Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
T

travail (sociologie du) (suite)

 F. W. Taylor, Scientific Management, Comprising Shop Management. The Principles of Scientific Management and Testimony before the Special House Committee (Westport, Connect., 1947 ; 3 vol.) / J. E. Rollet et J. Renaud, la Préparation du travail (Eyrolles, 1956). / H. Fayol, Administration industrielle et générale (Dunod, 1962 ; nouv. éd., 1970). / A. P. Sloan, My Years with General Motors (New York, 1963, 2e éd., 1966 ; trad. fr. Mes années à la General Motors, Hommes et techniques, 1967). / A. Ogus, l’Organisation du bureau d’études (Entreprise moderne d’éd., 1966). / J. P. Simeray, la Structure de l’entreprise (Entreprise moderne d’éd., 1966). / P. Lauzel, Lexique de la gestion (Entreprise moderne d’éd., 1970). / J. Diverrez, Pratique de la direction participative (Entreprise moderne d’éd., 1971).

travailliste (parti)

En angl. Labour Party, parti politique britannique.


Né en 1900 afin de représenter au Parlement le monde du travail, le parti travailliste en est venu en quelques années à constituer l’un des deux grands partis britanniques. Aussi, depuis 1924, a-t-il dirigé à cinq reprises le gouvernement du Royaume-Uni. Son nom (Labour Party) témoigne de ses origines : expression du mouvement (labour movement), il a voulu d’abord être un « parti du travail » à la manière des partis ouvriers et socialistes des autres pays européens. Mais bientôt il a élargi ses ambitions de manière à ne pas se limiter à un parti de classe et à pouvoir diriger l’Angleterre en s’appuyant sur la majorité des électeurs.

Son originalité tient à la fois à son organisation et à son idéologie. Par son organisation, il est composé d’une part de syndicats membres et d’autre part de groupes socialistes et de militants individuels : il associe ainsi de manière étroite syndicalisme et politique. Par son idéologie, le travaillisme se rattache au socialisme démocratique de tendance modérée. Il a toujours prôné l’évolution au lieu de la révolution. Tandis que l’influence marxiste est restée minoritaire en son sein, le Labour Party a été profondément marqué par des exigences éthiques et parfois religieuses et par l’attachement à la liberté individuelle et au système parlementaire.

La doctrine travailliste : un socialisme humaniste et respectueux de l’individu

« Le but du socialisme, c’est de donner une plus grande liberté à l’individu. Les socialistes britanniques n’ont jamais érigé l’État en idole ni demandé que les individus lui soient sacrifiés. Ils n’ont jamais considéré comme un idéal la ruche ou la fourmilière... Au contraire, ils estiment que la valeur d’une société, loin d’être dans l’uniformité, tient à la diversité. Le troupeau est aux antipodes du progrès.

Si les socialistes prônent l’intervention de l’État, ce n’est pas pour elle-même, mais parce que cette intervention est nécessaire pour empêcher l’oppression de certains individus par d’autres, pour garantir que la liberté des uns n’entrave pas la liberté des autres ni n’entre en conflit avec le bien commun de la société. »
(C. Attlee, The Labour Party in Perspective [1937].)


Les origines du travaillisme

C’est dans les vingt dernières années du xixe s. que la rencontre de plusieurs courants ouvriers et socialistes aboutit en Angleterre à la formation d’un nouveau parti politique. Parmi ces courants très divers, mais qui tous sont à la recherche d’une modification radicale des rapports entre le capital et le travail, on peut distinguer trois forces principales. La première est constituée de mouvements et groupes de pensée socialistes. Ceux-ci connaissent alors un rapide essor doctrinal : marxistes stricts de la Fédération social-démocratique autour de Henry Mayers Hyndman (1842-1921), marxistes et anarchistes de la Ligue socialiste autour de William Morris (1834-1896), membres de la Société fabienne (v. Fabiens). En second lieu, entre 1880 et 1900, un syndicalisme d’un type nouveau, plus revendicatif et parfois de contenu révolutionnaire, le « nouvel unionisme », accrédite par sa lutte l’idée que les travailleurs doivent avoir dans la société la place qui leur est à présent déniée tant par l’État que par les employeurs. Enfin, depuis qu’une partie des ouvriers a reçu le droit de vote en 1867, certains s’agitent pour faire élire des représentants du travail au Parlement (et effectivement quelques ouvriers sont élus sous la bannière libérale). Mais le mouvement prend une ampleur nouvelle vers 1888-1890 : de plus en plus nombreux sont ceux qui nient que les intérêts des travailleurs puissent être sérieusement défendus par les partis existants (pour eux, les libéraux sont autant liés avec la classe dirigeante que les conservateurs). Aussi réclament-ils une représentation ouvrière indépendante, c’est-à-dire, en d’autres termes, un parti ouvrier.

À cette fin est fondé en 1893 le parti indépendant du travail (Independent Labour Party, ou ILP), première ébauche du travaillisme. Mais il faut attendre encore plusieurs années pour que les trade-unions se laissent peu à peu convaincre d’abandonner l’alliance traditionnelle avec les libéraux et de créer une organisation propre destinée à présenter des candidatures ouvrières au Parlement. En 1900 est constitué le Comité pour la représentation du travail (Labour Representation Committee, ou LRC), avec à sa tête Ramsay MacDonald* : c’est le véritable point de départ du parti travailliste. Grâce à son action opiniâtre, le Comité parvient à faire élire, aux élections législatives de 1906, 29 députés ouvriers. Le terme trop modeste de LRC est alors abandonné, et le nouveau groupe parlementaire prend le nom de Labour Party.


Le développement du travaillisme (1906-1945)

Désormais engagé sur la voie parlementaire — orientation qui ne sera jamais remise en cause —, le parti travailliste progresse lentement jusqu’en 1914. Il pratique alors une alliance malaisée avec les libéraux au pouvoir. Quand survient la guerre, elle provoque de sérieuses dissensions au sein du mouvement : alors que la majorité, notamment les trade-unions, adopte une position patriotique d’union sacrée, une forte minorité de pacifistes, regroupée dans le parti indépendant du travail autour de Ramsay MacDonald, s’oppose à la participation au conflit. En 1915, le nouveau chef du parti, Arthur Henderson (1863-1935), entre dans le gouvernement de coalition : c’est la première fois qu’un travailliste siège comme ministre.