Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

vaudois (suite)

Valdo, le premier, l’a compris ; on ne sait ni son origine exacte, ni sa date de naissance, ni son nom précis (Valdus, Valdès, Vaudès, de Vault ?) et, en tout cas, pas son prénom : entre 1173 et 1176, il se « convertit » et quitte sa profession de marchand riche, tout en restant dans la ville où il l’a, jusqu’alors, exercée, Lyon. Il appartient à la haute société des bourgeois fortunés ; il peut parler avec l’archevêque de plain-pied. C’est, paraît-il, la mort d’un ami, lors d’un banquet, qui l’amène à se poser les questions dernières, et un chanoine qui le rencontre lui indique la voie de la paix et du salut : « Va, vends tes biens et suis-moi. » Avec une immédiateté caractéristique, Valdo ne se contente pas d’écouter la parole : il l’endosse, et ce littéralisme existentiel deviendra le fait de tous ses compagnons. Avec une stupéfiante assurance, Valdo met en pratique ce qu’il a entendu et, sans se soucier des prérogatives magistérielles, il se met à parcourir les lieux publics : « Selon la grâce qui nous a été donnée, nous avons décidé de prêcher librement, sans crainte de personne. »

Il faut pour cela une traduction dans la langue du peuple ; ce que l’on sait par cœur ne suffit pas, ni quelques textes d’Ambroise, de Jérôme, d’Augustin et de Grégoire le Grand, dont il dispose. Valdo s’adresse à un prêtre, Bernard Ydros, et à un grammairien, Étienne d’Anse, et leur fait traduire bon nombre de livres bibliques et un recueil de paroles des saints. Un minimum d’organisation (le principe absolu d’aller deux à deux, quelques fonctions diversifiées : majoral, barbe, diacre) et un début de réflexion théologique s’ébauchent : peu à peu, les particularités vont s’accentuer : refus de tout mensonge, du serment, de l’appel aux tribunaux, de la peine capitale et de la guerre, de la prière pour les défunts et des sacrements autres que le baptême, l’eucharistie et la pénitence... Ici s’aperçoivent quelques analogies avec les réformateurs, mais plus encore avec les anabaptistes à venir.

Au début, cette souveraine liberté est fort bien considérée par le clergé lyonnais, édifié par la consécration et la piété des Pauvres. En 1179, le pape Alexandre III reçoit Valdo au concile du Latran et lui donne l’accolade ; en même temps, il charge des clercs anglais de l’interroger et de le ridiculiser.

De retour à Lyon, Valdo se heurte à l’archevêque, Jean Bellesmains, qui conteste à ces laïques le droit d’enseigner et de prêcher, et les somme de rentrer dans l’obéissance à la hiérarchie. Comme, au nom de l’évangile, Valdo refuse de se soumettre, les Pauvres sont expulsés de Lyon en 1181, puis excommuniés au synode de Vérone en 1184. Ils n’en continuent pas moins leur action, ce qui leur vaut d’être poursuivis et persécutés, mais leur dispersion sert l’extension du mouvement : Provence, Dauphiné, Haut-Piémont, Lombardie, Espagne, Allemagne et Europe du Nord les voient s’implanter.

En 1215, le IVe concile du Latran les condamne comme hérétiques. C’est sans doute à ce moment-là, à peu près, que Valdo serait mort (en Bohême en 1217 ?). Mais l’expansion se poursuit et, avec elle, une impitoyable persécution, jalonnée de « croisades » et d’horribles massacres.


La postérité

C’est en 1532 que les descendants des Pauvres de Lyon, habitant les hautes vallées piémontaises, décident, sous l’action du Savoisien Guillaume Farel, d’adhérer à la Réforme, ce qui n’a pas pour effet, bien au contraire, d’apaiser l’ardeur de la répression ; par contre, l’émigration se poursuit, et les avatars d’une histoire singulière qui les voit, en 1806, intégrés par Napoléon à l’Église réformée de France et, dans la seconde moitié du xixe s., former de vivantes colonies en Amérique du Sud.

Actuellement, les vaudois sont environ 100 000 en Italie, de 20 000 à 25 000 en Amérique du Sud, particulièrement en Uruguay, et de 12 000 à 15 000 dans leur diaspora européenne. Ils ont une faculté de théologie réputée à Rome, plusieurs revues et périodiques ainsi que de nombreuses œuvres diaconales dans toute l’Italie.

La spiritualité vaudoise marque très fortement le protestantisme italien et, par lui, le monde œcuménique de la péninsule : en témoigne l’impact de l’hebdomadaire Nuovi Tempi, qui a fusionné avec le catholique Com. Elle s’y affirme par trois constantes : la liberté et la maturité de laïques « missionnaires », une recherche ecclésiologique en rupture avec les structures autoritaires du « christianisme politique », une démarche théologique refusant le discours idéaliste des théologiens plus ou moins consciemment intégrés à l’ordre établi et visant à une étroite articulation du pensé sur le vécu. Un des grands évangélistes du xxe s., Tullio Vinay, membre des communautés vaudoises, a eu depuis 1945 un rayonnement mondial.

G. C.

➙ Mystique / Protestantisme.

 E. Comba, Histoire des Vaudois (Fischbacher, 1887 ; nouv. éd., 1898-1901, 2 vol.). / J. Jalla, Histoire des Vaudois des Alpes et de leurs colonies (Torre Pellice, 1934). / M. Martini, Pierre Valdo (Labor et Fides, Genève, 1962).

Vaughan Williams (Ralph)

Compositeur anglais (Down Ampney 1872 - Londres 1958).


Ce fils d’un pasteur de l’ouest de l’Angleterre fut bien ce campagnard râblé et réfléchi que ses origines annonçaient. Bien qu’il ait commencé à composer de bonne heure, il ne produisit aucune œuvre importante avant l’âge de trente-cinq ans. Après une formation toute traditionnelle à Londres, il alla se perfectionner à Berlin auprès de Max Bruch (1838-1920), la vie musicale anglaise de l’époque étant encore totalement dominée par l’influence germanique. Mais, à son retour, il commença à s’intéresser passionnément à la musique de l’époque Tudor, et surtout aux richesses encore vierges d’un folklore modal miraculeusement conservé. Il fut le membre le plus ardent et le plus actif de la Folk Song Society, fondée par Cecil James Sharp, et sillonna les campagnes anglaises de 1904 à 1910, recueillant des milliers de mélodies au moment exact ou Bartók et Kodály se livraient à une prospection semblable en Hongrie. Il se rendit très vite compte que ces mélodies ne pouvaient, en aucun cas, se plier au carcan métrique, harmonique et tonal de la tradition académique allemande qui lui avait été enseignée.