Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
T

turbine (suite)

Une roue de turbine comprend à sa périphérie des ailettes mobiles, c’est-à-dire des profils soigneusement tracés, entre lesquelles s’écoule le fluide, dont les caractéristiques suivent la loi de Bernoulli relative à la transformation réciproque de la pression en vitesse. Pour maintenir la direction générale d’un écoulement, à chaque roue est associé un distributeur muni d’aubes fixes à sa périphérie. L’ensemble d’une roue et du distributeur précédant celle-ci est appelé étage. Le fluide s’écoule normalement à travers ces profils alternativement fixes et mobiles ; il est matérialisé par un triangle des vitesses (fig. 1) correspondant à l’égalité vectorielle Ainsi, un fluide dont la vitesse absolue est à rentrée du distributeur (fig. 2) possède à la sortie de l’étage une vitesse absolue Une turbine est soit à action, soit à réaction. Dans une turbine à action, la détente, c’est-à-dire la diminution de pression, a lieu seulement dans le distributeur ; les aubages de la roue ne sont soumis qu’à une force centrifuge sans variation de pression, donc sans risque de pertes par défaut d’étanchéité. Dans une turbine à réaction, la détente est partagée entre le distributeur et la roue, ce qui confère souvent un rendement amélioré malgré une construction relativement plus compliquée.


Turbine hydraulique

Une turbine hydraulique transforme en énergie mécanique utilisable toute l’énergie, cinétique ou potentielle, contenue dans une chute d’eau. À la fin de sa chute, l’eau pénètre à l’intérieur d’une roue qui est alors animée d’un mouvement de rotation. La puissance P (en watts) développée par une chute d’eau de débit Q (m3/s) et de hauteur H (m) a pour valeur
P = Q . ϖ . H . η.
Dans cette formule, le terme ϖ, qui a pour valeur le produit ρg, est le poids volumique de l’eau, ρ étant la masse volumique de l’eau (1 000 kg/m3 à la température ambiante) et g l’accélération de la pesanteur au lieu considéré ; η est le rendement de la turbine, généralement voisin de 0,95. Pour un débit de 100 m3/s sous une chute de 200 m, la puissance développée est
P = 100 × 1 000 × 9,8 × 200 × 0,95 =
= 186 200 000 W = 186,2 MW.

La première machine hydraulique avec production de puissance a été installée par Benoît Fourneyron (1802-1867) en 1827 à Pont-sur-l’Ognon (Haute-Saône) ; malgré sa puissance très faible (5 kW), cette roue de turbine était déjà l’amorce des roues Francis actuelles.

Dans toute installation de turbine hydraulique, on trouve trois éléments essentiels : une bâche d’alimentation, destinée à permettre l’écoulement de l’eau en amont de la turbine ; un distributeur fixe, destiné à diriger le jet d’eau afin qu’il pénètre dans la roue avec le minimum de pertes ; une roue munie d’ailettes ou d’augets à sa périphérie et maintenue en rotation grâce à la force centrifuge de l’eau. La roue de turbine entraîne en rotation l’arbre sur lequel elle est montée, arbre sur lequel est fixé un alternateur, une pompe, une soufflante ou toute autre machine réceptrice. Il existe essentiellement quatre types de turbine hydraulique (fig. 3) : la turbine Pelton, à action, pour les hautes chutes ; la turbine Francis, à réaction, pour les chutes moyennes ; la turbine Kaplan ou hélice et le groupe-bulbe, également à réaction, pour les basses et très basses chutes.


Similitude des turbines hydrauliques

L’étude tout entière des turbines hydrauliques est dominée par des règles de similitude permettant d’adapter un écoulement quelconque à une réalisation existante. En désignant par L et L′ les dimensions homologues de deux roues semblables (par exemple leurs diamètres), les écoulements sont matérialisables par deux types d’équations.
1. Relation de Froude. Deux roues (de même type, dont une des dimensions est respectivement L et L′) sont associées à des hauteurs de chute H et H′ ayant le même rapport de similitude que ces dimensions.
2. Relation de Combe-Rateau. Pour deux turbines géométriquement semblables soumises à des chutes dont les hauteurs H et H′ ont le même rapport de similitude, on peut tracer le triangle des vitesses par simple proportionnalité avec celui de la turbine de base.

Il est ainsi possible, connaissant les caractéristiques d’une turbine existante (débit Q, puissance P, régime de rotation N, couple moteur C) fonctionnant avec une chute de hauteur H, d’en déduire les caractéristiques d’une turbine géométriquement semblable (Q′, P′, N′, C′) destinée à fonctionner avec une chute H′. En considérant successivement les définitions des divers paramètres, on aboutit à une formule universellement utilisée (bien qu’en unités anciennes),
ns = N . P1/2 . H–5/4,
avec les définitions et les unités suivantes :
ns = régime spécifique en tours par minute, N = régime de rotation en tours par minute, P = puissance en chevaux-vapeur (1 ch = 0,736 kW) et H = hauteur de chute en mètres. La quantité ns est, par définition, la valeur du régime spécifique d’une turbine qui fournirait une puissance de 1 ch sous une chute de 1 m ; ns n’est donc qu’un élément de comparaison.

On trouve chez tous les constructeurs des courbes permettant de choisir rapidement une valeur pour la quantité ns :
Pelton : 15 (1 seul jet) < ns < 65 (6 jets) ;
Francis : 30 < ns < 500 ;
Kaplan, hélice, bulbe : 300 < ns < 1 200.

Il y a ainsi des zones où l’on peut choisir entre deux types de turbine, et, de toute façon, la valeur de ns est inversement proportionnelle à la valeur de la hauteur de chute H. Pratiquement, lorsque l’on veut déterminer rapidement les caractéristiques d’une turbine industrielle devant fonctionner sous une hauteur H avec un débit Q, on commence par calculer la puissance disponible, puis, en fonction de la hauteur H, on choisit une valeur possible pour ns, ce qui permet de déterminer la valeur du régime de rotation N ; le diamètre D de la N roue et la vitesse périphérique U correspondent à la relation La turbine industrielle est ainsi prédimensionnée.