Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
V

Valois (suite)

L’organisation et la composition

Le premier élément en est l’hôtel, qui devient au xvie s. la Maison du roi. Placée sous l’autorité du grand maître de l’Hôtel, ou grand maître de France, secondé par un premier maître d’hôtel, la Maison du roi comprend les officiers et serviteurs domestiques attachés à la personne même du souverain et regroupés en services dirigés par de grands officiers ; la Chambre, placée sous l’autorité du grand chambrier (grand chambellan après 1550) ; la Petite Écurie et la Grande Écurie, sous celle du grand écuyer ; la Vénerie et la Fauconnerie, sous celles des organisateurs des chasses royales, le grand veneur et le grand fauconnier ; le service médical et le service du culte, dirigés par un premier médecin et par un grand aumônier depuis Charles VIII, etc. À l’exception de l’Argenterie et de l’Écurie, qui relèvent du Trésor de l’épargne, ces services sont gérés par la Chambre aux deniers, dont l’émanation est, à partir du règne de François Ier, le Bureau des maîtres d’hôtel, organe de liaison entre le grand maître et les officiers.

Le second élément de la Cour est constitué par les domestiques et commensaux du roi, qui sont appelés quotidiennement à la Maison du roi : membres du Conseil privé, maîtres des requêtes ordinaires de l’Hôtel, notaires et secrétaires du roi.

En troisième lieu, la garde en armes, rattachée à la Maison du roi, comprend de nombreux corps : quatre compagnies d’archers de la garde (dont la compagnie de la garde écossaise créée par Charles VII pour assurer sa garde rapprochée de jour et de nuit) ; les cent-suisses ; les deux cents gentilshommes de la Maison dits « à bec-de-corbin » ; le régiment des gardes françaises (à partir de 1563) ; les gardes de la porte de la prévôté de l’Hôtel.

À côté de la Maison du roi et organisées sur son modèle existent au début du règne de François Ier une Maison de la reine, une Maison des enfants royaux, une Maison de Madame (Renée de France, fille de Louis XII), rassemblant des effectifs parfois nombreux puisque celle des enfants royaux compte 240 personnes en 1523. Enfin, au service exclusif du souverain, de nombreux marchands et artisans suivant la Cour (160 sous François Ier, 480 après 1606), auxquels se rattachent les artistes, représentent la cinquième composante de la Cour.

Comprenant au total 18 000 personnes en 1564-65 selon Bernard Palissy, la Cour est une véritable ville ambulante. Elle campe sous des tentes de toile lors de ses déplacements de château en château, qu’elle meuble avec les tapisseries, le linge, la vaisselle du souverain, ce qui la contraint à mobiliser plus de 12 000 chevaux ainsi que d’innombrables vivandiers et pourvoyeurs chargés d’assurer le ravitaillement nécessaire sous le contrôle de la prévôté de l’Hôtel, dirigée par le prévôt de l’Hôtel et son lieutenant, qui ont pouvoir de taxer les denrées de première nécessité, de réquisitionner les vivres, enfin de connaître toutes les causes intéressant les personnes de la Cour ou celles qui la suivent.

Le cérémonial

Rois de droit divin, revêtus d’un caractère sacré par la vertu du chrême contenu dans la sainte ampoule, qualifiés de Majesté, titre réservé à l’empereur jusqu’au milieu du xve s., détenteurs enfin d’une puissance absolue qui leur donne droit de vie et de mort sur leurs sujets, les Valois font de la Cour le cadre naturel du culte de la personne royale. Accéléré sous le règne d’Henri III, ce processus aboutit à faire du souverain un personnage hors du commun, isolé de ses sujets en vertu d’une étiquette très stricte d’inspiration polonaise et surtout espagnole : réglementation des entrées dans la chambre du roi au lever et au coucher de celui-ci ; limitation de la présence du peuple aux repas pris en public par le monarque selon un cérémonial de plus en plus compliqué fixant à qui doit revenir l’honneur de « bailler la serviette de Sa Majesté », de présenter les plats, etc.

Ainsi les Valois préparent-ils l’ère d’adulation monarchique qui débute avec l’avènement des Bourbons en 1580 et qui renforce par là même l’absolutisme des souverains, dont le pouvoir n’est plus limité en fait que par les lois fondamentales du royaume, par les privilèges que détiennent les corps intermédiaires sinon mêmes certains particuliers, enfin par l’autorité que les états généraux s’arrogent depuis leur réunion à Tours en 1484.

Les Valois et la naissance du sentiment national

Ayant dès le début du xive s. le sentiment confus d’appartenir à une communauté linguistique, religieuse et économique, les sujets des Valois prennent peu à peu conscience d’appartenir à la natio gallicana à la faveur de la guerre de Cent Ans, qui les oppose à l’ennemi anglais.

Rejetant les prétentions d’Édouard III et de Charles II de Navarre, condamnant la collusion d’Étienne Marcel avec ce dernier en 1358, acceptant avec difficulté les clauses du traité de Brétigny-Calais de 1360 qui les fait passer dans le sud-ouest du royaume sous la souveraineté des Plantagenêts, n’hésitant pas dans ces conditions à faire appel des décisions du roi d’Angleterre à la justice du roi de France (appel gascon du comte d’Armagnac et du sire d’Albret le 8 septembre 1368), les Français acceptent encore plus difficilement les conséquences politiques du traité de Troyes de 1420 malgré l’adhésion à ces dernières du parti bourguignon et surtout d’une Université de Paris sclérosée dans ses méthodes et incapable de comprendre les raisons et la profondeur de leur révolte.

Atteints dans leurs biens et dans leur chair par le même ennemi, l’Anglais, ils éprouvent peu à peu un véritable sentiment patriotique qui s’exprime tant dans le Quadrilogue invectif d’Alain Chartier, rédigé en 1422, que dans l’Histoire de Charles VI écrite peu après par Jean Jouvenel des Ursins.

Grâce à l’action de Jeanne* d’Arc, le sentiment national s’incarne alors dans la personne de Charles VII, dont la légitimité est confirmée par la délivrance d’Orléans le 8 mai et par le sacre de Reims le 17 juillet 1429.