Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

végétation (suite)

Les formations herbeuses fermées, pures ou arborées (parcs)

À l’échelle du globe, deux formations herbacées fermées couvrent des surfaces immenses : les savanes et les prairies. Bien que les premières comportent bien souvent des arbres, toutes deux posent le même problème, l’un des plus importants de la biogéographie : pourquoi les arbres de la forêt sont-ils remplacés par des herbes, particulièrement des Graminacées ?

• Le passage de la forêt à la prairie dans les régions tempérées. Dans le centre des États-Unis comme au centre de l’Europe orientale et de l’Asie moyenne règnent des climats continentaux dans lesquels la saison chaude coïncide avec une saison pluvieuse relativement courte. Sur des bandes de transition, dont la largeur varie d’une centaine à un millier de kilomètres (centre-ouest des États-Unis), les herbes remplacent les arbres de plus en plus au fur et à mesure que la période des pluies diminue en longueur et en intensité. Il semble que les formations herbacées soient, dans ces conditions, mieux adaptées qu’une forêt. En effet, après la courte saison favorable, où l’activité végétative peut être intense, l’appareil superficiel des herbes se dessèche et disparaît, alors qu’un arbre doit résister à la sécheresse et au froid pendant la plus grande partie de l’année.

• Le passage de la forêt à la savane dans les régions tropicales. On a évoqué des raisons analogues pour rendre compte du passage des forêts sempervirentes et mixtes aux savanes, formations herbacées adaptées à une saison des pluies relativement courte, peu arrosée et, de surcroît, irrégulièrement. Toutefois, d’autres auteurs, à la suite d’André Aubréville, considèrent les savanes, pour l’essentiel de leur extension, comme d’origine anthropique. L’homme, par ses défrichements, mais surtout par ses feux, serait responsable de la savanisation de l’Afrique notamment. Il semble qu’après trente années de travaux et de discussions on puisse nuancer ces explications extrêmes : il apparaît certain que les savanes ont une origine naturelle et sont une formation climacique, adaptée selon le cas surtout au climat ou surtout aux sols ; il est non moins certain que les hommes, particulièrement en Afrique, les ont considérablement étendues.

D’ailleurs, dans le cas des prairies également, l’homme peut être tenu comme responsable de leur extension aux dépens des « parcs ».

• Les prairies. À la différence des savanes, cette formation herbacée à hautes herbes (tall-grass prairie) ne comporte presque pas d’arbres ; d’autre part, ces immenses étendues herbeuses de la zone tempérée entrent en repos non pas à cause de la sécheresse seule, mais d’abord à cause du froid. À la limite, il peut y avoir deux périodes de repos pendant l’année.

En Amérique du Nord, à cause de la disposition méridienne des montagnes et des plaines, la prairie n’a pas une extension zonale comme dans l’Ancien Continent, mais elle s’allonge du nord au sud, sur 300 à 800 km de largeur, du Canada central au Texas. C’est la formation herbacée des grands États du Midwest, des Grandes Plaines. Toutefois, sauf au nord, la prairie à hautes herbes s’arrête avant les Rocheuses, et une prairie à herbes courtes comportant plus de Graminacées annuelles (shortgrass prairie) lui fait suite vers l’ouest. La formation commence à s’ouvrir, et la steppe apparaît.

Dans l’Ancien Monde, en climat continental, du piémont des Carpates au haut Amour s’allonge la « steppe russe », qui est en fait une prairie. Sur une largeur variable de 200 à 700 km, elle s’interpose entre la bande forestière de feuillus ou de forêt mixte au nord et les formations steppiques au sud. La disposition zonale tout à fait remarquable de l’ensemble se suit toutefois assez mal au sud de la Sibérie orientale à cause de forts reliefs est-ouest qui en bloquent l’extension vers le sud et qui sont même, à deux reprises, responsables de sa totale disparition.

Dans l’hémisphère Sud, la Pampa argentine, le Veld sud-africain et les grandes étendues herbeuses de Nouvelle-Zélande sont aussi des prairies très semblables à la prairie américaine, d’autant plus qu’elles s’étendent toutes sur des grandes plaines ou des grands plateaux. Dans tous les cas, la présence de montagnes les fait disparaître.

• Les savanes. À la différence des prairies, on peut distinguer la savane herbeuse de la savane boisée. En effet, alors que les rares arbres de la prairie sont de la même espèce que ceux des forêts voisines, les arbres des savanes sont différents de ceux de la forêt ; la plupart sont à feuilles caduques ; l’écorce est épaisse, et les troncs sont noueux. Aussi les arbres occupent-ils dans le paysage une place beaucoup plus importante dans plus de la moitié des cas.

Les savanes herbeuses, surtout de Graminacées, sont bien représentées au Gabon, au Zaïre (savanes incluses), en Australie et au Brésil (Campo limpo). Les arbres sont confinés au bord des rivières et constituent les forêts-galeries.

Les savanes arborées occupent en Afrique d’immenses domaines entre la Guinée et le Soudan dans l’hémisphère Nord, et elles couvrent près de la moitié de l’Afrique méridionale au sud de l’équateur. On les trouve également en Australie (est et nord-est), au Deccan et à Madagascar. Enfin, en Amérique du Sud, elles occupent deux domaines : ce sont les llanos de la vallée de l’Orénoque et les campos cerrados du Brésil central.

• Les parcs tropicaux. Cette formation ressemble à la forêt par la taille des arbres ; elle en diffère par l’espacement. Elle ressemble aux savanes par l’importance des herbes, mais elle diffère de la savane arborée parce que les couronnes d’arbres y sont presque jointives. Aussi les parcs présentent-ils deux formations superposées à activité décalée : herbes saisonnières héliophiles et arbres à feuilles caduques, quoique irrégulièrement. Il s’agit du cerrado du Brésil, du parc d’Eucalyptus en Australie. On trouve également de tels parcs en Afrique occidentale, en Inde...