Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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turbine (suite)

Diagramme de Mollier

L’énergie interne, ou enthalpie, de la vapeur d’eau dépend essentiellement de sa température et de sa pression, et les valeurs correspondantes sont représentées graphiquement sur le diagramme de Mollier, avec en abscisses l’entropie (kcal/kg.°C) et en ordonnées l’enthalpie (kcal/kg) ; l’indication, par exemple, d’une valeur d’enthalpie de 700 kcal/kg correspond au fait que l’énergie interne de la vapeur d’eau est alors de 700 kilocalories par kilogramme de vapeur (la kilocalorie étant la quantité de chaleur nécessaire pour élever de 1 °C la température d’une masse d’eau liquide de 1 kg).

Le diagramme de Mollier est divisé en deux zones (fig. 4), séparées par la courbe de saturation : zone de vapeur humide et zone de vapeur surchauffée. La zone de vapeur humide correspond à la phase d’ébullition, caractérisée par un titre X de vapeur matérialisant le pourcentage d’eau liquide effectivement vaporisée ; l’eau liquide n’est totalement transformée en vapeur que sur la courbe de saturation X = 1. La zone de vapeur surchauffée correspond à la vapeur sèche, dont on peut modifier à volonté les valeurs de température et de pression.

On trouve en outre quatre types de courbes :
1. Les isobares, ou courbes d’égale pression, sont graduées de 0,01 bar à plus de 200 bar.
2. Les isothermes, ou courbes d’égale température, sont graduées de moins de 50 °C à plus de 600 °C. Ces courbes ne sont tracées que dans la zone surchauffée et s’arrêtent sur la courbe de saturation, à l’intersection de l’isobare de la tension de vapeur correspondante. En zone humide, la température d’ébullition reste constante tant que toute l’eau liquide n’est pas vaporisée en totalité : pour lire une température en zone humide, il faut suivre l’isobare jusqu’à son intersection avec la courbe de saturation et lire la température sur l’isotherme correspondante ; en conséquence, une isotherme et une isobare sont confondues en zone humide.
3. Les courbes de titre X de vapeur se trouvent uniquement en zone humide, la courbe X = 1 étant par définition la courbe de saturation.
4. Les courbes de volume spécifique, graduées en mètres cubes par kilogramme, correspondent au volume occupé par 1 kg de vapeur en tout point du diagramme. En particulier, on constate que, sur les centrales de puissance, le volume spécifique de la vapeur vive est d’environ 0,03 m3/kg, alors que celui de la vapeur condensée peut atteindre 50 m3/kg, c’est-à-dire de 1 500 à 1 800 fois plus. Ce phénomène est utilisé pour déterminer les dimensions des divers étages.

Enfin (fig. 4), une turbine à vapeur fonctionne entre deux points tels que M1 et M2 ou M′2. Le point M1 correspond à la vapeur vive que l’on détend réellement jusqu’au point M′2 (fin théorique de détente en M2), correspondant à une chute enthalpique réelle égale à Hi, alors que, sans pertes, la chute théorique aurait été égale à Hth. Cette représentation matérialise le fait que toute transformation réelle s’effectue toujours avec accroissement d’entropie, donc avec perte d’énergie.

Sur les centrales de puissance que l’on réalise actuellement, on dispose d’une chute réelle Hi voisine de 250 kcal/kg avec un débit de vapeur de 1 800 t/h, soit 500 kg/s. En ne tenant pas compte d’une éventuelle resurchauffe, le travail utile réel vaut
250 × 500 = 125 000 kcal/s (1 kcal = 4 185,5 J).
Le watt correspondant à un travail de 1 joule par seconde, la puissance utile réelle d’une telle centrale vaut
125 000 × 4 185,5 = 523 200 000 W = 523,2 MW.


Cycle d’une turbine à vapeur

La figure 5 représente le cycle théorique de base d’une turbine à vapeur, et cela à la fois dans un diagramme entropique et dans un diagramme de Mollier. On rencontre successivement :
AB : mise sous pression de l’eau en phase liquide (réalisée par une pompe spéciale, appelée pompe alimentaire) ;
BC : vaporisation de l’eau liquide dans une chaudière sous la pression maximale et à température constante ;
CD : surchauffe, dans une chaudière à pression constante, de la vapeur d’eau jusqu’au point D (vapeur vive) ;
DE : première détente dans les étages à haute pression (HP) de la turbine à vapeur ;
EF : resurchauffe, dans une chaudière à pression constante, de la vapeur d’eau jusqu’en F, point dont la température est généralement la même qu’en D ;
FG : deuxième détente dans les étages moyenne pression (MP) et basse pression (BP) de la turbine à vapeur. La pression au point G est celle de l’isobare du condenseur ;
GA : condensation isobare de toute la vapeur d’eau détendue.

La resurchauffe se rencontre sur la quasi-totalité des installations modernes ; l’isobare de resurchauffe a pour valeur sensiblement le quart de celle de l’isobare de vapeur vive. Dans le cas (rare) où la resurchauffe n’est pas installée, la détente de la vapeur a lieu suivant le circuit DEK.

La valeur de l’isobare du condenseur dépend des possibilités de refroidissement de l’eau liquide, car, sur la plupart des installations, la détente a lieu à une pression inférieure à la pression atmosphérique, en principe aux environs de 50 mbar. L’intérêt principal de la resurchauffe est d’obtenir en fin de détente de la vapeur humide à un titre X plus élevé, donc avec moins d’eau liquide, les gouttelettes constituant en fait une gêne dans les dernières roues BP. D’autre part, la chute enthalpique totale, égale à la somme de toutes les chutes enthalpiques partielles, est accrue, ce qui augmente la puissance disponible sur l’arbre de la turbine. Toutefois, dans le bilan de puissance, la resurchauffe nécessite l’apport d’une quantité supplémentaire de calories.

Pour réaliser une installation fonctionnant dans les meilleures conditions possibles, il faut principalement agir sur deux paramètres.
1. On augmente la chute enthalpique en agissant sur la pression et la température de la vapeur vive, puis en utilisant une resurchauffe et enfin en réduisant la valeur de la pression finale du condenseur. Sur les installations de puissance, on admet de la vapeur vive vers 165 bar et 560 °C, avec resurchauffe à moins de 40 bar jusqu’à 560 °C, et enfin une pression au condenseur de 30 à 50 mbar.
2. On réduit les pertes au condenseur en réchauffant l’eau d’alimentation par des soutirages de vapeur. Chaque soutirage est obtenu en utilisant de la vapeur ayant déjà converti en travail une partie de son énergie thermique ; les calories de la vapeur d’eau soutirée restent dans le cycle au lieu d’être emportées par l’eau de refroidissement du condenseur, et, de ce fait, la quantité de vapeur traversant les aubages BP est réduite ; donc les pertes à l’échappement diminuent. Sur les installations de puissance, on prévoit généralement jusqu’à 8 ou 9 soutirages, et le volume total de vapeur soutirée peut atteindre 40 p. 100 du débit total de vapeur vive. Compte tenu de l’accroissement considérable du volume spécifique au cours des diverses détentes, on évite ainsi des dimensions trop élevées pour les étages BP.