Uruguay (suite)
Vers la solution militaire
Le Mouvement national de libération de l’Uruguay, fondé en 1962, se fait connaître sous le nom de tupamaros (de Túpac Amaru, nom pris par le révolutionnaire péruvien J. G. Condorcanqui [1740-1781]). À partir de 1965, il se lance dans de spectaculaires opérations : enlèvements, attentats, exécution d’agents américains participant à la répression, le tout avec un grand sens de la publicité, la sympathie de la population, qui voit là un Robin des Bois collectif, et des complicités à l’intérieur même de l’État. La violence et l’apparition d’un groupe refusant le jeu traditionnel signifient que l’enlisement est devenu insupportable. À travers les tupamaros s’exprime une prise de conscience négative : les Uruguayens découvrent que rien ne va plus. En 1971, Pacheco ne peut se représenter aux élections, mais l’opposition de gauche ne barre pas la route à son candidat, Juan María Bordaberry (né en 1928), devenu le 1er mars 1972 président pour cinq ans.
À quarante-trois ans, ce grand propriétaire millionnaire affiche des sympathies pour le système politique brésilien, mais manque aussi bien de programme que d’équipe capable de l’appliquer. Or, la situation est telle que l’expédition des affaires courantes n’est même plus possible. La question que tout le monde se pose est de savoir si le président terminera son mandat. Dès 1973, on croit venu le coup d’État militaire que le pays attend depuis des années : en février, les militaires imposent un remaniement ministériel, mais, plutôt que de s’emparer d’un pouvoir qui est à leur portée, ils se contentent d’un transfert progressif des responsabilités. Au cours des années suivantes cette évolution se précise, sans que l’on puisse dire en quel sens se politise l’armée. Le Parlement est suspendu, puis les syndicats sont dissous, et les partis de gauche interdits. La « Suisse américaine » perd ses institutions politiques après avoir perdu la prospérité. Enfin, le 12 juin 1976, Bordaberry est déposé par l’armée qui poursuit la politique de durcissement du régime.
J. M.
➙ Amérique latine / Montevideo.
G. Pendle, Uruguay (Oxford, 1952). / R. H. Fitzgibbon, Uruguay, Portrait of a Democracy (New York, 1954 ; nouv. éd., 1966). / P. B. Taylor, Government and Politics of Uruguay (New Orleans, 1960). / A. Labrousse, les Tupamaros, guérilla urbaine en Uruguay (Éd. du Seuil, 1971). / A. Methol Ferré, El Uruguay como problema (Montevideo, 1971).