Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

avalanche (suite)

La neige, ses propriétés, ses transformations

La neige naît dans l’atmosphère : par cristallisation de gouttelettes d’eau microscopiques en état de surfusion ; par condensation et cristallisation de vapeur d’eau sous forme de cristaux de glace.

Ce phénomène se réalise lorsque la température est inférieure à 0 °C, autour de noyaux de condensation ou de cristallisation qui peuvent être de minuscules particules de glace, des grains de poussière, etc. Les cristaux ont des aspects fort différents (aiguilles, plaquettes, étoiles, colonnes) selon la température à laquelle ils se forment, mais ils se produisent toujours dans le système hexagonal ; ils grossissent au contact de l’humidité contenue dans l’air ; ils tombent isolés ou agglomérés en flocons. Au sol, les flocons s’entassent.

Tant que les cristaux originaux sont intacts, on a de la neige fraîche. Puis les fins embranchements des étoiles (dendrites) s’entrelacent, se feutrent, se subliment, tandis que les branches principales se raccourcissent et grossissent : la neige se tasse, augmente de densité, devient poudreuse (fig. 1). La cristallisation se fait dans l’atmosphère à des températures pouvant aller de 0 à – 25 °C. Une fois au sol, la neige subit des transformations ou des métamorphoses, sous l’influence de son propre poids, de la température, du vent.

Le poids tasse la neige. De plus, si la surface du manteau neigeux est soumise aux variations de températures extérieures, notamment entre le jour et la nuit, ces variations ne pénètrent guère à l’intérieur ; au sol, la température reste voisine de 0 °C. Il s’ensuit un transport de vapeur d’eau du bas vers le haut, cette vapeur d’eau se recristallisant au contact des zones plus froides au fur et à mesure qu’elle monte. Il en résulte un grossissement des cristaux des couches supérieures en prismes et gobelets, qui constituent une neige coulante.

Lorsque la température extérieure s’élève au-dessus de 0 °C ou en cas de pluie, la couche supérieure de neige s’imprègne d’eau, laquelle s’infiltre progressivement vers le bas. Au regel, la couche ainsi humidifiée se prend en masse, les divers cristaux adhérant les uns aux autres ; le résultat est la formation d’une croûte plus ou moins épaisse, plus ou moins solide. Cette croûte, reprise par des gels et des regels successifs, notamment au printemps ou sur les versants sud bien exposés au soleil, s’épaissit, forme la neige dite neige de printemps. Bientôt tout le manteau neigeux subit cette transformation et se tasse finalement en névé. Les névés, selon l’altitude, disparaissent par fonte au cours du printemps ou de l’été, ou se maintiennent en donnant naissance à la glace des glaciers.

Le vent a une action profonde sur la neige. Cette action dépend essentiellement de la température et de l’humidité de l’air. Le vent froid a peu d’action sur les neiges consolidées en croûtes (sauf qu’il peut gêner la fusion superficielle due au soleil). Mais il a une action rapide sur la neige poudreuse. Sous son influence, les cristaux sont transportés, roulent, se brisent et s’agglomèrent en couches plus ou moins compactes, sous forme de plaques à vent (croûtes plus ou moins épaisses qui se forment sur la neige poudreuse restée en place), de congères, qui se forment à la manière des dunes, et de corniches, qui s’installent sur les crêtes. Les plaques à vent et les corniches constituent un des dangers importants de la montagne enneigée (fig. 2).

Le vent chaud, s’il est sec (fœhn notamment), a une action profonde et rapide sur la neige, qui se transforme en vapeur d’eau sans fondre (sublimation). L’ablation due au fœhn est quatorze fois plus forte que celle qui est due au soleil.


Propriétés mécaniques de la neige

• Poids spécifique. La densité de la neige dépend essentiellement de sa nature et de son degré de transformation.

• Plasticité. Le manteau de neige peut se déformer par plasticité sous l’effet de forces diverses, principalement la pesanteur : glissement, compression, adaptation aux ondulations du terrain.

• Résistance à la rupture. La cohésion des cristaux de neige entre eux s’oppose à la rupture de la neige. Elle dépend essentiellement de la nature de la neige, de la nature des contacts et de la température. Elle est liée à l’existence d’un frottement interne. Il faut distinguer le frottement statique (de départ) et le frottement cinétique (de mouvement).

La neige fraîche a un très gros coefficient de frottement statique (elle tient à la verticale sur les murs ou les troncs d’arbre), mais un faible coefficient de frottement cinétique (en cas de rupture, la neige fraîche constitue un excellent lubrifiant).

Les coefficients de frottement varient beaucoup avec la température ; ils diminuent considérablement lorsque la température s’élève surtout vers – 1 ou – 2 °C : d’où une influence considérable de ce facteur dans le déclenchement des avalanches.

• La stratification du manteau de neige. La couverture de neige se compose de couches superposées appelées strates, qui résultent des chutes de neige successives. Ces chutes ayant lieu dans des conditions météorologiques très variées et ayant subi chacune des transformations également variables, il en résulte une superposition des strates de natures fort différentes. La cohésion interne d’une strate et la cohésion des strates entre elles sont fondamentales pour l’équilibre d’une pente de neige et, par conséquent, fondamentales quant aux possibilités de déclenchement des avalanches.


Mécanisme de déclenchement

L’avalanche se déclenche lorsque, par suite d’une rupture d’équilibre, des masses de neige plus ou moins importantes se mettent en mouvement le long d’une pente.

Sur une pente, le manteau neigeux est soumis à des forces contraires :
— forces qui l’attirent vers le bas. Ce sont essentiellement la traction due au poids de la neige qui favorise le cisaillement, et cela d’autant plus que la pente est plus forte. L’augmentation d’épaisseur de la couche (nouvelle chute), la présence d’eau liquide dans la masse (pluie), toute surcharge extérieure (passage d’un homme, effondrement de corniches) sont donc des facteurs favorables au déclenchement (fig. 3) ;
— forces qui le retiennent sur place. Ce sont essentiellement la résistance due à la cohésion, l’adhérence au sol, l’adhérence des strates entre elles, l’ancrage du manteau (forêts, gros rochers, éboulis anguleux, etc.). La diminution de la cohésion (élévation de la température, présence d’eau dans une strate, changement de structure par métamorphose) est donc un facteur favorable au déclenchement (fig. 4).