Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
T

thermodynamique (suite)

Un système formé d’un ou de plusieurs corps purs, ou constituants, répartis dans une ou plusieurs phases est, à chaque instant de son évolution, dans un état défini, d’un point de vue macroscopique, par les valeurs que prennent, en chacun des points du système, des grandeurs telles que pression, température, concentrations des divers corps, etc., dont les variations peuvent être indépendantes et dont le nombre dépend de la complexité du système. Ce nombre peut être réduit à deux dans le cas d’un seul corps pur ; celui-ci, en effet, obéit à une équation d’état f (pv, T) = 0.

Bien entendu, l’état microscopique du système, formé d’atomes, de molécules..., est, en chaque point, infiniment plus complexe. Mais la thermodynamique, tout au moins dans sa partie dite classique, issue des Réflexions sur la puissance motrice du feu et sur les machines propres à développer cette puissance (1824) de Sadi Carnot*, des expériences de Joule* et de Gustave Adolphe Hirn (1815-1890), des travaux de Julius Robert von Mayer (1814-1878), de Rudolf Emanuel Clausius (1822-1888), de W. Thomson* et d’autres, veut ignorer cette complexité et ne considérer que des états macroscopiques et des grandeurs définies à notre échelle et qui peuvent, à l’échelle moléculaire, n’avoir plus aucun sens, comme la pression ou la température.

La thermodynamique statistique, développée par Maxwell* et Boltzmann*, puis corrigée à la lumière des théories quantiques par Satyendranath Bose (1894-1974), Einstein*, Fermi*, Dirac*..., s’attache à prévoir les propriétés macroscopiques à partir d’un modèle moléculaire, par le calcul de valeurs moyennes et avec l’aide du calcul des probabilités.

Le raisonnement thermodynamique distingue deux sortes de transformations d’un système : les transformations réversibles et les transformations irréversibles (v. transformations thermodynamiques). Les premières, assimilables à une suite d’états d’équilibre infiniment voisins et qui peuvent être, comme leur nom l’indique, parcourues par le système dans un sens ou dans l’autre et dans des conditions identiques, présentent de telles facilités dans la représentation des phénomènes et les calculs qu’elles ont été pendant longtemps pratiquement les seules à donner lieu à des résultats précis, solutions de systèmes d’équations obtenues par le raisonnement thermodynamique ; l’étude des transformations irréversibles menant seulement à des inéquations traduisant l’orientation, mais non la grandeur des phénomènes. Les transformations réelles, d’ordre physique, chimique, biologique..., sont toujours entachées d’irréversibilité, et l’application à ces phénomènes des seuls résultats relatifs aux transformations réversibles conduirait souvent à des conclusions de peu d’intérêt ou inexactes ; mais depuis quelques décennies se développe activement une thermodynamique quantitative des phénomènes irréversibles, dont les résultats sont encourageants.


Les principes

Deux principes sont à la base de la thermodynamique et conditionnent tous ses développements : le principe de l’équivalence, appelé aussi premier principe, et le principe de Carnot. Un complément important est venu s’y ajouter, auquel on donne volontiers le nom de troisième principe, ou principe de Nernst-Planck.


Principe de l’équivalence

Dans un système mécanique isolé, dont le pendule pesant offre un exemple, l’énergie mécanique se conserve ; si le pendule oscille, cette conservation se traduit par des échanges continuels entre l’énergie potentielle de pesanteur et l’énergie cinétique, de sorte que leur somme demeure constante ; on s’en assure en constatant qu’à chaque oscillation le pendule remonte au même niveau maximal.

En réalité, il n’en est jamais tout à fait ainsi, et, quelles que soient les précautions prises, le pendule, s’il ne reçoit aucune impulsion de l’extérieur, finit toujours par s’arrêter par suite des frottements ; ceux-ci absorbent de l’énergie mécanique et dégagent de la chaleur, de sorte que le travail initialement dépensé pour mettre le pendule en mouvement est finalement transformé en chaleur.

À l’inverse, la chaleur peut être transformée en travail : un gaz qui se détend en repoussant un piston sur lequel on recueille un travail se refroidit ; dans la machine à vapeur, une partie de la chaleur empruntée au foyer est transformée en travail.

Travail et chaleur sont d’ailleurs deux grandeurs qui, indépendamment l’une de l’autre, sont mesurables : l’unité de travail est le joule ; la calorimétrie* a permis de définir une unité de quantité de chaleur, la calorie.

De nombreuses expériences, parmi lesquelles celles de Joule sur la transformation de travail en chaleur et celles de Hirn sur la transformation inverse, ont établi (v. équivalent mécanique de la calorie) l’existence d’un taux unique de transformation, soit 4,186 J/cal.

Une telle constatation permet d’abord d’adopter pour le travail et la quantité de chaleur une même unité, le joule ; la calorie devient alors une unité hors système valant 4,186 J. Cette constatation conduit aussi à l’idée d’équivalence entre le travail et la chaleur, c’est-à-dire au premier principe, dont il existe plusieurs énoncés.
1. Si le système qui a reçu du travail et fourni de la chaleur (ou l’inverse) est revenu, après ces seuls échanges, à son état initial et n’a donc pas, en fin de compte, éprouvé de changement, on peut écrire l’équivalence W + Q = 0, en considérant, ce qu’on fait toujours en thermodynamique, W et Q comme des nombres relatifs, positifs par convention expresse s’ils désignent un travail (W) reçu et une chaleur (Q) reçue par le système, et négatifs dans le cas contraire. Ainsi, la somme W + Q du travail et de la chaleur reçus par un système au cours d’un cycle est nulle.
2. Pour faire passer un système d’un état 1 à un état 2 différent de 1, on peut, en général, l’expérience le montre, combiner d’une infinité de manières les échanges de travail et de chaleur avec le milieu extérieur : ni ni n’est défini par les états 1 et 2, mais il résulte de l’énoncé précédent que leur somme est, elle, parfaitement définie. Ainsi, d’un état initial à un état final, l’un et l’autre donnés, la somme W + Q du travail et de la chaleur reçus par un système est indépendante des transformations intermédiaires et ne dépend que de l’état initial et de l’état final. Cet énoncé est appelé principe de l’état initial et de l’état final. Il en résulte, en particulier, que, si le travail échangé est nul (v constant) ou parfaitement défini par l’état initial et l’état final (p constant), la chaleur échangée est, elle aussi, parfaitement définie : cette proposition est à la base de la calorimétrie et de la thermochimie.