Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
T

toucher ou tact (suite)

• Récepteurs de changement d’état. Des récepteurs de ce type peuvent être associés au poil, mais le type achevé en est le corpuscule de Pacini. Nous analyserons plus tard son fonctionnement ; notons ici qu’il répond au début et à la fin d’une déformation par un (quelquefois deux) potentiel d’action, quelles que soient l’amplitude et la vitesse de la déformation (au-delà d’un certain seuil). S’il ne fournit d’informations ni sur l’amplitude ni sur la vitesse, on peut se demander quel est alors son rôle. En fait, il est capable de suivre des fréquences de stimulation jusqu’à 500 à 600 Hz, performance que ne peuvent atteindre les autres mécanorécepteurs, ce qui en fait un excellent détecteur de vibrations.

Nous n’avons rien dit des corpuscules de Meissner, qui sont extrêmement abondants chez les Primates, dans la peau glabre où les dômes de Iggo sont absents. Ils seraient de type dynamique, mais leur étude a été moins poussée.


Thermorécepteurs

En se fondant sur les réponses des fibres de la branche nasale du nerf infra-orbitaire chez le Chat, il a été possible d’établir une carte des points de froid et des points de chaud de la région nasale (fig. 9). La précision de la localisation est de l’ordre de 0,05 à 0,1 mm. Chacun de ces points correspond à une fibre différente ; en d’autres termes, une fibre innerve un seul point, alors que, chez les Primates, la même fibre peut innerver jusqu’à 8 points de froid. Les points étant marqués, la peau était ensuite prélevée pour l’examen au microscope électronique.

• Récepteurs du froid. À l’emplacement des points de froid, on a trouvé assez régulièrement une structure dont la figure 10 donne le schéma. Il s’agit d’une fibre myélinisée perdant sa myéline avant de se ramifier. L’extrémité des ramifications, riche en mitochondries, enfoncée de quelques microns dans les cellules épidermiques basales, serait la région sensible, le site transducteur (v. sensation). Les fibres sensibles au froid ne sont pas toutes myélinisées ; celles qui le sont ont un diamètre qui ne dépasse guère 3 μm (vitesse de conduction de 20 m/s), mais la majorité sont amyéliniques et ont un diamètre de l’ordre de 1 μm (vitesse de conduction de l’ordre de 0,8 m/s). Les fibres myélinisées sont le siège d’une décharge permanente dont la fréquence atteint son maximum (de 6 à 20 potentiels d’action par seconde selon les unités) pour des températures de la peau comprise entre 26 et 30 °C chez le Singe, le Chat et le Rat. Pour les fibres amyéliniques, les valeurs correspondantes de fréquence et de température sont un peu plus faibles. Un refroidissement rapide provoque une accélération transitoire de fréquence suivie d’une stabilisation à un niveau qui dépend de l’écart avec la température optimale (fig. 11). Vers 5 à 10 °C, toute activité cesse. À l’inverse du refroidissement, un réchauffement brusque provoque une inhibition transitoire de la décharge permanente, mais on obtient une décharge accélérée, dite à juste titre « paradoxale », lorsque ce réchauffement porte la température de la peau vers 45 à 50 °C.

• Récepteurs du chaud. Les fibres qui répondent à une augmentation de température de la peau sont toujours de petit diamètre et amyéliniques, mais on n’a pas encore réussi à identifier leurs terminaisons. On ne peut donc rien dire actuellement des récepteurs à proprement parler, sinon que ce ne sont pas les corpuscules de Ruffini, lesquels sont innervés par des fibres myélinisées et ont (nous avons vu) une tout autre fonction. Les fibres amyéliniques sensibles au chaud ont une vitesse de conduction de l’ordre de 0,7 à 0,8 m/s. Comme les fibres du froid, elles présentent une décharge permanente. La fréquence de cette décharge est maximale (de 30 à 40 par seconde) pour des températures qui varient, selon la localisation (nez, pubis, doigts...), de 42 à 47 °C. Les variations brusques de température provoquent un comportement opposé à celui du récepteur du froid : augmentation transitoire de fréquence (on peut atteindre 200 m/s) pour un réchauffement et inhibition transitoire pour un refroidissement. L’existence d’une décharge paradoxale n’a pas encore été observée.


Nocicepteurs

Les nocicepteurs cutanés se caractérisent par deux propriétés : d’une part, il faut, pour les activer, des stimulations nettement plus intenses que celles qui suffisent aux mécano- ou aux thermorécepteurs, et, d’autre part, cette intensité nécessaire est proche de celle qui suffirait à endommager le tissu cutané. On les divise en deux catégories, selon qu’ils sont sensibles aux stimuli mécaniques ou aux stimuli thermiques.

• Nocicepteurs mécaniques. Sur la figure 12 sont représentées les réponses d’une fibre (myélinisée) à la stimulation de la peau par la pression d’une pointe mousse de 2 mm de diamètre, par la pression d’une pointe d’épingle et par le pincement d’une petite pince à griffes. On voit que, dans le premier cas, avec une force dépassant 100 g, la fibre reste silencieuse, alors que, dans le second, il suffit de 30 g, le maximum d’efficacité revenant cependant au pincement. Ainsi, une déformation de la peau aisément détectée par de nombreux mécanorécepteurs est sans effet sur le nocicepteur.

La forte décharge obtenue avec le pincement est caractéristique des nocicepteurs mécaniques : pour l’essentiel, elle se produit au début de la stimulation, et sa durée n’excède pas une seconde, même si la stimulation se prolonge. Il s’agit donc d’une réponse de type dynamique, et l’on remarquera que la fibre n’a aucune activité en l’absence de stimulation. La vitesse de conduction de ces fibres myélinisées est variable (de 5 à 50 m/s) et leur seuil de réponse à une pression peut être de 5 à 1 000 fois, selon les cas, plus élevé que le seuil moyen des mécanorécepteurs. Une fibre peut innerver de 3 à 20 « points » (< 1 mm2) répartis sur une surface cutanée de 1 à 8 cm2, le stimulus qui est efficace sur les points étant sans effet dans les régions intermédiaires.

Les fibres non myélinisées sont également impliquées dans la nociception mécanique, mais leur étude, plus difficile, est moins avancée.