Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
T

Thallophytes (suite)

Les Algues sont les Thallophytes autotrophes, les Champignons les Thallophytes hétérotrophes, les Lichens la symbiose des deux. La présence ou l’absence de chlorophylle, qui permet de séparer les autotrophes des hétérotrophes, impose, certes, des caractères communs : les Algues ne peuvent vivre qu’à la lumière ; les Champignons exigent des quantités suffisantes de matière organique pour vivre et se développer. De ce fait, les Algues, d’une part, et les Champignons, d’autre part, présentent des caractères propres qui permettent de les reconnaître aisément. Cela n’empêche pas que les Champignons — au moins les plus évolués — sont incontestablement des végétaux ; on peut raisonnablement supposer que certains groupes dérivent d’Algues par perte des pigments. On peut rapprocher ainsi les Algues brunes des Champignons Phycomycètes, bien que ces derniers soient toujours siphonés, alors que c’est l’exception chez les « Chromophycées ». On a également tenté de rapprocher les Algues rouges et les Champignons supérieurs (Ascomycètes et Basidiomycètes) ; on trouve dans les deux cas, et c’est un des principaux arguments avancés pour appuyer cette hypothèse, que le cycle général de la plante comporte des phases supplémentaires, sans liaison directe avec les remaniements génétiques, mais indispensables pour que le cycle se déroule complètement. Beaucoup de mycologues n’acceptent pas cette hypothèse, mais on peut se demander si ce n’est pas à la suite d’un a priori exigeant de séparer définitivement et sans appel les Algues et les Champignons.

Une classification phylétique est bonne ; lorsqu’on ne peut pas l’établir rigoureusement, elle doit, cependant, permettre des comparaisons fructueuses, même si l’on ne doit pas prendre ses catégories comme des valeurs absolues. À ce titre, le regroupement en Thallophytes est aussi utile que, par exemple, le regroupement en végétaux.

M. D.

thé (cérémonie du)

Ou chanoyu (de cha, thé, et de yu, eau chaude), culte esthétique venu de la Chine des Song et pratiqué par les milieux cultivés japonais depuis le xiiie s.


C’est à partir du xve s., avec le développement du bouddhisme zen, que les pratiques en sont codifiées selon une étiquette de plus en plus stricte. La cérémonie du thé prend alors une signification philosophique et sociale, sous-tendue par quatre grands principes fondamentaux : l’harmonie, le respect, la pureté et la tranquillité. Elle se déroule dans un milieu raffiné, demande une grande concentration d’esprit et un comportement réservé. Le grand maître en est Sen no Rikyū (v. 1522-1591).

Le chanoyu prend la forme d’une réunion amicale et désintéressée (rarement plus de cinq personnes), au cours de laquelle l’émulsion de poudre de thé vert (matcha) est bue selon des rites et dans un cadre appropriés. L’architecture des pavillons de thé, leurs jardins et les ustensiles utilisés s’en trouvent influencés.

Le pavillon (sukiya), fait de matériaux évoquant un dépouillement voulu, comprend la salle de thé proprement dite (chashitsu) et une sorte d’office (mizuya). La chashitsu, d’environ 9,9 m2, est pourvue d’une alcôve (tokonoma) et d’un âtre en creux situé presque en son centre. Elle est munie de deux entrées, l’une pour l’hôte, l’autre, très basse, pour les invités, qui doivent s’accroupir pour entrer, en signe d’humilité. Auparavant, ceux-ci ont attendu dans un abri (yoritsuki) du jardin, relié par un chemin (roji) au pavillon, et se sont rincés les mains et la bouche pour se purifier.

Les objets utilisés (bol à thé [cha-wan], boîte à thé [chaire], fouet pour battre l’émulsion de thé [chasen], cuillère de bambou [chashaku]) sont des objets d’art. Les gestes de la préparation du thé obéissent à une discipline minutieuse. Les invités sont agenouillés dans la position de cérémonie, et leur comportement n’est pas moins strictement défini. Avant de prendre place, ils admirent la peinture et le brûle-parfum qui ornent le tokonoma. Puis une collation leur est servie, que suit, après un temps de repos, le « thé battu » (koicha). Le bol, essuyé chaque fois avec une pièce de papier, est passé de main en main, et chacun admire sa simplicité rustique. En effet, sa surface, son grain, sa matière, sa forme tendent à évoquer la vie secrète de la nature. Les invités détaillent ensuite les objets utilisés par l’hôte. Enfin, on sert le « thé mince » (usucha), et la conversation s’organise après que l’on a commenté l’arrangement de fleurs (ikebana) placé dans la pièce pendant le temps de repos.

La « voie du thé » (chadō ou sadō), régie aujourd’hui par plusieurs écoles, a perdu beaucoup de sa profondeur spirituelle. Elle n’est plus la tentative pour plonger au plus profond de l’être qu’elle était à l’origine, mais elle n’en reste pas moins extrêmement difficile à saisir à la hâte.

M. M.

➙ Japon / Tch’an et zen dans l’art.

 Ouéda Tokounosouké, la Céramique japonaise (Leroux, 1895). / Okakura Kakuso, The Book of Tea (New York, 1906, 2e éd., Sidney, 1935 ; trad. fr. le Livre du thé, Delpeuch, 1927, 2e éd., Payot, 1931).

théâtre

En grec, theaomai veut dire « voir » et theatron désigne ce que l’on voit, le théâtre. Lieu privilégié où l’on isole, pour le tourmenter, un individu, prince ou mendiant, arraché au clair-obscur de la vie quotidienne...


L’art théâtral

En ce sens, le théâtre est à la fois un art — sans doute le plus ancien de tous — et une expérience collective dont les résonances sont infiniment plus vastes que l’esthétique. Dès son apparition dans la ville grecque, la poésie dramatique cristallise toute l’intensité symbolique dont la langue est capable ; elle investit toutes les émotions et la plupart des besoins ou des rêves de l’homme hellénique. Dans la trame de ce langage interviennent cependant des forces qui sont au travail dans la conscience commune. Il est possible, Hölderlin l’a dit, que le peuple grec ait fait l’expérimentation de sa propre individualité sur la scène du théâtre. Et l’on peut constater des choses semblables pour le théâtre élisabéthain ou le théâtre espagnol du « Siècle d’or », pour la tragédie et la comédie française du xviie s. Quelque chose de plus que l’art est au travail dans la création dramatique, et qui, pourtant, n’existe que par la poésie...