Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

auto sacramental (suite)

Le modeste auto se convertit en un admirable cérémonial, et l’acte révérenciel, l’offrande à l’eucharistie, s’appuya sur la théologie. Les comédiens recoururent pour sa représentation aux ingénieuses machines, aux luxueux décors et aux trompe-l’œil de l’opéra italien. Tant en ville qu’à la campagne, l’« acte sacramental » cristallisa sous des dehors étincelants les aspirations spirituelles des foules, car il répondait à leurs besoins de communion et de dépassement du quotidien dans la joyeuse et bruyante atmosphère d’un jour solennel férié.

Après la mort de Calderón, l’auto demeura une institution à laquelle la nation tout entière marquait chaque année son attachement. En l’année 1765, les esprits dits « éclairés » obtinrent l’interdiction de la représentation publique des autos. Ces mystères-moralités offensaient le bon goût, affirmaient-ils. De fait, la nouvelle philanthropie n’admettait pas que l’homme du peuple levât les yeux au ciel, négligeant ainsi ses devoirs de bon travailleur soumis et rationnellement productif.

Des divertissements populaires ont toujours marqué les grands jours du calendrier ecclésiastique, Noël, Carnaval, Pâques. Dès la seconde moitié du xve s., les « secrétaires » au service des princes leur donnaient une forme littéraire. Vers 1555, le libraire dramaturge Juan de Timoneda fait représenter, un jour de Fête-Dieu à Valence, une version de la Brebis égarée, une pastorale avec un sens allégorique et la signification finale, qui le dédiait au saint sacrement. Peu à peu, l’auto du « Corpus Christi » accapare, au détriment des saynètes de Noël et de Pâques, l’attention des écrivains et la faveur du public. José de Valdivielso (v. 1560-1638) en fait le support dramatique d’un sermon édifiant ; il se propose ainsi de donner plus d’efficacité au catéchisme de persévérance, car il ne veut voir dans son auditoire populaire que de grands enfants. Le ton est puéril, Vices et vertus personnifiés se disputent dramatiquement l’âme du pécheur.

Pour allécher son public, Valdivielso recourt aux intrigues et aux péripéties du théâtre profane (Doce Autos sacramentales y dos comedias divinas, 1622).

Cependant, les municipes et les confréries de la ville et de la campagne font assaut de générosité pour donner plus de splendeur à la fête eucharistique. Les troupes de comédiens en tournée y trouvent l’occasion de renouveler leur garde-robe et de remplir leurs caisses. Dans les grandes villes du royaume, et notamment à Madrid, on passe commande chaque année dé deux ou quatre autos aux plus célèbres des dramaturges. Lope de Vega (1562-1635) revêt d’un habit allégorique, vite, trop vite taillé, ses propres comédies profanes, ou bien quelque événement retentissant de l’actualité, ou encore un thème biblique, une « nouvelle » courtoise, un épisode de livre de chevalerie ou de la vie d’un saint. Et, tant bien que mal, il y raccorde finalement une apothéose de la Transsubstantiation. Les intrigues amoureuses de son théâtre étaient bien prisées.

Il les reprend sur le mode spirituel ; il célèbre l’idylle sacrée du Christ et de son épouse l’Église, à chaque messe renouvelée sous les espèces du pain et du vin.

C’est Calderón qui donna au genre sa dignité et ses chefs-d’œuvre. Il publia quatre-vingts de ses autos en 1677 : le Grand Théâtre du monde, la Foire aux vanités, le Labyrinthe du monde (Thésée), Poison et contrepoison, La vie est un songe (deux versions), les Charmes de la faute (Ulysse et Circé), Psyché et Cupidon, le Festin de Balthasar, la Gente Demoiselle de la vallée (c’est l’Immaculée Conception), le Divin Orphée. Dans l’approbation ecclésiastique qui précède le recueil, on lit : « Le poète puise ses sujets dans les lettres divines et humaines, et il présente ces histoires à neuf sous une forme visuelle comme autant d’offrandes au saint sacrement. Partout il fait montre de la plus grande rigueur, tant pour le style et le respect des sources que pour la doctrine théologique, scolastique ou expositive. L’allégorie est cohérente et la métaphore toujours vraisemblable... »

L’auto comprend de mille à deux mille vers. Autour d’une intrigue à peine nouée se tressent les trois sens traditionnels : littéral, moral (ou social) et allégorique (ou psychologique). L’action intemporelle se situe à la fois au ciel, sur terre et dans les profondeurs de notre âme. Les personnages représentent ce dont nous sommes tous faits, l’Eau, le Feu, l’Air et la Terre, la Mémoire, la Volonté, l’Entendement, l’Amour, le Libre-arbitre, les cinq sens, et ce dont est faite la Création, ses forces sous-jacentes et ses aspects ou apparences, la Lumière, l’Ombre, le Prince des ténèbres, le Saint-Esprit, la Sagesse et la Démesure... De même que la comédie met en scène nos passions et en assure la purgation (ou catharsis), de même l’auto sacramental projette sur l’estrade nos contradictions et les conflits inéluctables de nos vices et de nos vertus, et les résout miraculeusement dans une scène finale où notre repentir amène notre communion transcendantale avec le Christ et impose la paix dans nos cœurs.

C. V. A.

autotrophie

Aptitude de certains êtres vivants à se développer exclusivement à partir d’éléments minéraux. Cette propriété s’oppose à l’hétérotrophie, qui caractérise les espèces qui, comme l’homme, doivent recevoir obligatoirement une alimentation au moins en partie d’origine organique. Tous les animaux sont hétérotrophes : leur alimentation doit leur apporter une quantité suffisante de carbone et d’azote organique ; une grande partie des Bactéries, tous les Champignons et des parasites ou saprophytes appartenant aux autres groupes sont également dans ce cas. Seuls les végétaux verts et quelques groupes de Bactéries sont autotrophes, c’est-à-dire complètement indépendants des autres êtres vivants. Ils utilisent comme aliments, outre l’eau, contenant en solution divers sels minéraux, du carbone minéral, qui leur est fourni le plus souvent sous forme de gaz carbonique, et de l’azote, soit non combiné, soit sous forme d’ammoniac NH3, d’ions ammonium ou d’ions nitrate


On doit donc distinguer l’autotrophie pour l’azote et l’autotrophie pour le carbone.