Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
U

Uruguay (suite)

La population et l’économie

L’Uruguay, qui ne comptait encore que 30 000 habitants en 1800 et 1 million en 1908, en abrite maintenant à peu près 3 millions. Mais le taux d’accroissement s’est considérablement ralenti : alors que la natalité était l’une des plus élevées de l’Amérique latine au début du xxe s., elle est maintenant l’une des plus faibles, avec celle de l’Argentine, et ne dépasse pas 20 p. 1 000 ; la mortalité, également faible, de 9 p. 1 000, laisse donc un taux de croissance d’environ 1 p. 100 par an. L’apport migratoire est maintenant négligeable, l’immigration ayant pratiquement cessé depuis 1930. Cette situation démographique aboutit à une pyramide des âges assez différente de celle des autres pays de l’Amérique latine, avec un pourcentage relativement faible de jeunes, alors que les adultes forment 63 p. 100 de l’ensemble de la population ; la proportion des plus de soixante-cinq ans a triplé au cours du xxe s., ce qui indique un début de vieillissement de la population. Les actifs, qui constituent à peu près 40 p. 100 de la totalité des habitants, sont occupés pour plus de la moitié dans le secteur tertiaire, tandis que le reste se partage à peu près également entre le secteur secondaire et le secteur primaire.

En effet, l’économie repose encore sur les activités agro-pastorales, mais celles-ci sont peu consommatrices de force de travail. L’élevage, bovin (8,5 millions de têtes) et ovin (20 millions de têtes), occupe l’essentiel de l’espace et est fondé, la plupart du temps, sur l’utilisation des pâturages naturels, avec un faible essor des pâturages artificiels. Il se pratique essentiellement dans de grandes propriétés et ne reçoit guère d’investissements permettant d’en améliorer la qualité. L’agriculture tend de plus en plus à se diversifier, mais reste également frappée par un manque de rendement. Le blé, par exemple, demeure la culture la plus importante (0,5 Mt) et fournit une récolte suffisante pour le pays, avec, éventuellement, un surplus destiné à l’exportation, mais les rendements ne dépassent pas 15 quintaux à l’hectare. Le maïs et le riz sont en expansion, avec des rendements plus considérables. La culture du lin et celle du tournesol sont essentiellement destinées à la consommation interne ; il en est de même des cultures fruitières et de l’horticulture des alentours de Montevideo.

L’industrie, qui avait connu une forte croissance pendant et immédiatement après la Seconde Guerre mondiale (avec un taux de 8 p. 100 par an entre 1950 et 1955), est maintenant stagnante : les branches traditionnelles, textiles, tanneries et alimentation, ont nettement décliné ; les activités plus dynamiques comme le raffinage du pétrole et la pétrochimie progressent encore légèrement, grâce à la raffinerie de la baie de Montevideo ; il en est de même des papeteries et de la chimie. En revanche, la métallurgie et le travail du caoutchouc sont stagnants.

Dépourvu de ressources minières et de combustibles fossiles, l’Uruguay a cherché à pallier ce déficit par la construction d’un lac artificiel sur le río Negro ; une centrale hydraulique assure une partie de sa consommation d’électricité. Mais le pays reste tributaire de l’étranger pour une partie de ses besoins en énergie. Son commerce extérieur est toujours dominé par l’exportation des produits pastoraux, qui représentent 80 p. 100 du total des ventes, les principaux étant la viande et ses dérivés, les laines brutes, les cuirs et les peaux. Les importations sont constituées par des matières premières, des sources d’énergie et des produits industriels semi-finis. Les États-Unis et le Brésil sont les principaux fournisseurs du pays, dont les principaux clients sont les États industrialisés de l’Europe occidentale. L’Uruguay reste en fait un pays d’économie agricole traditionnelle, et l’essentiel de son espace géographique est organisé en fonction de cette orientation, malgré un certain nombre de différences régionales.


Les aspects régionaux et leurs différences

En fonction des modes d’occupation du sol et à défaut de milieux naturels diversifiés, on peut distinguer plusieurs zones rurales et une grande zone urbaine autour de Montevideo.

Dans le centre et l’est du pays prédomine l’immense prairie, légèrement ondulée, comportant de petites zones de bois plantées d’eucalyptus, où s’abritent les animaux ; c’est l’espace pastoral proprement dit, avec de petits hameaux souvent misérables, où habitent les ouvriers, les peones, qui s’occupent des bêtes, et avec des estancias, c’est-à-dire des fermes dispersées dans la prairie. La densité animale reste faible, avec moins d’une tête de bétail par hectare.

Le long du río Uruguay, on peut distinguer une deuxième région, où l’élevage, toujours dominant, laisse une place plus importante à l’agriculture : blé ou plantations de fruits (citronniers autour de Paysandú). Quelques usines de conserves se créent en même temps que des industries alimentaires, en particulier des sucreries grâce à l’extension de la culture de la canne à sucre ou de la betterave. Dans cette zone, le long du río Uruguay, se trouvent deux villes de quelque importance, Salto et Paysandú, les deux plus grandes villes après Montevideo, mais la population de chacune ne dépasse pas 50 000 à 60 000 habitants.

C’est seulement aux alentours de la capitale que l’agriculture l’emporte sur l’élevage : cette troisième région peut être considérée comme la zone agricole intensive, avec de l’horticulture et des productions maraîchères dans un premier anneau autour de la capitale ; puis, dans une seconde ceinture, ces cultures alternent avec le maïs et l’élevage de la volaille ou des porcs. À l’ouest s’étend une troisième zone un peu plus éloignée de Montevideo, qui se consacre à une agriculture intensive reposant sur les céréales, le maïs et les fourrages, tandis que l’élevage, également intensif, se voue à la production laitière, qui alimente des fabriques de fromage et de beurre. Dans toute cette partie, la propriété est beaucoup plus morcelée, et les petites exploitations fournissent l’essentiel de la production agricole, à l’opposé des grandes estancias des zones d’élevage.