sur les pentes du Canigou, de la Montagne Noire et des Cévennes. Elle est également froide ; bien que se manifestant en toutes saisons, elle intervient surtout en hiver et au début du printemps et est issue de terres fraîches ou froides relativement septentrionales. L’effet de fœhn, qui lui procure la sécheresse, n’empêche pas ce caractère.

Le mistral, vent de secteur nord, s’étend sur la vallée du Rhône, les bords rhodaniens du Massif central et des Alpes, le Languedoc et la Provence. Il intervient lorsqu’une dépression se situe en Méditerranée au sud des Alpes et que de hautes pressions s’étendent, à partir de l’Ouest, jusqu’au Massif central. C’est un vent violent (fréquemment 100 km/h en altitude), turbulent (effet de canalisation dans le défilé de Donzère-Mondragon), froid et sec (origine continentale et subsidence). Il souffle normalement par temps clair ; il n’est pas rare de rencontrer au large de Marseille, sous un beau ciel bleu, une mer démontée. L’effet du mistral peut d’ailleurs se prolonger loin en mer, entre Baléares, Corse, et Sardaigne. Tel que nous le décrivons ici, ce vent est fondamentalement thermique. Avec ses « coups de froid » redoutés, il se présente en hiver et en intersaisons (comme la tramontane, avec laquelle il peut se combiner) [fig. 7], au moment où la différence des températures est grande entre la France du Centre, froide, et la Méditerranée, chaude. Dans de telles conditions, les dépressions frontales sont souvent reportées sur la Méditerranée. On sait cependant que ces dépressions peuvent être considérées comme la conséquence des flux issus du continent, par effet hydrodynamique d’obstacle « sous le vent » des Pyrénées et des Alpes (Paul Queney), de sorte que mistral et tramontane construiraient les dépressions méditerranéennes tout autant qu’ils en résulteraient. On peut admettre en fait que ces dépressions sont frontales et que les effets hydrodynamiques participent à leur creusement. De même que la tramontane, le mistral peut se manifester aussi en été. Les ressorts thermiques disparaissent alors. On a affaire à un mistral « général » qui dépend d’une situation isobarique couvrant de grands ensembles (fort étalement de l’anticyclone des Açores).

La bora souffle du nord-nord-est sur l’Istrie et la Dalmatie. Sa violence résulte des forts gradients de pressions qui s’établissent, en saison froide ou fraîche, entre les hautes pressions balkaniques thermiques et une dépression adriatique. On doit admettre aussi l’effet de pesanteur de l’air froid et lourd dévalant les pentes dinariques en direction de la mer.