Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
T

Tunisie (suite)

Sous les Fāṭimides, c’est encore l’art kairouanais qui stimule la Grande Mosquée de Sfax, refaite en 988, et la Grande Mosquée de la capitale, Mahdia. Restaurée au xixe s., cette dernière garde beaucoup de son plan primitif et, par suite, de son intérêt. Son porche monumental en saillie est une sorte de compromis entre l’arc de triomphe antique et l’iwān iranien. Si les palais fāṭimides ne sont pas mieux conservés que les palais antérieurs, les investigations faites sur le site de l’un d’eux (al-Qā’im, 934-946) ont permis de dévoiler un beau dallage de mosaïque, sans doute la dernière manifestation de cette technique antique en terre d’islām.

À partir du xiiie s., l’Ifrīqiya n’échappe pas au grand courant de mysticisme qui parcourt le Maghreb et qui s’exprime en architecture, ici comme ailleurs, par la construction de zāwiya, ensembles comportant oratoire, medersa (madrasa), tombeau et habitations : medersa Sīdī Qāsim, de Tunis, xve s. ; medersa Sīdī Ṣāḥib (ou « mosquée du Barbier ») de Kairouan, remaniée pendant des siècles et comportant, entre autres, de riches décors des xviiie et xixe s. Quant aux mosquées, elles évoluent peu sous les Ḥafṣides, mais leurs minarets deviennent plus légers et plus élégants (mosquée de la casbah de Tunis, 1231). Les villes sont entourées de remparts, en grande partie conservés, parfois sous leur aspect du xviiie s. (Kairouan). La Bāb al-Djadīd de Tunis, à deux coudes, compte parmi les belles portes africaines.

Sous la domination ottomane, la Tunisie reste généralement fidèle à la salle hypostile et au minaret carré (Tunis : mosquée de Yūsuf dey, 1610 et suite ; mosquée de Ḥammūda bey, 1654). L’influence turque, souvent mêlée à une influence italienne (Tunis : souk des teinturiers ; türbe al-Bay ; très élégantes latrines), se fait pourtant sentir, et ce non seulement sur les œuvres d’art mineur (tapis, tissus), mais encore sur l’architecture : minarets élancés sur plan polygonal ou circulaire, salles à coupoles hémisphériques butées sur des demi-coupoles (mosquée de Sīdī Maḥrīz de Tunis, v. 1675). C’est à elle qu’on attribue souvent les claveaux alternés en marbre blanc et noir, qui deviennent quasi systématiques (fontaine de Bizerte). Les ponts peuvent dévoiler l’intervention de modèles français et iraniens (pont-barrage de Tébourba).

J.-P. R.

➙ Kairouan.

 H. Saladin, Tunis et Kairouan (Laurens, 1908). / A. Fikri, l’Art islamique en Tunisie. La grande mosquée de Kairouan (Laurens, 1934). / G. Marçais, l’Architecture musulmane d’Occident : Tunisie, Algérie, Maroc, Espagne, Sicile (Arts et métiers graphiques, 1955). / A. Lézine, Architecture de l’Ifrīqiya (Tunisie). Recherches sur les monuments aghlabides (Klincksieck, 1966).

tunnel

Ouvrage linéaire de parcours, de traversée ou de jonction établi au-dessous du niveau du sol.


On confond souvent tunnel et souterrain. Le tunnel est une galerie pratiquée au-dessous du niveau du sol pour donner passage à une voie de communication : route, autoroute, voie ferrée ou voie fluviale. Le souterrain, établi dans les mêmes conditions, peut présenter une forme différente, mais surtout possède une mission très spéciale : stockage de produits pétroliers et de gaz naturel, protection d’une population civile contre les bombardements nucléaires, installation d’une usine hydroélectrique souterraine, établissement d’un abri de fortification militaire, etc. Pour le Métropolitain de Paris, les stations sont des souterrains, mais les galeries qui les relient sont des tunnels. Les égouts et les collecteurs sont aussi des tunnels, de même que, en matière de travaux hydroélectriques, les galeries de dérivation, de conduites d’amenée ou de fuite (l’aménagement du barrage de Roselend a nécessité 55 km de telles galeries en tunnel), ainsi que les galeries d’extraction de matériaux (minerais, houille, asphalte, etc.). Malgré leurs différences spécifiques, les souterrains et les tunnels ont, pour la plupart, les mêmes caractéristiques techniques, qu’il s’agisse de modes de construction, de ventilation, d’évacuation des déblais et des eaux, d’exécution des revêtements et des injections, etc. Toutefois, en matière de tunnels, on peut préciser les formes, les sections, les profils types, tandis que, pour les souterrains, les formes sont extrêmement variées et ne peuvent être définies a priori, mais seulement dans chaque cas particulier par des plans et des coupes d’ouvrages.


Principaux types de sections de tunnels

Les galeries hydrauliques ont une section circulaire qui permet le maximum de surface pour le minimum de revêtement périmétrique. Les égouts ont une section ovoïde avec une cunette ; les collecteurs et les émissaires ont de plus grandes dimensions ; la pente minimale est de 2 p. 100 s’ils sont visitables. Les égouts de Paris ont une hauteur de 2 m au-dessus de la banquette de circulation. Au Métropolitain de Paris, les tunnels à deux voies à gabarit normal ont 9 m de large, alors que la largeur des stations varie entre 15 et 20 m. Le tube de Londres n’a qu’une largeur de 3,30 m.


Ouvrages généraux annexes des tunnels

Pour le drainage et l’épuisement, la pente minimale est de 2 p. 100.

Si les tunnels ne sont pas électrifiés, il faut prévoir une ventilation : pour les tunnels de chemin de fer, on établit des cheminées ; mais, s’ils sont à une grande profondeur, l’aération se fait mécaniquement, à l’aide de ventilateurs avec aspiration d’air frais d’un côté et refoulement d’atmosphère viciée de l’autre. La ventilation des tunnels routiers pose un problème important en raison des gaz d’échappement des moteurs : la teneur limite admissible en oxyde de carbone dans l’air est de 4 p. 10 000. Si l’on ventile dans les galeries et les tunnels du Métropolitain de Paris, c’est en raison de la densité des usagers.


Modes d’exécution des travaux

En premier lieu, il convient de procéder à un piquetage, qui, en général, se limite au report sur le terrain des axes en plan et en profil. Si l’on utilise des explosifs en terrains rocheux, le tir des mines ne doit pas compromettre la stabilité des soutènements. Il faut, avant tout, tenir compte de la nature des terrains traversés : terrains boulants, terrains aquifères, rochers, etc. Dans les bons terrains, la galerie creusée tient sans blindage. Les terrains boulants ou médiocres exigent un soutien immédiat du terrain traversé. Le travail des géomètres ne peut être contrôlé qu’une fois la galerie percée. Les souterrains de faible section peuvent être creusés directement à pleine section ; dans les autres cas, on attaque les différentes parties de la section dans un ordre déterminé. Le matériel de perforation comprend surtout des fleurets à taillant fin. Pour assurer la sécurité des travailleurs et la stabilité du travail qui vient d’être exécuté, on ne peut, généralement, pas attendre le bétonnage de l’ouvrage sans procéder à un soutènement provisoire, exécuté par galerie boisée. Dans les blindages et les soutènements, on utilise également l’acier, sous forme de plaques en tôle emboutie striée ou de plaques munies d’ondulations qui courent sur toute la largeur. On utilise également des cintres métalliques. Après terrassement de la partie inférieure, on bétonne l’anneau de voûte ou on terrasse l’étage inférieur en reprenant les étais en sous-œuvre. Au fur et à mesure de l’avancement des travaux, le purgeage des parois doit être exécuté avec soin et des boulonnages doivent accompagner les autres modes de soutènement. On consolide en général immédiatement en arrière du front de taille. Dans la mesure où le terrain le permet, on peut substituer un gunitage aux boulons d’ancrage ; les cavités derrière les blindages doivent être bloquées au fur et à mesure avec du béton ou des pierres sèches. L’évacuation des déblais s’effectue par engins sur pneus ou sur rails, ou encore par tapis convoyeurs. Dans les zones où des venues d’eau importantes sont à prévoir, des précautions sont à prendre, notamment en exécutant un forage plus ou moins long en avant du front de taille, afin de reconnaître la présence d’eau sous pression ; on assure l’évacuation des eaux jusqu’à l’extérieur : en attaque montante par la gravité, en attaque descendante au moyen de cunettes aboutissant à un puisard, que l’on épuise par pompage.